La filière hydrogène multiplie les annonces

Publié le 06/02/2023

9 min

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Temps de lecture : 9 min 9 min

Au salon Hyvolution, les acteurs français et internationaux de l’hydrogène ont multiplié les annonces. De la production aux usages en passant par les débouchés en termes d’emplois, retour sur les temps forts de l’événement qui s’est tenu les 1er et 2 février à Paris.

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui

 

L’édition 2023 d’Hyvolution, le plus important salon de l’hydrogène en Europe couvrant toute la chaîne de valeur, coorganisé par GL-Events et l’association France Hydrogène, a réuni pendant deux jours près de 8 000 visiteurs professionnels et quelque 400 exposants dont 13 groupes du CAC 40, 11 régions et près d’un quart d’entreprises internationales, signe de la vitalité de ce vecteur énergétique en pleine expansion. Et si le cadre de déploiement de l’hydrogène reste encore à définir avec notamment l’intégration très stratégique pour la France de l’hydrogène bas carbone, l’ensemble de la filière française et européenne a affiché beaucoup d’optimisme et présentait de nouvelles coopérations et innovations dans le secteur de la production, du transport et des réseaux pour accélérer le déploiement d’un écosystème hydrogène sur le Vieux Continent.

Des offres « tout compris » pour la mobilité légère

Stellantis a lancé avec le groupe énergétique Engie des offres « tout compris » combinant véhicules utilitaires et fourniture d’hydrogène. Concrètement, il s’agira de proposer aux entreprises qui commandent des utilitaires Citroën Jumpy, Peugeot Expert et Opel Vivaro, une station de recharge répondant spécifiquement aux besoins de la flotte achetée. Les utilitaires hydrogène arrivent peu à peu sur le marché, particulièrement adaptés pour les trajet extra-urbains et Stellantis, qui produit des véhicules utilitaires depuis un peu plus d’un an dans son usine de Hordain (Nord), compte accélérer la cadence cette année et étoffer sa gamme. Objectif : 10 000 véhicules en 2024. De son côté, Engie, qui exploite moins d’une vingtaine de stations d’hydrogène en France, compte accélérer puisque le groupe français vise un réseau d’une centaines de stations d’ici 2030. Autre annonce, celle d’Hyvia – née de la fusion de Renault et Plug – et HysetCo, société française  et premier opérateur de taxis à hydrogène, qui ont également annoncé leur association pour accélérer la mobilité hydrogène pour les véhicules légers. Les partenaires visent une amélioration de l’expérience dans les stations de recharge du réseau HysetCo, une construction d’une offre « intégrée » pour les véhicule Hyvia  ainsi qu’une maintenance et une fourniture d’hydrogène proposées par l’opérateur de taxis à ses clients. Quant à Hyvia, qui a été sélectionnée dans le cadre du projet important d’intérêt européen commun Hy2Tech, elle s’engage à accompagner HysetCo dans le développement de ses stations de recharge.

14 nouveaux lauréats pour décarboner la mobilité

La ministre de la Transition énergétique Agnès Pannier-Runacher, a dévoilé le 2 février les 14 lauréats de l’appel à projets « Écosystèmes territoriaux hydrogène » lancé en 2020 et opéré par l’Agence de transition écologique (Ademe), représentant une aide de 126 millions d’euros. La majorité des projets visent à développer un parc de véhicules lourds et légers terrestres mais aussi maritimes avec des navettes hydrogène, comme c’est le cas du projet Hynovar, porté par la société HY2Gen qui s’articule autour d’une production d’hydrogène localisée dans le Var et qui alimentera des camions ainsi aue des navettes maritimes. En Guadeloupe, la société Agrosolar porte le projet Hygi qui doit déployer une unité de production d’hydrogène d’1 mégawatt (MW), adossée à une installation photovoltaïque pour alimenter des bus. Autre projet d’ampleur doté d’une subvention de plus de 15 millions d’euros : H2Pro, porté par les sociétés Watea et Free2MoveLease, qui vont proposer une offre de mobilité pour les professionnels utilisateurs de véhicules utilitaires électriques hydrogène. Objectif : 650 véhicules déployés principalement en Auvergne-Rhône-Alpes et en Île-de-France. Au total ce sont 35 écosystèmes (intégrant les deux appels à projets) qui ont été identifiés, représentant selon le communiqué du ministère de la Transition énergétique « 8 400 tonnes d’hydrogène par an » et permettant « d’éviter 130 000 tonnes de C02 par an ».

