La stratégie nationale hydrogène révisée attendue le 15 avril

Aujourd’hui, l’industrie est en France de loin le premier consommateur d’hydrogène, avec 900 000 tonnes consommées annuellement. ©Shutterstock

Publié le 11/04/2025

5 min

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La nouvelle stratégie du gouvernement pour l’hydrogène, attendue depuis des mois par les industriels œuvrant dans ce secteur lié à la transition énergétique de l’industrie lourde et des transports, sera détaillée la semaine prochaine, a annoncé le 10 avril le Premier ministre François Bayrou lors du comité interministériel de l’innovation. Elle sera publiée le 15 avril, a précisé son entourage.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Notre stratégie nationale d’hydrogène actualisée sera détaillée par le ministre de l’Industrie la semaine prochaine« , a annoncé François Bayrou à l’issue du comité qu’il a présidé autour de 14 ministres, au Centre Pompidou de Paris. « Nous avons des progrès à faire sur la production d’hydrogène décarbonée. Nous avons sécurisé 0,4 gigawatt de capacités d’électrolyse pour un objectif en 2026 qui aurait dû être de 0,8 gigawatt« , a indiqué le Premier ministre, sans plus de détails. Alors que le secteur de l’hydrogène décarboné, sur lequel la France s’est positionnée très tôt, traverse une crise liée à une trop faible demande et à son prix encore beaucoup trop élevé pour être rentable, le gouvernement envisage d’annoncer des modifications de sa feuille de route, indiquait une source proche de l’exécutif mercredi à la veille de ce comité interministériel. Cette stratégie actualisée sera donc « publiée le 15 avril » indique Matignon. Le ministre de l’Industrie et de l’énergie Marc Ferracci fera un déplacement sur la thématique hydrogène le 17 avril.

Un « trou d’air » important

La France avait publié en 2020 sa première stratégie hydrogène, mettant sur la table 9 milliards d’euros, dont une partie issue du plan d’investissement France 2030, pour développer ex nihilo une filière industrielle de l’hydrogène décarboné, soutenue aussi par Bruxelles. Sa priorité était alors la décarbonation de l’industrie lourde et le développement d’une filière de l’électrolyse en France, c’est-à-dire de fabricants d’électrolyseurs, les machines nécessaires pour fabriquer de l’hydrogène à partir de l’eau, afin de produire de l’hydrogène sans émettre de CO₂. Des start-ups françaises d’électrolyseurs comme McPhy, Elogen ou Genvia ont vu le jour et certaines ont même ouvert des usines, mais la demande en électrolyseurs ne suit pas du côté des usagers. Les industriels du secteur subissent un « trou d’air », y compris au niveau mondial. De nombreux projets sont retardés ou n’ont pas vu le jour. Néanmoins  » le gouvernement continue de faire de l’hydrogène un levier majeur de décarbonation » assure l’entourage du Premier ministre. Trois nouveaux lauréats dans le domaine de l’hydrogène ont été annoncés dans le cadre de France 2030 : l’usine de membranes d’électrolyseurs de Gen-Hy dans le Doubs, le projet de production d’hydrogène vert Masshylia à La Mède (Bouches-du-Rhône) mais aussi le projet Green Horizon porté par Lhyfe qui produira de l’hydrogène à destination du site du producteur d’engrais Yara, en Normandie.

Un objectif ambitieux conservé pour 2030

En 2020, la stratégie d’industrialisation promettait un effort financier sans précédent de l’État : 10 milliards d’euros en 10 ans. Objectif : déployer jusqu’à 6,5 GW de capacité d’électrolyse et produire annuellement plus de 600 000 tonnes d’hydrogène renouvelable ou bas carbone fléchées principalement pour décarboner l’industrie et la mobilité lourde et intensive. Dans la stratégie en cours de réactualisation qui sera annoncée mardi selon Bercy, le gouvernement devrait confirmer les objectifs inscrits  dans  la PPE à savoir 4,5 GW en 2030 et 8 GW en 2035 . Aujourd’hui un peu moins de 5 % de cette capacité (en intégrant les projets en cours de construction et les décisions finales d’investissement actées) est atteinte. À date, 0,414 GW de capacité d’électrolyse a déjà été financée et sécurisée, 0,205 GW de projets en cours d’instruction pour un financement de France 2030 et 0,200 GW de capacité d’électrolyse est prévue dans le cadre de la première tranche de l’appel d’offre de la direction générale de l’énergie et du climat lancé en décembre. La stratégie révisée évoque un chiffre de 10 GW en 2035. 10 GW, c’est ce que pourrait faire l’Europe d’ici la fin de la décennie, très loin également des 40 GW par électrolyse visées en 2030, elle aussi rattrapée par une compétitivité compliquée à trouver actuellement pour les porteurs de projets, alors que le marché reste loin de niveaux attendus.

Un recentrage des investissements

La filière qui tente de se développer en France côté transports (bennes à ordures ou utilitaires à hydrogène) est en attente depuis plusieurs mois de soutiens budgétaires et d’un ajustement de la stratégie du pays. Aujourd’hui, un peu plus de 1 600 véhicules sont en circulation en France, principalement des véhicules légers. « Sur la mobilité terrestre, on ciblera notre soutien sur les usages et les technologies qui semblent les plus pertinents » indique l’entourage du Premier ministre. France Hydrogène, l’organisme qui regroupe la profession, a salué jeudi une série de nouveaux projets hydrogène qui recevront un soutien public via France 2030 : une usine pour Gen’Hy en Bourgogne-Franche-Comté destinée à la fabrication d’électrolyseurs, le projet Masshylia dans le sud, Green Lhyfe Horizon en Normandie, ainsi que quatre projets de production d’hydrogène pour la fabrication de carburants d’aviation durable au Havre (Kereauzen), à Lacq (BioTJet), Rouen (Dézir) et Saint-Nazaire (TakeKair) pour se conformer à l’objectif européen d’incorporation de 6 % de e-SAF en 2030. « Nous sommes toujours dans l’attente de la publication de la stratégie nationale hydrogène révisée, indispensable pour redonner un cap clair, ambitieux et pérenne sécurisant pour les industriels et les investisseurs » a déclaré Philippe Boucly, président de France Hydrogène cité dans le communiqué. Il a souhaité « un signal positif envers la mobilité routière hydrogène lourde ou intensive« .