Transitions et mobilité : le grand défi !

Publié le 03/01/2020

9 min

Publié le 03/01/2020

Temps de lecture : 9 min 9 min

Jamais la question de la pollution de l’air et son impact sanitaire et environnemental n’a été aussi présente dans nos sociétés. Elle atteste, s’il en est besoin, de l’urgence à agir ! Le secteur des transports représente un des leviers forts pour conduire ce changement car il demeure un mauvais élève de la transition écologique dans notre pays mais aussi en Europe. Porté par des technologies innovantes, par de nouveaux cadres législatifs plus ambitieux et par une plus grande implication des territoires, il paraît aujourd’hui nécessaire de réinventer, sur terre, dans les airs et en mer, une mobilité plus durable.

 Par Laura Icart

 

Le développement d’une mobilité plus durable est l’un des principaux objectifs de la transition énergétique et l’une des clés pour limiter les impacts des émissions de polluants atmosphériques et de CO2 sur notre santé, notre environnement et notre climat. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) n’hésite pas à qualifier la pollution de l’air de « mal du siècle » et il faut dire qu’avec chaque année près 7 millions de décès prématurés dans le monde, plus de 500 000 en Europe et environ 50 000 en France, il semble déterminant de trouver des solutions à la hauteur des enjeux.

90 % des populations urbaines européennes ne respirent pas un air sain

En Europe, si les émissions de nombreux polluants ont sensiblement diminué ces dernières décennies, entraînant une amélioration de la qualité de l’air, les concentrations de certains polluants atmosphériques demeurent trop élevées et les problèmes liés à la qualité de l’air persistent. Une majorité des populations européennes, particulièrement urbaines, vivent toujours dans des zones où les standards fixés en matière de qualité de l’air sont dépassés. L’ozone (O3), le dioxyde d’azote (NO2) et les particules (PM2,5 et PM10) constituent les polluants nocifs pour la santé les plus présents dans notre environnement. Selon l’Agence européenne de l’environnement (AEE), près de 90 % de la population urbaine en Europe ne respire par un air sain et c’est d’autant plus préoccupant que d’ici 2030, 8 Européens sur 10 vivront dans des villes.

Le secteur des transports, mauvais élève

En novembre 2017, la Commission européenne annonçait une série de mesures en faveur de la mobilité propre pour « améliorer la qualité de vie des Européens, renforcer la compétitivité des entreprises européennes et accentuer la transition vers les voitures propres ». En Europe, le secteur des transports est responsable de près de 30 % des émissions totales de CO2, dont plus de 70 % proviennent du transport routier, également à l’origine de la formation d’ozone, des deux tiers des émissions d’oxydes d’azote (NOx) et du quart des particules fines. En France, les derniers chiffres publiés par le ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES) notent que le transport représente en 2017 30 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) et 38 % des émissions de CO2. Et force est de constater que dans notre pays comme sur notre Vieux Continent, malgré des politiques publiques qui se veulent ambitieuses (les États membres se sont fixé comme objectif une baisse de 60 % des émissions dues aux transports entre 1990 et 2050), la part modale de la route augmente, tout comme l’utilisation de la voiture individuelle, responsable de plus de la moitié des émissions de CO2 liées au transport routier en France et de plus de 60 % en Europe. Les véhicules sont responsables de deux types bien distincts d’émissions dans l’atmosphère : les émissions de GES contribuant au dérèglement climatique de la planète et les émissions de polluants de proximité (NOx, particules fines) ayant des impacts avérés sur notre santé et notre environnement.

Aller vers un transport plus durable et plus intelligent

Le secteur du transport étant un contributeur majeur à la pollution de l’air et en première ligne en matière de transition écologique, la nécessité de transformer et repenser notre mobilité est devenue plus qu’un enjeu de santé publique : un enjeu sociétal. Nous sommes aujourd’hui beaucoup plus mobiles qu’il y a 50 ans et nos comportements influent forcément sur notre environnement mais aussi sur nous-mêmes. Aujourd’hui, si un transport plus propre ne passe pas par l’éradication de la voiture individuelle, il passe nécessairement par une incitation vers des mobilités plus douces et actives (transports en commun, covoiturage, auto-partage…), une réduction des véhicules polluants (norme « Euro 6 », zones à faibles émissions mobilité, prime à la conversion…), une meilleure répartition des infrastructures de transports sur nos territoires, mais aussi une responsabilité individuelle de chaque citoyen et bien évidemment le développement de solutions alternatives de mobilité pour les transports des biens et des personnes (GNV, hydrogène, électriques, biocarburants…) avec un réseau d’avitaillement dédié et une massification des flottes. Favoriser l’intermodalité dans les transports semble aussi un enjeu clé sur terre mais aussi sur les mers et demain dans les airs. En France, la loi d’orientation des mobilités (LOM), promulguée le 24 décembre dernier, affiche l’ambition d’accompagner cette transition, en donnant plus de pouvoir aux territoires et en fixant une trajectoire progressive pour sortir nos mobilités de leur dépendance aux énergies fossiles, via une série de mesures et d’outils directement applicables à une échelle locale. Une nécessité dans un pays où la crise des « gilets jaunes » a mis en lumière une profonde inégalité territoriale en termes d’accès à la mobilité.