Un réseau de 100 stations pour Air liquide et TotalEnergies sur les autoroutes européennes

Air liquide et TotalEnergies ont annoncé le 2 février la création d’une co-entreprise « courant 2023 » visant à développer un réseau de stations hydrogène pour les poids lourds sur les grands axes routiers européens. Ce partenariat de grande ampleur entre deux mastodontes du secteur vise à développer une centaine de stations accessibles aux poids lourds « sur les grands axes routiers européens » et plus précisément en France,  dans le Benelux et en Allemagne. Ces stations, seront déployées sur la marque TotalEnergies « dans les prochaines années » indiquent les partenaires sans donner plus de précisions. A chacun à ses compétences et son savoir-faire : Air liquide, qui maîtrise l’ensemble de la chaîne de valeur de l’hydrogène, sera davantage sur l’amont quand TotalEnergies gèrera l’exploitation des stations et la distribution à ses clients.

Acter la transition du bassin de Lacq

Territoire historique de l’exploration gazière en France qui débuta en 1951, le « Texas béarnais » a vu depuis sa source se tarir mais se positionne comme un territoire de transition industrielle en développant notamment des énergies décarbonées. Le 2 février, Teréga Solutions, filiale du groupe Teréga et Elyse Energy, une jeune PME industrielle fondée en 2020, spécialisée dans la production d’hydrogène et dans la valorisation de la matière, ont signé un protocole d’accord (MOU, pour « Memorandum of Understanding ») pour le développement de l’hydrogène bas carbone et des carburants de synthèse dans le bassin de Lacq (Pyrénées-Atlantiques). Objectif : développer conjointement une unité de production d’hydrogène vert par électrolyse de l’eau sur le site de Mourenx et des installations de transport associées afin d’acheminer les différents gaz (H2, CO2 et O2). Une étude de faisabilité sera réalisée dans les prochaines semaines. Les deux entreprises envisagent également selon les résultats de l’étude de porter une structure commune pour opérer le projet.

France Hydrogène et Adecco France veulent stimuler les emplois dans la filière

La transition écologique et énergétique va faire émerger de nouveaux marchés, de nouvelles activités et transformer les métiers. Elle requiert et requerra plus encore des compétences spécifiques. La formation constitue même l’un des cinq axes stratégiques du plan France 2030, présenté par le président de la République en octobre 2021, avec une enveloppe de 2,5 milliards d’euros destinée à structurer l’appareil de formation français autour de filières dynamiques et stratégiques comme l’hydrogène, le numérique, le nucléaire, les énergies vertes et plus globalement l’ensemble du secteur industriel. France Hydrogène et le groupe Adecco ont signé le 2 février, en présence du ministre de l’Industrie Roland Lescure, une convention de partenariat. L’objectif est de répondre aux enjeux actuels et futurs des métiers de l’hydrogène. Dans une filière qui pourrait générer près de 100 000 emplois d’ici la fin de la décennie contre moins de 6 000 aujourd’hui, France Hydrogène a déjà analysé dans son référentiel et dans son livre blanc 84 métiers : 27 nécessitant une réelle expertise, 41 ayant besoin de connaissances de base, quand 16 ne nécessitent pas de connaissances spécifiques sur l’hydrogène. Le référentiel identifie 17 métiers déjà en tension, comme tuyauteur-canalisateur, ingénieur mécatronique ou encore soudeur. Une tension principalement liée au fait que ces compétences sont déjà recherchées dans d’autres filières industrielles et font l’objet d’une forte concurrence. « S’engager dans une filière qui contribue à rendre notre monde plus vivable » c’est une « vraie demande des jeunes » nous confie Alexandre Viros, président France The Adecco Group, « qui sont à la recherche de métiers qui font sens ». D’autant plus dans un secteur celui de l’industrie qui a été pas mal déserté par la jeunesse, mis à mal par la délocalisation et qui pourrait, grâce au potentiel de réindustrialisation offert par l’hydrogène, susciter de nouveaux des vocations. Et les acteurs s’organisent sur toute la chaîne de valeurs. En Auvergne-Rhône-Alpes, le pôle emploi, la région et l’institut des ressources industrielles de Lyon ont développé des formations pour répondre aux besoins spécifiques d’une pépite locale : l’entreprise Symbio, spécialisée dans les systèmes hydrogène pour la mobilité.

Crédit : Shutterstock.