« Je dis aux Français que nous allons y arriver »

Gouvernance
10/09/2025
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Le président de la République a nommé le 9 septembre Sébastien Lecornu Premier ministre. Fidèle de la première heure d’Emmanuel Macron, ce natif de l’Eure accède à l’aube de ses 40 ans à Matignon dans un contexte politique et économique particulièrement chahuté. De nombreux dossiers s’empilent déjà sur son bureau, parmi lesquels celui de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE). Un sujet que le nouveau locataire de Matignon connaît bien puisqu’en 2017, alors secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, il avait été chargé de mettre en œuvre la PPE 2.

Par Laura Icart

« Je ne vais pas faire de grands discours puisque cette instabilité et la crise politique et parlementaire que nous connaissons commandent à l’humilité et à la sobriété » a déclaré le nouveau Premier ministre Sébastien Lecornu après un échange privé de plus d’une heure avec le Premier ministre démissionnaire, renversé lundi à une très grande majorité par les députés. Le nouveau locataire de Matignon a salué « le courage » et les « convictions » de son prédécesseur resté aux affaires moins de neuf mois.

Septième Premier ministre de l’ère Macron


Sébastien Lecornu devient le septième Premier ministre d’Emmanuel Macron et le cinquième depuis le début de son second quinquennat en 2022, du jamais vu sous la Ve République. Né le 11 juin 1986, originaire de Courcelles-sur-Seine (Eure), fils d’une secrétaire médicale et d’un technicien de l’industrie aéronautique, Sébastien Lecornu a fait des études de droit à l’université Paris 2-Panthéon-Assas. De 2008 à 2012, il est conseiller du secrétaire d’État aux Affaires européennes puis du ministre de l’Agriculture. En 2014, il est élu maire de Vernon puis, en 2015, président du conseil départemental de l’Eure. Il est nommé le 21 juin 2017 secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire dans le gouvernement d’Édouard Philippe et participe ensuite à tous les gouvernements qui se sont succédé depuis huit ans : Écologie, Collectivités, Outre-mer puis Armées. Ce 10 septembre sur le perron de Matignon, celui qui appelle à l’humilité et au dialogue n’a pas fait de grand discours, homme discret préférant l’ombre à la lumière, « il veut du concret » nous confie une personnalité le connaissant bien, affirmant qu’il était davantage « pragmatique qu’idéologue ».

« Il n’y a pas de chemin impossible »

« Je veux dire aux Françaises et aux Français qu’on va y arriver parce qu’au fond, il n’y a pas de chemin impossible » a souligné Sébastien Lecornu, évoquant la nécessité de « mettre fin au double décalage » entre la vie politique et les préoccupations quotidiennes des Français, évoquant même le contraste avec la géopolitique mondiale où les tensions ne cessent de grandir aux portes de l’Europe. « Il va falloir des ruptures et pas que sur la forme et pas que dans la méthode, des ruptures aussi sur le fond » a affirmé celui qui a déjà commencé à recevoir les forces politiques. Les réactions des oppositions ne se sont pas fait attendre. Du côté du PS, son premier secrétaire Olivier Faure, qui avait fait acte de candidature à Matignon, demande à Sébastien Lecornu « de se soumettre à un vote de confiance et ne pas faire usage du 49.3 ». « Sans justice sociale, fiscale et écologique, sans mesures pour le pouvoir d’achat, les mêmes causes provoqueront les mêmes effets » a indiqué le PS dans un communiqué publié hier. La patronne des Écologistes, Marine Tondelier, qui devrait rencontrer Sébastien Lecornu dans les prochains jours, a parlé « de provocation délibérée » avec cette nomination. Si la participation au gouvernement « n’a rien d’automatique et se fera sur le contenu politique » déclarait hier le président des LR et actuel ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, les bonnes relations entre les deux hommes pourraient assurer au nouveau locataire de Matignon la confiance de LR. Sans surprise, la France insoumise a déjà annoncé sa volonté de déposer une motion de censure « dès le premier jour de la session parlementaire ». De son côté, le Rassemblement national (RN) par la voix de Jordan Bardella évoque « un bail très précaire » tout en rappelant qu’ils ne feront pas « de censure a priori » sans « avoir entendu les propositions ». « Soit il y a rupture, soit il y aura censure » a insisté le président du Rassemblement national et député européen.


PPE, nucléaire, renouvelables et tutti quanti 


Contrairement à ses prédécesseurs, le nouveau Premier ministre n’est pas un inconnu du monde énergétique. En 2017, alors secrétaire d’État auprès du ministre de la Transition écologique d’alors, Nicolas Hulot, il avait travaillé à la mise en œuvre de la deuxième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE 2) en lançant notamment plusieurs groupes de travail nationaux sur le solaire ou encore sur le biogaz. « La réussite de la transition écologique et énergétique se jouera dans les territoires » avait déclaré en 2018 à Gaz d’aujourd’hui le nouveau locataire de Matignon dont beaucoup louent l’expérience d’élu local, lui qui a été le plus jeune président d’un conseil départemental. Huit ans plus tard, Sébastien Lecornu devra gérer l’épineux dossier de la PPE 3 qui fait un reset notamment de l’abandon du nucléaire puisqu’il ne devra plus réduire de 50 % la part du nucléaire dans le mix énergétique français, mais bien assurer sa relance. Sébastien Lecornu devra également envoyer de signaux aux filières énergétiques, mais aussi aux parlementaires qui réclament davantage de visibilité et de clarté dans les politiques publiques. De son côté, l’entourage de Marc Ferracci a assuré à l’AFP vouloir faire en sorte que le texte stratégique de la PPE « soit en haut de la pile », qu’il soit « reconduit ou non ». « La publication rapide de la PPE 3 est cruciale pour apporter de la visibilité aux filières et garantir la sécurité et la souveraineté énergétique de notre pays » a déclaré ce matin le Syndicat des énergies renouvelables (SER). « Cette situation freine notre capacité à nous projeter sereinement sur l’avenir. Elle pèse directement sur la planification et le développement de projets essentiels à la transition énergétique et à la sécurité d’approvisionnement du pays » a réagi de son côté Vattenfall France. « 2018 est donc l’année de la PPE » avait déclaré en février 2018, en clôture du premier forum de l’intelligence énergétique, Sébastien Lecornu. Fera-t-il cette même déclaration en 2025 ?


Outre la publication de la PPE 3, « une ligne rouge » pour le Rassemblement national, la proposition de loi dite « Gremillet » devrait reprendre son parcours législatif quand un nouveau gouvernement sera nommé même si, avec les discussions budgétaires, le calendrier reste très incertain à ce stade.

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