Économie, énergie, climat : la France meilleure que l’Allemagne ?

"Je suis convaincu que nous pouvons parvenir avec l'Allemagne à une compréhension commune sur les sujets énergétiques malgré nos modèles différents" a souligné Bruno Le Maire lors de son déplacement el 13 septembre à Berlin. ©DR

Publié le 14/09/2023

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Le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est réjoui le 13 septembre, lors d’une visite à Berlin, de récents compliments de la presse allemande sur l’économie française, tout en jugeant qu’il y avait encore « un chemin à parcourir considérable« . Le ministre français était en déplacement en Allemagne alors que les divergences entre les deux pays se sont accumulées depuis plusieurs mois, principalement d’ailleurs sur la question énergétique.

Par la rédaction avec AFP

 

Un éditorial du très respecté hebdomadaire allemand Der Spiegel a récemment loué le dynamisme de l’économie française, en le comparant aux mauvaises performances de l’Allemagne, attendue en récession cette année, qualifiant même la France d' »Allemagne en mieux« .  « Je n’aurais jamais pensé voir les mots « miracle économique » et « France » dans la même phrase« , s’est félicité devant la presse M. Le Maire, après une réunion avec ses homologues allemands des Finances et de l’Économie, respectivement Christian Lindner et Robert Habeck. Mais « je pense qu’un peu de lucidité ne saurait nuire. Il nous reste un chemin à parcourir considérable pour réindustrialiser la France. C’est à mes yeux la bataille fondamentale« , a-t-il tempéré. 

Inflation record et industrie en souffrance

« La France avait une part de son industrie dans son PIB de plus 20 %, elle est tombée à moins de 10 %. L’Allemagne est toujours largement au-dessus des 20 % », a-t-il encore développé. Selon la plupart des prévisions, l’économie allemande devrait finir en récession cette année, avec un recul estimé du PIB entre 0,2 et 0,4 %, le FMI tablant de son côté sur – 0,3 %. Le pays est plombé par une nette chute de sa consommation intérieure, en raison de l’inflation, encore à 6,1 % sur un an en juillet. Son industrie souffre des prix de l’énergie trop élevés et d’exportations moins dynamiques vers la Chine et les États-Unis. Si l’électricité a toujours été plus chère en Allemagne qu’en France, le double environ, elle serait aujourd’hui quatre fois plus chère. Dans le même temps, la croissance en France est attendue à 0,9 % cette année par l’Insee. Selon Der Spiegel, « l’écart se réduit et il est probable qu’il continuera à se réduire« , entre les deux économies, après des années de domination économique allemande en Europe. L’hebdomadaire cite pêle-mêle les « réformes » économiques du gouvernement français, le différentiel de prix de l’énergie entre les deux pays, favorable à la France, mais aussi les « prises d’initiative » d’Emmanuel Macron en Europe pour imposer son concept « d’autonomie stratégique » face à la Chine et aux États-Unis.

L’énergie, source de tensions importantes

Le nucléaire français est « une ligne rouge absolue » qui ne « sera jamais négociable », avait déclaré en juin le ministre de l’Économie et des finances Bruno Le Maire lors du colloque annuel de l’Union française de l’électricité, sur fond de désaccords franco-allemands sur le rôle de l’atome dans la nouvelle stratégie énergétique européenne. Une phrase qu’il a d’ailleurs répété fin août au rassemblement annuel des entrepreneurs de France, invitant l’Allemagne à revoir sa position sur la question de la place du nucléaire qui, dans la reforme du marché de l’électricité comme dans la mise à jour de la directive énergie renouvelable, votée hier néanmoins au Parlement, a créé de nombreux remous. Sujet de tensions entre les deux voisins qui ont des modèles énergétiques différents, la réforme du marché de l’électricité a été sans surprise également au cœur de la visite du ministre français. « Je suis convaincu que nous pouvons parvenir avec l’Allemagne à une compréhension commune de ce sujet énergétique et de la réforme du marché européen de l’énergie. » « L’Allemagne et la France travaillent main dans la main pour mettre en œuvre ces réformes », a affirmé de son côté M. Habeck, alors que d’autres sources déplorent le manque d’avancées dans les discussions entre les deux pays à Bruxelles sur la réforme du marché de l’électricité. Mais face au pragmatisme de la Chine ou des États-Unis, « il faut une primauté européenne » insiste Bruno Le Maire.

Alléger les règles

Pour autant, la France et les pays de l’UE doivent « faire mieux« , a souligné M. Le Maire. « Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’une croissance moyenne de 1 %. Nous ne pouvons pas nous satisfaire d’avoir une productivité qui est en berne (…), d’avoir des investissements en termes d’innovation qui sont inférieurs à ceux de la Chine ou des États-Unis. » Le ministre de l’Économie a renouvelé ses appels pressants à « définir une stratégie industrielle européenne plus claire, plus volontariste, plus innovante« . Paris et Berlin se veulent aussi les fers de lance d’une initiative pour « mettre fin à la bureaucratie excessive de la Commission européenne, des instances européennes et de l’Europe de manière générale« . Des règles allégées doivent encourager la croissance et l’innovation, assurent les deux capitales.