Les solutions gaz contribuent « durablement » à la décarbonation de l’économie française estime GRDF

"Le gaz a toute sa place dans la transition énergétique. Sa décarbonation doit être davantage soutenue" affirme Laurence Poirier-Dietz, directrice générale de GRDF. ©Frederic Berthet GRDF

Publié le 31/03/2023

7 min

Publié le 31/03/2023

Temps de lecture : 7 min 7 min

Le principal gestionnaire de distribution de gaz en France est revenu hier lors de sa conférence annuelle sur les principaux leviers pour décarboner les usages gaz et participer activement à la trajectoire de décarbonation de la France, réaffirmée fin janvier par le président de la République. GRDF insiste sur l’efficacité énergétique, vecteur de réduction des consommations, sur la sobriété et la dynamique des gaz renouvelables. Trois leviers qui pourraient selon le gestionnaire de réseaux « permettre de contribuer à hauteur de 25 % aux efforts de décarbonation du pays » d’ici 2030, soit plus que la part des émissions de CO2 liées au gaz, évaluées aujourd’hui à 20 % du total national.

Par Laura Icart

 

Une filière du biogaz qui pourrait être à l’arrêt d’ici 2024, une possible interdiction des chaudières dans le logement : les inquiétudes se multiplient depuis le début de l’année pour la filière gaz qui souhaite rappeler ses atouts pour accompagner la transition énergétique des territoires alors qu’elle dispose déjà de solutions efficaces pour décarboner les usages gaz. « L’économie des gaz et des gaz vert est un atout pour l’économie française » rappelle la directrice générale de GRDF qui insiste sur le fait qu’une électrification massive des usages à court terme n’aurait pas « les effets escomptés sur la réduction de CO2 » et pourrait impacter le pouvoir d’achat des Français et l’équilibre du système énergétique. « Ce serait un contresens historique de vouloir électrifier massivement les usages, avec un réel impact sur l’appel de puissance hivernale, avant même d’avoir réussi la rénovation énergétique des logements » expliquait, il y a quelques jours à Gaz d’aujourd’hui le nouveau président de Coénove, Jean-Charles Colas-Roy.

Alors qu’une concertation nationale sur la décarbonation du bâtiment est attendue dans les prochaines semaines et qu’une possible interdiction des chaudière gaz a été évoquée au plus haut sommet de l’État, GRDF a rappelé ce matin que des solutions technologiques matures sont disponibles pour décarboner rapidement les usages gaz dans le bâtiment, avec notamment les chaudières à très haute performance énergétique (THPE) qui permettent une économie d’énergie de 30 % par rapport à une chaudière classique et qui  représentent aujourd’hui moins de 45 % du parc des chaudières individuelles et collectives en France, estimé à 9 millions de chaudières.

Des solutions existantes pour décarboner « immédiatement »

Pour réduire les consommations de gaz, GRDF mise sur l’efficacité énergétique et sur le renforcement des mesures de sobriété annoncé par la ministre de la Transition énergétique début mars, avec le retour des groupes de travail sectoriels. En France, le chauffage au gaz représente un tiers des maisons individuelles, la moitié des logements collectifs et la moitié des bâtiments tertiaires. L’énergéticien estime que plusieurs leviers peuvent être actionnés pour atteindre une baisse de 30 % des consommations de gaz en 2030, alors que 20 % de la consommation de gaz sera déjà d’origine renouvelable, conformément au potentiel exprimé par la filière. Cela permettrait ainsi d’économiser annuellement selon GRDF environ « 20 millions de tonnes de CO2 chaque année à partir de 2030 par rapport à 2020 ».

