Vers l’ère du e-méthane

Publié le 03/11/2020

5 min

Publié le 03/11/2020

Temps de lecture : 5 min 5 min

La filière française du méthane de synthèse issu de la méthanation d’hydrogène renouvelable ou bas carbone est en plein développement. Si plusieurs projets sont actuellement en cours en France, le projet de R&D Méthycentre, développé par Storengy, est le seul basé sur un couplage électrolyseur PEM et méthanation catalytique en association avec une unité de méthanisation. Décryptage.

Par Laura Icart

 

Développer l’e-méthane en France, à l’image de ce que fait la Californie actuellement ou certains pays scandinaves, c’est bien l’ambition de Storengy qui souhaite se positionner comme un précurseur en développant les premiers stockages de gaz renouvelable en France. Le stockage des énergies renouvelables, qui sont par définition intermittentes, est un défi majeur pour accompagner la transition énergétique sur nos territoires. Des stockages « de grande capacité sont nécessaires pour accompagner l’introduction de plus en plus importante des énergies renouvelables dans le mix énergétique » nous rappelle Diane Defrenne, cheffe du projet Méthycentre chez Storengy. Si la filiale d’Engie travaille sur une dizaine de projets en France pour développer le potentiel de l’hydrogène comme vecteur énergétique aux multiples usages, Méthycentre sera son premier démonstrateur d’e-méthane et le premier dans l’Hexagone à être couplé à une unité de méthanisation. Sa mise en service est prévue en décembre 2021.

Un assemblage de briques technologiques

Méthycentre, c’est avant tout un projet de recherche et de développement à une échelle territoriale, porté par Storengy, ayant répondu à l’appel à projet national « stockage et conversion de l’énergie » qui doit permettre « d’assembler des briques technologiques afin de mettre en place un pilote. Celui-ci nous permettra de mesurer les performances globales et individuelles de chaque brique technique afin de contribuer à rendre la filière du power-to-gas plus compétitive » précise Diane Defrenne.  En juillet 2017, il a reçu le soutien financier de l’Ademe dans le cadre du programme « démonstrateur de la transition écologique et énergétique », de la région Centre Val de Loire, du syndicat intercommunal d’énergies de la Loire « territoire d’énergie Loire » et du programme Lavoisier. Convertir les surplus d’électricité renouvelable intermittente en hydrogène, valoriser les déchets agricoles en biogaz en augmentant la part convertie en méthane, valoriser le CO2 issu du biogaz en méthane de synthèse permettant in fine la production de trois gaz décarbonés (hydrogène, biométhane et méthane de synthèse) : ce sont les résultats attendus de Méthycentre, qui pourraient permettre à Storengy et ses partenaires de développer à grande échelle une offre technologique et commerciale de power-to-gas, en se positionnant sur un marché à haut potentiel mais aussi contribuer à la structuration d’une filière industrielle française de composants pour électrolyseur.

Coupler méthanisation et méthanation

Installé à Angé, à proximité du site de stockage souterrain de gaz de Céré-la-Ronde, ce démonstrateur de power-to-gas est développé par cinq partenaires : Storengy, Areva H2 Gen, Prodeval, Khimod et le Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA). Si le CEA Liten, situé à Grenoble, accompagne Storengy dans l’instrumentation du pilote et mène de nombreux travaux de recherche sur la méthanation, le CEA Le Ripault de Tours travaille sur une deuxième génération d’électrolyseur PEM et de nouvelles membranes : « Au côté d’un électrolyseur de 250 kW et d’un méthaneur sera aussi installé un électrolyseur expérimental de 20 kW 2e génération » indique Diane Defrenne. Le méthane produit sera injecté sur le réseau de gaz local pour répondre aux besoins domestiques et industriels ainsi que pour un usage mobilité. L’hydrogène sera proposé pour les véhicules ou livré en bombonnes.

Valoriser le CO2 de méthanisation

« Valoriser le CO2 d’unité de méthanisation cela permet de réduire encore l’impact environnemental et d’augmenter la production de méthane vert ! Beaucoup d’unités sont intéressées à optimiser leurs systèmes et augmenter leur production » souligne la responsable du projet Méthycentre. Les travaux de l’unité de méthanisation démarreront au début de l’année prochaine, pour une mise en service prévue en septembre 2021 et une production attendue en décembre 2021, quand toutes les technologies (électrolyseur, méthaneur) seront arrivées sur le site. L’unité de méthanisation a été dimensionnée pour produire entre 30 et 70 Nm3/h de biométhane « auquel on peut rajouter une quinzaine de Nm3/h de gaz de synthèse » précise Diane Defrenne, qui seront injectés sur le réseau de GRDF. Du gaz renouvelable produit à partir de fumier, de lisier de porc et de cultures intermédiaires à vocation énergétique (Cive) issues de l’exploitation porcine la Sablière, située à quelques kilomètres du site. Un pilote qui doit également permettre de faire avancer la réglementation puisqu’il n’existe aujourd’hui aucun cadre régulatoire pour l’e-méthane dans notre pays.

Crédit : Storengy