La mobilité gaz : une opportunité pour décarboner les transports ?

Dans une société où il nous faudra progressivement repenser nos comportements, nos déplacements et la manière de transporter des marchandises, le gaz naturel et le biogaz apparaissent dès aujourd’hui comme une solution fiable pour participer, au même titre que d’autres énergies, à la décarbonation des transports. Une filière qui s’est structurée à vitesse grand V ces dernières années, portée par un engouement des industriels, des entreprises et des transporteurs pour une énergie qui apporte selon les gaziers « flexibilité, disponibilité et compétitivité » et cela dans toutes les applications de la mobilité : du transport personnel au transport de marchandises pour la mobilité terrestre comme pour la mobilité maritime. En ligne de mire : l’objectif que, demain, le gaz pourrait provenir de sources exclusivement renouvelables.

GNV et bioGNV, vecteurs d’une dynamique territoriale

En Europe, la mobilité au gaz naturel véhicule et au bioGNV se développe : une dynamique clairement enclenchée et soutenue par les instances européennes qui voient en cette carburation le moyen de verdir sa flotte et de répondre aux problématiques de la qualité de l’air. Les véhicules GNV, qui permettent de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 15 % par rapport au gazole et de 80 % pour le bioGNV, et aux niveaux de polluants inférieurs au seuil de la norme « Euro 6 », possèdent de nombreux atouts pour le transport de personnes et de marchandises. Selon l’Association européenne des véhicules au gaz (NGVA), le nombre de véhicules roulant au gaz pourrait passer de 1,4 million aujourd’hui à 13 millions d’ici 2030, un élan soutenu par une politique volontariste de l’Union avec notamment la prise en compte du potentiel du bioGNV, pur produit de l’économie circulaire, dans le green deal mais aussi la nécessité pour les constructeurs de répondre aux nouvelles normes européennes pour les véhicules légers neufs à partir de 2021 (95 g/km émissions de CO2). En France, la filière française s’est structurée autour de l’Association française des véhicules roulant au gaz naturel (AFGNV) et affiche une belle dynamique portée par l’essor de la production locale de biogaz, véritable atout pour développer le bioGNV sur les territoires.

L’hydrogène dans les starting-blocks

On ne parle que de lui ! Et il faut dire que cette petite molécule qui agite les foules expertes ou non, depuis tant d’années, possède un remarquable potentiel de développement dans toutes les applications du secteur énergétique, en particulier la mobilité et l’industrie. Dans le secteur des transports, son essor est boosté par une volonté mondiale de réduire les émissions de polluants et de gaz à effet de serre (GES) et par des États moteurs que sont la Californie, le Japon, ou encore la Corée du Sud. Une volonté qui passe par la production d’un hydrogène décarboné, sans recours aux énergies fossiles. En Europe, si l’Allemagne est le pays historique de l’hydrogène, la France n’est pas en reste et affiche une forte volonté, et cela dès cette année. Les signaux envoyés à la filière hydrogène ces derniers mois sont extrêmement positifs (plan hydrogène, pacte productif 2025, SNBC, PPE, investissements régionaux…) et après une série de premières expérimentations réussies avec Fébus (à Pau), Hype (à Paris), les vélos hydrogène de Pragma Industries ou encore la volonté de la filière française de déployer un véritable écosystème de la mobilité hydrogène avec à la clé la mise en circulation de 1 000 bus d’ici 2023, les perspectives d’aller vers une mobilité décarbonée sont réelles. Reste encore à massifier les projets et à diminuer les coûts de production.

Bien sûr que le secteur des transports n’est pas le seul responsable de la pollution de l’air : l’industrie, l’agriculture, le secteur résidentiel y contribuent également. Mais il constitue l’une des principales sources de pollution atmosphérique en Europe, drainant dans son sillage un ensemble de polluants parmi les plus nocifs pour notre santé, notre environnement et notre climat. Un secteur qui, aujourd’hui encore, reste fortement dépendant des énergies fossiles et qui nécessite une transition ambitieuse dans un monde où la mobilité des personnes et des biens ne va faire que s’accroître.

Crédit : Shutterstock.