Directive énergies renouvelables : un compromis trouvé

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Publié le 17/06/2023

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Après plusieurs semaines de négociations sur fond de tensions entre le couple franco-allemand, les diplomates européens réunis dans le cadre du comité des représentants permanents de l’UE (Coreper) ont finalement trouvé un compromis sur la directive énergies renouvelables. Un accord qui « correspond aux attentes de Paris » qui estime avoir obtenu une reconnaissance du nucléaire ainsi qu’un certain nombre d’avancées, notamment sur l’ammoniac mais aussi l’adoption du règlement « Refuel EU aviation », qui ne faisait pas l’objet en tant que tel de négociations mais qui se trouvait bloqué par le refus de plusieurs pays, dont la France, d’adopter la directive en l’état.

Par la rédaction, avec AFP

 

Le compromis auquel sont parvenus les diplomates, vendredi 16 juin, à Bruxelles peut inspirer un certain scepticisme : l’UE se donne pour objectif de relever à 42,5 % d’ici à 2030 la part des énergies renouvelables dans sa consommation globale. « Je salue l’accord européen auquel nous sommes parvenus sur la directive énergies renouvelables : il correspond aux attentes de la France », a estimé la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, dans une déclaration à la presse. « Il va être enfin possible de tourner la page de ce texte » a précisé le cabinet de la ministre française.

Une directive « clé de voûte » pour le « Fit for 55 »

Cet accord diplomatique, négocié dans le cadre du Coreper, l’instance regroupant les ambassadeurs de l’UE à Bruxelles, confirme « un objectif de 42,5 % d’énergies renouvelables » dans la consommation énergétique de l’Europe d’ici 2030.  Avec cet objectif, l’Europe « donne de la visibilité aux investisseurs et se positionne comme leader de la transition énergétique pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050″, a estimé la ministre. Autre point crucial pour la France : l’accord « acte la reconnaissance du nucléaire » dans l’atteinte des objectifs de décarbonation de l’Europe, se félicite Mme Pannier-Runacher. Cela faisait de longs mois que les États membres affichaient leurs divergences sur la reconnaissance du nucléaire, notamment comme moyen de production d’hydrogène décarboné. L’opposition entre pro et anti-nucléaire s’était matérialisée par la création d’une alliance du nucléaire par la France, regroupant une quinzaine d’États, face à l’Allemagne et les partisans des énergies renouvelables, contempteurs de l’atome. Selon l’accord conclu fin mars, les États membres auront la possibilité de réduire de 20 % la contribution des RFNBO (renewable fuels of non biological origin, autrement dit carburants liquides et gazeux renouvelables d’origine non biologique) à l’utilisation industrielle, sous deux conditions : si la contribution nationale de l’État membre à l’objectif global contraignant de l’UE est conforme à la contribution attendue et si la part d’hydrogène provenant de combustibles fossiles consommée dans l’État membre n’est pas supérieure à 23 % en 2030 et à 20 % en 2035. La cible d’hydrogène renouvelable pour 2030 pourra être réduite de 20 % pour les États membres où la part d’hydrogène fossile dans la consommation d’hydrogène du pays sera inférieure à 23 % et 20 % en 2035. La France a obtenu plus de « souplesse » et de « flexibilité » dans la réalisation de ses objectifs.

Construire une véritable filière de production de SAF

La négociation menée vendredi a notamment permis l’adoption d’un projet de règlement « Refuel EU aviation », sur les carburants destinés au transport aérien. Un règlement qui inscrit par exemple l’obligation pour les fournisseurs de carburant d’aviation de veiller à ce que tout le carburant mis à la disposition des exploitants d’aéronefs dans les aéroports de l’UE contienne une part minimale de SAF à partir de 2025 et, à partir de 2030, une part minimale de carburants synthétiques, les deux parts augmentant progressivement jusqu’en 2050. Le compromis adopté vendredi, « tout en reconnaissant pleinement l’hydrogène d’origine nucléaire, donne le cadre ambitieux pour la décarbonation du secteur aérien« , a indiqué Mme Pannier-Runacher. Elle a souligné que ce texte était « attendu« , au lendemain d’annonces par l’Élysée d’un plan d’aide de 2,2 milliard d’euros pour développer un avion « zéro émission » en France.

Enfin, concernant le secteur agricole, « la France a obtenu hier des garanties de la Commission concernant les usines d’ammoniac qui s’engagent dans des investissements de décarbonation« , a souligné la ministre. La matière première principale des engrais azotés, comme l’ammoniac, est le gaz naturel.

Ces textes doivent encore être entérinés lundi lors d’un conseil de l’énergie réunissant les ministres européens à Luxembourg, qui abordera aussi la très attendue réforme du marché européen de l’électricité. Si les discussions se poursuivent sur de nombreux points techniques relatifs à cette réforme qualifiée de « point central » de la réunion par le cabinet de la ministre française, notamment sur les mécanismes européens en cas de crise énergétique, la France espère l’adoption lundi d’une « orientation générale » sur ce texte.