« Chez Enosis, notre cœur de métier c’est le traitement et le recyclage du CO2 en gaz renouvelable»

Publié le 23/07/2020

5 min

Publié le 23/07/2020

Temps de lecture : 5 min 5 min

3 questions à... Vincent Guerré, président d’Enosis Fournisseur de solutions biologiques de production de gaz bas carbone recyclant le CO2 par méthanation, la start-up toulousaine Enosis, « union » en grec, ne doit certainement pas son nom au hasard, puisqu’elle se définit tout à la fois comme « un équipementier et un éleveur de micro-organismes », assurant un lien entre les déchets et l’énergie, créant des passerelles entre les réseaux électriques et gaziers. Son président Vincent Guerré revient pour nous sur le choix de la biométhanation, les projets actuellement menés et les freins et leviers qu’il reste encore à actionner pour développer le potentiel de l’offre d’Enosis. Propos recueillis par Laura Icart   Quel potentiel pour le gaz vert dans notre pays ? On parle beaucoup d’électricité et on a tendance à oublier la place du gaz. Ses usages évoluent. Il sert désormais de carburant. Il est utilisé à la place du charbon pour produire de l’électricité, en complément de l’énergie solaire et éolienne. Principalement fossile, il doit accélérer son verdissement. Le méthane, qu’il s’agisse du biométhane ou du méthane de synthèse, et l’hydrogène sont de ce point de vue complémentaires. Mais le biométhane et le méthane de synthèse sont utilisables sans limitation dans les infrastructures existantes de gaz naturel. Aujourd’hui, le principal enjeu, outre bien sûr l’innovation technologique, c’est de trouver un équilibre économique. Pour être compétitif avec le gaz naturel fossile importé de l’étranger, la production de gaz renouvelables doit s’intégrer à des modèles territoriaux, dans une démarche d’économie circulaire, source de synergies locales, à même de limiter d’autres coûts, voire de soutenir d’autres filières. Produire du gaz à partir de nos déchets, qui ne peuvent être réemployés ou recyclés sous la forme de matière, s’inscrit dans cette logique, en complément des solutions existantes (l’incinération, l’enfouissement, dont le recours est désormais limité). Pourquoi vous êtes-vous orienté sur la méthanation biologique ? Sur quel segment de marché vous positionnez-vous ? Chez Enosis, notre cœur de métier est le traitement et le recyclage du CO2. Dès 2014, nous nous sommes intéressés à la méthanation, une technologie consistant à convertir le monoxyde ou le dioxyde de carbone en méthane, par réaction avec l’hydrogène. À partir de 2015, nous avons développé, en collaboration avec des laboratoires français de recherche (l’INSA de Toulouse, l’INSA de Lyon), un procédé biologique : la biométhanation, une solution low-tech innovante. Nous développons des consortiums de micro-organismes diversifiés, capables de traiter différents gaz. Notre technologie offre deux avantages majeurs : elle permet de gérer plus facilement les effets de la température liés à la réaction, elle est résistante aux impuretés et limite le recours aux équipements d’épuration. Nous nous positionnons sur deux segments de marché. Le premier est celui de la méthanisation. Pour être injecté dans les réseaux de gaz sous la forme de biométhane, le biogaz doit être traité : la part de CO2 qu’il contient doit être supprimée. Plutôt que de l’éventer, nous proposons de la convertir en méthane. Nous permettons ainsi de réduire les émissions de CO2 du site de méthanisation, tout en doublant pratiquement sa production de gaz. Nous contribuons à la neutralité carbone : le CO2 émis, lorsque le méthane est brûlé, est compensé par les quantités recyclées lors de la production. Lorsqu’elle intègre un électrolyseur, cette configuration, power-to-gas, offre la possibilité de stocker les surplus électriques. Notre deuxième segment de marché, c’est la pyrogazéification, filière de transformation de matières, plus difficilement méthanisables, en « syngaz ». Nous proposons de convertir ces derniers en méthane bas carbone, qui peut alors être injecté dans les réseaux, puis stocké et acheminé. À plus long terme, nous nous intéressons aux effluents de CO2 produits par des industriels (tels que les cimentiers). Quelles sont aujourd’hui vos perspectives de développement ? Quels sont aussi les freins que vous identifiez ? Même si la loi énergie-climat a introduit un droit à l’expérimentation, le méthane issu de la méthanation ne bénéficie pas actuellement de cadre juridique propre. Il ne peut donc prétendre systématiquement à un tarif d’achat. Si les acteurs gaziers travaillent sur cette question, la filière a besoin d’un accompagnement des pouvoirs publics pour se développer. Par ailleurs, soutenue par le fonds Kic InnoEnergy, Enosis cherche à renforcer ses fonds propres pour mener à bien son programme d’industrialisation. Plusieurs projets complémentaires sont en cours. Nous sommes partenaires de Plainénergie, qui vise à développer une première installation industrielle de transformation de déchets couplant pyrogazéification et biométhanation. Nous menons en Occitanie, avec le concours de la région, un projet partenarial sur un site de traitement de biodéchets pour produire du méthane à partir du biogaz. Nous sommes lauréats de l’appel à projets IV « concours d’innovation i-Nov » [un dispositif de soutien financé par le programme d’investissements d’avenir (PIA), NDLR] piloté par l’Ademe et Bpifrance, pour développer un prototype préindustriel mobile à même de traiter différentes qualités de gaz. Les deux derniers projets devraient être mis en service en 2021. Nous visons à terme non seulement le marché français, mais également l’étranger. Crédit : Enosis.

Cet article est réservé aux abonnés de Gaz d'aujourd'hui, abonnez-vous si vous souhaitez lire la totalité de cet article.

Je m'abonne