La filière électrique appelle le gouvernement à publier « sans attendre » la PPE

Programmation énergétique
17/07/2025
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Après quatre années de concertation, la filière électrique française attend désormais un signal clair du gouvernement et réclame la publication immédiate de la troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Une quinzaine d’organisations parmi lesquelles l’Union française de l’électricité (UFE), Enerplan, France renouvelables, l’Avere ou Cleantech France, rappellent que le décret de la PPE est indispensable « pour donner de la visibilité à la filière en matière d’investissement, d’emploi et de formation », alors même que la France connaît un contexte budgétaire et industriel chahuté.

Par Laura Icart

De concertations en débats parlementaires, la France attend toujours sa feuille de route énergétique, deux après la date initialement prévue. Si les sénateurs ont adopté début juillet, en seconde lecture, la proposition de loi de programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie, dite « PLL Gremillet« , les principaux représentants de la filière électrique française estiment que le contexte parlementaire, « désormais propice » avec l’adoption des articles 3 et 5 de la proposition de loi sur la planification énergétique « dans des termes quasi-identiques » par les deux chambres, permettrait une sortie du décret avant l’étude en seconde lecture à l’Assemblée nationale prévue en séance publique la semaine du 22 septembre. « Un tel signal fort offrirait la visibilité indispensable aux acteurs industriels, tout en permettant au Parlement de consolider ces orientations dans la loi » indiquent les auteurs du courrier.

« Sans PPE, on pilote à vue »

En décembre, le gouvernement a clos la consultation autour de la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Depuis, l’attente autour de la publication du décret de la PPE3 n’a eu de cesse de s’accentuer, ponctuée par plusieurs débats à l’Assemblée, au Sénat, l’étude de la PPL très chaotique du côté du Palais Bourbon et plusieurs annonces de Bercy et de Matignon pour une sortie du décret « d’ici à la fin de l’été ». Mais pour la filière électrique française et plus globalement pour l’ensemble des filières énergétique, il y a désormais « urgence » à donner de la visibilité aux acteurs. En juillet 2024, plusieurs fédérations énergétiques – le syndicat solaire Enerplan, la Fedene, France renouvelables, France gaz, le Syndicat des énergies renouvelables, la Société française d’énergie nucléaire et l’Union française de l’électricité rappelaient déjà dans une lettre ouverte aux parlementaires à quel point le « stop and go est « préjudiciable » pour les filières industrielles et l’avancée de la transition énergétique en France. « Ce cadre législatif stabilisé est essentiel pour planifier les investissements, notamment dans le nucléaire, l’éolien, le solaire et les réseaux », explique un expert du secteur. « Sans PPE, on pilote à vue. »

Porter un message fort face à l’instabilité ambiante

« ll y a eu tellement de signaux négatifs et contradictoires ces deniers temps qu’il est nécessaire de redonner sans plus tarder un cadre clair à notre politique énergétique » estime sur LinkedIn le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER) Jules Nyssen. Depuis plusieurs mois, le débat public semble tiraillé entre les partisans du nucléaire et les défenseurs des énergies renouvelables, illustré par un grand nombre de tribunes qui se sont succédé dans la presse ces derniers mois. « Toutes les technologies d’électrification seront nécessaires » insiste le communiqué des fédérations. « Il faut en finir avec les messages contradictoires. » La PPE, bien plus qu’un outil technocratique, est aussi un levier social. En fixant un cap, elle doit sécuriser les emplois et favoriser des formations qualifiantes. Elle est « également cruciale pour le pouvoir d’achat » selon les signataires, en limitant la dépendance aux importations d’énergies fossiles représentant plus de 60 milliards de la facture énergétique en 2024.

Un enjeu stratégique face à la concurrence internationale

« Avec un objectif fixé à 560 TWh d’électricité décarbonée en 2030, dont au moins 200 TWh renouvelables, le texte voté par les deux chambres offre désormais une assise législative stabilisée et partagée pour notre stratégie énergétique » indique le courrier qui estime que la France n’a plus le temps de tergiverser sur son avenir énergétique au risque d’un véritable décrochage, notamment industriel. Dans un contexte mondial de compétition féroce, où les États-Unis misent toujours sur les hydrocarbures et la Chine accélère massivement sur les renouvelables, la France risque de décrocher. « L’électrification des usages doit être consacrée comme un axe central de notre politique énergétique » estiment les auteurs du courrier. « Encore faut-il que les pouvoirs publics envoient un signal clair et cohérent. » Un message d’autant plus urgent selon eux que plusieurs filières, de l’éolien offshore à l’hydrogène attendent des lignes directrices stables pour planifier leurs déploiements et leurs investissements.

« Le délai de promulgation de la loi dépassera largement l’échéance de la fin de l’été que vous aviez fixée pour la publication de cette PPE » indiquait début juillet Jules Nyssen dans une lettre ouverte au Premier ministre. Si le gouvernement n’a pour le moment pas réagi, la publication du décret PPE « d’ici la fin du mois » est une hypothèse qui reste plus que jamais dans les tablettes de Matignon.

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