Le Pérou carbure au GNL

Publié le 15/11/2017

4 min

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Lorsqu’en 2010, l’usine de liquéfaction de Pampa Melchorita est inaugurée sur la côte péruvienne à 163 km au sud de Lima, elle cumule déjà plusieurs records. En plus d’être la première usine sud-américaine dédiée à la production de gaz naturel liquéfié, elle exploite le plus haut gazoduc au monde construit dans un paysage escarpé depuis le champ gazier de Camisea. Si elle exporte aujourd’hui 100 % du GNL produit, elle fournit aussi depuis peu du GNL par transport terrestre au nord et au sud du pays pour développer le marché domestique intérieur. État des lieux.

Par Laura Icart, envoyée spéciale au Pérou

Comme souvent dans le secteur gazier au Pérou, l’entreprise Perù LNG qui exploite le site de Pampa Melchorita est une société péruvienne mais détenue exclusivement par de grandes firmes énergétiques étrangères. Créée en 2003, son principal actionnaire et opérateur est l’américain Hunt Oil (50 %), le sud-coréen SK Innovation ainsi que le hollandais Shell (20 % chacune) et enfin le japonais Marubeni (10 %). Ce projet, le plus grand investissement privé réalisé au Pérou, a coûté près de 3,87 milliards de dollars.

Une usine dédiée à l’exportation

L’usine de liquéfaction de Melchorita est composée d’un train de liquéfaction, de deux réservoirs de stockage d’une capacité de 130 000 m3 chacun (cinq jours de production suffisent à les remplir) et d’un terminal maritime de 1,3 km de longueur capable de réceptionner des navires avec une capacité entre 151 000 m3 et 173 000 m3. C’est un gazoduc de 408 km, traversant quatre régions entre jungle et côtes, construit à presque 5 000 mètres d’altitude qui est chargé d’alimenter l’usine située au kilomètre 170 de la Panamericana. La première livraison de GNL de l’usine a été faite le 22 juin 2010 au Mexique. Depuis ce sont près de 417 livraisons de GNL qui ont été réalisées, principalement vers l’Europe et l’Asie. « Il y en a eu près de 50 rien qu’en 2017 », précise à Gaz d’aujourd’hui David Lemor, directeur des affaires publiques de Perù LNG. En rachetant en 2013 les actifs de Repsol, la société Shell détient désormais 100 % des droits de commercialisation du GNL produit à Melchorita, mais aussi la charge de développer l’usage du gaz naturel pour le marché intérieur en appliquant une initiative baptisée « pipeline virtuelle » lancée en 2013 par le gouvernement dans le cadre de sa stratégie énergétique nationale visant à promouvoir l’utilisation massive du gaz naturel dans tout le pays.

Un marché intérieur à satisfaire

L’objectif de « pipeline virtuelle » est d’élargir la portée des ressources gazières du Pérou au-delà de la grande région de Lima. Et c’est chose faite, avec l’inauguration en septembre dernier du nouveau terminal de chargement de GNL pour camion sur le site de Melchorita. Désormais, une partie du gaz naturel extrait à Camisea sera transportée par le gazoduc de Perù LNG jusqu’à l’usine pour être liquéfiée. Shell vend ensuite le gaz aux sociétés concessionnaires responsables du transport et de la distribution de l’approvisionnement à travers le pays. Gases del Pacífico, une filiale de la société gazière colombienne Promigas, est chargée de distribuer le gaz aux ménages du nord, tandis que Gas Natural Fenosa détient les droits de concession pour distribuer le gaz dans le sud. Ces deux sociétés transportent le GNL depuis Melchorita et procèdent à sa régazéification, via les nouvelles stations qu’elles ont installées, avant sa distribution aux foyers individuels.

En novembre, ce sont quatorze camions qui ont quitté le terminal de chargement pour répondre à la demande intérieure. À terme, l’installation sera en mesure de charger 20 millions de Nm3 de gaz (normaux mètre cubes), soit l’équivalent de vingt camions quotidiens. Si les volumes transportés ne sont pas énormes, ils devraient permettre d’alimenter en énergie près de 200 000 ménages dans des régions isolées où le gaz naturel restait jusque-là inaccessible, et peut-être d’ouvrir de nouveaux marchés au-delà de Lima et d’Ica – située à 300 km au sud de la capitale.