Global Methane Pledge : l’initiative américano-européenne pour réduire les émissions

« En 2019, les concentrations de CH4 n’ont jamais été aussi élevées depuis au moins 800.000 ans » souligne le Giec.

Publié le 11/10/2021

5 min

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À quelques semaines de la conférence des Nations unies sur les changements climatiques (COP26), l’initiative américano-européenne lancée en septembre et visant à réduire les émissions de méthane d’au moins 30 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2020 enregistre l’arrivée de 24 nouveaux pays, dont le Canada.

Par Laura Icart avec AFP

 

Moins médiatique que le CO2, le méthane (CH4) est pourtant un redoutable gaz à effet de serre, un forceur climatique à courte durée de vie ainsi qu’un précurseur d’ozone troposphérique qui impacte aussi bien le climat que notre santé. Son pouvoir de réchauffement global (PRG) serait même 30 fois supérieur à celui du CO2 sur un horizon de 100 ans selon un rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) publié en 2018, qui souligne qu’il faudrait réduire les émissions de CH4 de 35 % par rapport à 2010 d’ici 2050. Ce même groupe d’experts qui alertait, début août, dans le premier des trois rapports publiés dans le cadre de son sixième cycle d’évaluation du climat, sur la « très forte hausse » des émissions de méthane ces 10 dernières années (+ 6 %) et depuis 1750 (+ 156 %). 

Le méthane toujours plus présent dans notre atmosphère

Depuis plus de deux siècles, la concentration en méthane n’a cessé d’augmenter dans notre atmosphère et serait responsable aujourd’hui d’un tiers de l’effet de serre. Environ 40 % du méthane est émis dans l’atmosphère par des sources naturelles (les zones humides, les volcans) et 60 % provient de sources anthropiques (l’agriculture, l’exploitation des combustibles fossiles, les décharges et la combustion de la biomasse). Selon l’édition 2020 du Bulletin annuel sur les GES publié par l’Organisation météorologique mondiale, le CH4 est le deuxième contributeur au forçage radiatif total des GES, à hauteur de 16 % en 2019, après le CO2 et avant le protoxyde d’azote (N2O). Bien qu’elles restent moins d’une décennie dans notre atmosphère, les concentrations moyennes mondiales de CH4 ont atteint en 2019 1 877 parties par milliard (PPB) contre 730 PPB en 1750, soit deux à trois fois plus élevées qu’avant l’ère pré-industrielle. “En 2019, les concentrations de CH4 n’ont jamais été aussi élevées depuis au moins 800 000 ans”, indiquent les scientifiques du Giec.

9 des 20 pays les plus émetteurs 

L’ambition est clairement affichée par les États-Unis et l’Union européenne : trouver un accord mondial à l’issue de la COP26. Une COP qui sera décisive alors que le dernier rapport du Giec montre que pour limiter l’augmentation de la température globale à 1,5 °C par rapport au niveau préindustriel, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent être nulles en 2050, ce qui induit de la part des états signataires de l’accord de Paris des contributions déterminées au niveau national (CDN) beaucoup plus ambitieuses que celles actuellement prévues. Particulièrement nocif pour le climat, le méthane est un sujet majeur dans la lutte contre le réchauffement climatique. Déjà soutenu par l’Argentine, le Ghana, l’Indonésie, l’Irak, l’Italie, le Mexique et le Royaume-Uni, l’émissaire américain pour les négociations climatiques John Kerry a annoncé ce lundi que 24 autres pays avaient rejoint l’initiative, lors d’une réunion virtuelle co-organisée par Washington et l’UE. « Nous avons désormais 9 des 20 plus gros émetteurs, qui représentent 60 % de l’économie mondiale » et près de 30 % des émissions mondiales de méthane, s’est-il félicité. Le Canada s’est notamment engagé à réduire les émissions de méthane provenant du secteur pétrolier et gazier d’au moins 75 % d’ici 2030 par rapport aux niveaux de 2012, a annoncé lundi le ministre de l’Environnement Jonathan Wilkinson. C’est le premier pays à faire sien cet objectif fixé par l’Agence internationale de l’énergie il y a quelques mois dans sa feuille de route. « Un objectif de 75 % c’est important et nous encourageons d’autres pays producteurs de pétrole et de gaz à l’adopter« , a dit le ministre canadien.

La France rejoint l’initiative 

Parmi les autres pays à rejoindre le projet d’accord américano-européen figurent la France, l’Allemagne, le Japon, le Pakistan, Israël, la République démocratique du Congo ou encore le Costa Rica. « Dans un premier temps, nous devons agir ensemble pour combler le déficit mondial de données. Pour cela, il faut intensifier la surveillance : mesure des émissions, reporting, vérification » souligne Frans Timmermans, vice-président du Global Methane Pledge qui précise que « l’Union européenne soutient le Programme des Nations unies pour l’environnement dans la mise en place d’un observatoire international indépendant des émissions de méthane ». John Kerry a appelé d’autres États à en faire autant d’ici la COP26, estimant qu’il s’agissait de la stratégie qui, à elle seule, peut le plus contribuer à limiter le réchauffement à 1,5°C. Selon un communiqué conjoint des États-Unis et de l’UE, la mise en oeuvre de cet accord, s’il est couronné de succès, permettrait de « réduire le réchauffement d’au moins 0,2 °C d’ici 2050« .