La première mesure consisterait à convertir l’ensemble du parc existant de chaudière classique en THPE et à poursuivre les conversions de chaudière fioul en chaudière gaz, tendance légèrement ralentie en 2022 par la très forte hausse des prix du gaz. « Environ 1 million de chaudières fioul se trouvent à proximité de notre réseau, pouvant être raccordées facilement » indique Thierry Foix, directeur de la relation clients chez GRDF. Autre solution plébiscitée par GRDF : la PAC hybride gaz, qui allie le « meilleur des deux mondes » avec une filière qui se structure à l’échelle européenne. Une trentaine de modèles sont déjà disponibles. GRDF estime à court terme que près de « 800 000 PAC hybrides gaz » pourraient être installées. Contrairement aux chaudières THPE qui ne sont plus éligibles aux aides dans le cadre de Ma prime rénov’, le développement des PAC hybrides est « soutenu et encouragé par les pouvoirs publics » précise Jérôme Chambin, directeur communication et développement. « Il n’y a aucune crainte de disparition d’aides sur la PAC hybride » ajoute-t-il. Actuellement, cette solution bénéfice de l’ensemble des aides d’État disponibles (CEE, Ma prime renov’, TVA réduite à 5,5 %, prêt éco-PTZ).

Un gros potentiel d’économies et de projets

Dans l’industrie, où GRDF compte environ 30 000 clients, l’entreprise estime que le potentiel d’économie annuel de CO2 tourne autour de 10 millions de tonnes en 2030, avec des solutions qui sont elles aussi « déjà disponibles ». Des solutions (remplacement des équipements comme le brûleur, incorporation de biométhane et d’hydrogène, valorisation de la chaleur fatale, capture de carbone dite CCUS…) qui seront améliorées tout au long de la décennie, grâce notamment à plusieurs appels à projets lancés par GRDF. Ces derniers visent à encourager la décarbonation des usages industriels sur les territoires, comme celui qui vient de se terminer et ambitionne d’accélérer l’émergence de zones industrielles bas carbone, ou le projet de chaudière zéro carbone qui s’appuie sur la technologie du CCUS ou de la valorisation du CO2 pour diviser « par plus de quatre » les émissions de CO2. Un prototype de 3 MW sera prochainement construit par un consortium d’acteurs piloté par Naldéo Technologies et coordonné par GRDF. « 70 % des procédés thermiques industriels » ne pourront pas être « électrifiés » avant 2035 « au plus tôt » note GRDF, qui estime que si l’objectif du gouvernement est la décarbonation, les équipements au gaz performants y répondent déjà, et y répondront encore davantage demain avec le potentiel des gaz renouvelables.

Une dynamique gaz vert à consolider

La France est considérée dans le monde comme un « modèle » estime la directrice générale de GRDF Laurence Poiriet-Diez, citant à la fois l’innovation, le droit à l’injection, la construction de la durabilité de la filière et évoquant les multiples visiteurs étrangers qui prennent exemple sur la France pour construire leur filière de gaz renouvelables. Au 1er mars, près de 540 unités de méthanisation en injection sont en service en France. L’Hexagone possède le premier potentiel d’Europe en termes de gisements disponibles et fait figure de moteur dans la production européenne de biométhane. « Le biométhane est la seule énergie renouvelable à avoir dépassé les objectifs prévus dans la PPE » insiste la directrice générale de GRDF. L’Union européenne vise 350 TWh de biométhane injecté (contre 40 TWh en 2022) dans les réseaux en 2030, soit environ 10 % de sa consommation totale de gaz. La filière française vise de son côté un objectif de 20 % qu’elle espère pouvoir faire inscrire dans les prochaines lois programmatiques sur l’énergie, avec un débat parlementaire prévu à la rentrée 2023. En attendant, l’ensemble de la filière attend des mesures concrètes et un soutien renforcé du gouvernement – révisions des tarifs d’achat, mise en place des certificats de production de gaz vert entre autres choses – pour sécuriser la « rentabilité des futurs projets » et pérenniser la filière qui, insiste le directeur général adjoint de GRDF Fréderic Martin, apporte « une réponse concrète aux enjeux de souveraineté énergétique et industrielle de notre pays, tout en favorisant une économie circulaire sur nos territoires ».