Énergie : que faut-il retenir du projet de loi consacré au pouvoir d’achat des Français?

Publié le 25/07/2022

7 min

Publié le 25/07/2022

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L’Assemblée nationale a approuvé le 22 juillet en première lecture le projet de loi visant à favoriser le pouvoir d’achat. Un texte qui contient plusieurs mesures liées directement à l’énergie, des tarifs à la sécurité énergétique de la France, dans un contexte de tensions internationales croissantes et alors que l’Union européenne multiplie les actions pour éviter une pénurie de gaz l’hiver prochain.

Par Laura Icart

 

C’est la première grande loi du quinquennat d’Emmanuel Macron. Une loi pour redonner du pouvoir d’achat aux Français alors que l’inflation grimpe, fortement liée aux conséquences de la guerre en Ukraine et de l’augmentation du prix de l’énergie. Un projet de loi dont le coût total des mesures prévues est estimée à 20 milliards d’euros indique le ministère de l’Économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Sur les 20 articles qu’il contient, une dizaine ont un lien direct avec le secteur énergétique, de la protection des consommateurs face à la flambée des prix à la souveraineté énergétique de notre pays. Quelles sont les principales mesures à retenir ?

Le bouclier tarifaire est maintenu

Les députés ont voté pour le maintien du bouclier tarifaire mis en place à la fin de l’année 2021. Celui-ci permet en premier lieu de geler les prix du gaz à leur niveau d’octobre 2021. Cette mesure, qui concerne aussi bien les habitats privés que l’habitat social et les copropriétés, a permis d’éviter selon le gouvernement « une hausse des tarifs d’environ 50 % au 1er juillet 2022 par rapport à octobre 2021 ». Son coût : environ 4,7 milliards d’euros. Le bouclier tarifaire plafonne également la hausse des factures d’électricité à 4 % pour les particuliers et les petites entreprises éligibles aux tarifs réglementés de vente. Sans ce plafonnement, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) estime que la hausse aurait été de 35 % en moyenne. En 2022, le coût de la mesure est de 9,8 milliards d’euros.

La remise sur les carburants est prolongée

Si les députés ont prolongé la remise à la pompe de 18 centimes d’euros par litre de carburant pour les particuliers en France métropolitaine jusqu’à la fin de l’année 2022, elle devrait être réhaussée puisque le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est dit favorable samedi à augmenter de 18 à 30 centimes la remise sur le litre des carburants, à la demande des députés Les Républicains qui appelaient à aller « plus loin » dans le cadre des discussions autour du projet de loi de finances rectificatives (PLFR). « La remise pourrait passer de 18 à 30 centimes d’euros en septembre et en octobre, puis passer à 10 en novembre et 10 en décembre », a précisé le ministre. Pour rappel, le projet de loi initial prévoyait une baisse progressive de 12 centimes en octobre et de 6 centimes en novembre et la fin du dispositif au 1er décembre au profit d’une indemnité carburants « travailleurs », ciblée sur les ménages qui doivent utiliser leurs véhicules pour aller travailler. Le compromis trouvé avec Les Républicains parle de remise applicable « sans conditions ». À noter que vendredi, TotalEnergies a annoncé une nouvelle remise à la pompe de 20 centimes par litre entre septembre et novembre et de 10 centimes jusqu’à la fin de l’année.

Le titre III dédié à  « renforcer la souveraineté énergétique » 

La forte baisse des approvisionnements gaziers en provenance de Russie et un parc nucléaire qui fonctionne au ralenti pourrait mettre la France dans une situation délicate l’hiver prochain et si notre pays reste moins dépendant que certains voisins, notamment allemand et italien, au gaz russe, le gouvernement a proposé une série de mesures visant à sécuriser l’approvisionnement énergétique, notamment en diversifiant les sources d’approvisionnement. Des mesures qui ont mis les associations environnementales et les députés, notamment de la Nupes, debouts, raillant plusieurs fois les mots du président de la République et de la Première ministre de faire de la France « la première nation à sortir des énergies fossiles » estimant que le gouvernement autorisait des projets « climaticides » sous couvert du pouvoir d’achat. Principaux points de crispation : la réouverture d’une centrale à charbon, l’importation de gaz de schiste notamment des États-Unis et l’installation d’un terminal flottant d’importation de gaz naturel liquéfié (GNL) au Havre. Des « mesures temporaires » selon le gouvernement qui argue la nécessité d’anticiper pour passer l’hiver mais qui ont créé de nombreux remous dans l’hémicycle.

 « Une course contre la montre » pour la sécurité énergétique

Si les articles 10, 11 et 12 modifiant le code de l’énergie relatif à des objectifs de remplissage de stockage de gaz, à une demande à un gestionnaire de réseau de distribution alimenté par le réseau de transport de procéder à l’interruption nécessaire de la consommation des consommateurs finaux agréés raccordés à ce réseau de distribution, ou celui de donner au gouvernement le droit d’ordonner aux exploitants de centrales électriques utilisant du gaz naturel de restreindre ou de suspendre leurs activités en cas de menace pour la sécurité de l’approvisionnement en gaz naturel au niveau local, national ou européen, ont été rapidement adoptés, l’article 13 permettant au gouvernement d’augmenter les capacités nationales de traitement de gaz naturel liquéfié en accélérant les procédures pour l’installation d’un terminal FSRU du Havre, porté par TotalEnergies et qui doit être raccordé en 2023, a été nettement plus discuté. Un projet de terminal flottant qui pourrait fournir jusqu’à 10 % de la consommation hexagonale de gaz et représente une capacité d’importation de GNL supplémentaire de 5 milliards de mètres cubes par an. L’article 13 lève certaines règles administratives et environnementales pour sa construction afin d’accélérer son déploiement. Et notamment la possibilité d’une dispense d’évaluation environnementale pour le projet, ainsi que la possibilité de réaliser une partie du processus de construction par anticipation, sans attendre l’autorisation pour l’ensemble du projet. Les articles 15 et 16 du texte permettent en cas de « menace sur la sécurité d’approvisionnement en électricité » de réouvrir la centrale à charbon de Saint-Avold (Moselle), en prévoyant notamment de recourir à des contrats de travail de courte durée (36 mois) pour embaucher temporairement du personnel. Si l’article 16 prévoit également de relever le plafond d’émissions de gaz à effet de serre (GES) autorisé pour les installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles, ces émissions supplémentaires devront être « compensées par des projets de réduction des émissions de GES dans d’autres secteurs ».

Une inflation qui grimpe

Selon l’UFC-Que Choisir qui mesure chaque mois l’inflation, l’indice de l’inflation s’établit à 6,1 % pour le mois de juillet. Si le secteur alimentaire est particulièrement touché avec plus de 7 % de hausse, les prix de l’énergie continuent également d’augmenter, même si les taux d’inflation sont « légèrement moins élevés en juillet qu’en juin » pour le fioul, l’essence, le gazole et le gaz. Une situation qui s’explique par des prix au plus haut depuis plus d’un an, qui réduit les écarts d’un mois à l’autre. Par exemple, les prix du gaz sont en hausse de 28 % en juillet 2022 par rapport à juillet 2021 contre 39 % en juin 2022 versus juin 2021. L’essence est en hausse de 24 % en juillet 2022 par rapport à juillet 2021, contre + 39 % en juin 2022 par rapport à juin 2021. Une situation fortement dépendante du contexte international qui évolue au jour le jour avec des prix qui pourraient repartir à la hausse à l’approche de l’hiver.