Quatre infos à retenir cette semaine

En bref...
08/11/2025
10 min

Engie confirme ses objectifs annuels malgré un contexte de marché difficile, porté par la chute des prix de l’énergie et un recul de l’hydraulique, tout en accélérant dans les renouvelables. Le biométhane, de son côté, s’impose comme une filière stratégique mais encore en quête de maturité, selon une étude des Échos études qui souligne les défis de coût et de consolidation à venir. EDF, à l’issue du World Nuclear Exhibition 2025, renforce son leadership nucléaire européen avec une série d’accords industriels et de partenariats internationaux, de la Pologne à la Serbie. Enfin, Bruxelles acte un pas important vers une méthode européenne unique de calcul des émissions du transport, destinée à renforcer la transparence environnementale et à encadrer les pratiques d’écoblanchiment.

Par Laura Icart

Engie maintient ses objectifs annuels malgré la baisse des prix de l’énergie et un recul de l’hydraulique

L’énergéticien Engie a confirmé jeudi ses perspectives de résultats pour l’année, malgré un contexte défavorable marqué par la chute des prix de l’énergie sur les marchés et une forte baisse des volumes hydrologiques. Le chiffre d’affaires du groupe s’établit à 52,8 milliards d’euros sur les neuf premiers mois de l’année, en légère hausse de 0,2 %, tandis que le résultat opérationnel (Ebit) hors nucléaire recule de 10,5 % à 6,3 milliards. À périmètre et taux de change constants, l’activité progresse de 1,8 %, mais le résultat d’exploitation fléchit de 7,3 %. Catherine MacGregor, directrice générale d’Engie, s’est félicitée d’une « performance solide » soutenue par le plan de performance du groupe, qui a déjà contribué à hauteur de 500 millions d’euros. Engie vise désormais le haut de sa fourchette de prévisions, avec un résultat net récurrent attendu entre 4,4 et 5 milliards d’euros en 2025, et un Ebit hors nucléaire entre 8 et 9 milliards. Parallèlement, l’entreprise accélère dans les énergies renouvelables et les contrats d’achat d’électricité (PPA), avec 3,1 GW signés depuis le début de l’année, dont de nouveaux accords avec Meta au Texas et Apple en Italie. Engie poursuit ainsi sa transformation vers un rôle central dans la transition énergétique mondiale, ses capacités renouvelables et de stockage atteignant désormais 55 GW, soit 4 GW de plus qu’à fin 2024.

Le biométhane : une filière verte en quête de maturité selon une étude

Alors que la France ambitionne de multiplier par trois sa production de gaz renouvelable d’ici 2030, « le biométhane s’impose comme un pilier discret mais stratégique de la transition énergétique » indique une étude intitulée : « Le renouveau du marché du biométhane : quelle place pour le biométhane et le biogaz en 2030 ? Quels leviers pour se démarquer et saisir les opportunités d’un marché en pleine accélération ? » publiée cette semaine par Les Échos études. À mi-2025, la France compte 771 installations de production de biométhane, soit le plus grand parc européen, devant l’Allemagne et le Royaume-Uni. La capacité de production a atteint 14,8 TWh, un chiffre en hausse de plus de 20 % sur un an, et plus que doublé depuis 2021. « Le biométhane est un levier essentiel pour décarboner notre consommation de gaz tout en soutenant le monde agricole » rappelle France gaz. L’enjeu n’est pas seulement environnemental : il est aussi économique et territorial, avec plus de 10 000 emplois directs et indirects liés à la filière selon l’Ademe. Le projet de programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE3), qui pourrait être publiée prochainement, fixe un objectif de 44 TWh de biométhane injecté contre 14,8 aujourd’hui. À plus long terme, la production totale de gaz verts (biogaz et biométhane) pourrait atteindre jusqu’à 85 TWh en 2035, selon les scénarios hauts du gouvernement. Néanmoins, « l’objectif 2030 paraît difficile à atteindre », avertit Les Échos études dans son analyse, évoquant le « trou d’air » provoqué par la crise du Covid, la hausse des taux d’intérêt et la révision des aides publiques qui ont freiné l’élan. Le marché, en plein ralentissement depuis 2022, semble toutefois prêt à repartir : près de 1 000 projets sont aujourd’hui en file d’attente, représentant une capacité potentielle de 30 TWh.

Côté finances, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) évalue le coût complet de production (LCOE) du biométhane à 130 euros le MWh en moyenne. Ce tarif reste supérieur aux prix de marché du gaz naturel, mais la tendance est à la baisse : en 2018, il dépassait 150 euros le MWh. Les effets d’échelle, la standardisation des équipements et l’essor des offres clé en main contribuent à réduire progressivement les coûts d’investissement, qui représentent environ 40 % du total. En parallèle, l’État maintient une politique de soutien active. En 2025, le biométhane représente 1,2 milliard d’euros de charges de service public, soit une hausse de 11 % sur un an. Ces soutiens se traduisent par des tarifs d’achat garantis pour les petites installations (moins de 25 GWh par an) et par la mise en place des certificats de production de biométhane (CPB) pour les plus grandes unités au 1er janvier 2026, même si à date peu de contrats ont été signés. La filière se structure autour d’une myriade de PME, d’agriculteurs et de sociétés d’ingénierie, mais aussi de grands énergéticiens comme Engie, TotalEnergies ou GRDF. La montée en puissance du biométhane ouvre la voie à des intégrations verticales : certains acteurs conçoivent, financent et exploitent eux-mêmes leurs sites, d’autres proposent des solutions « clé en main » pour tiers. D’ici à 2030, le secteur devrait connaître trois mutations majeures selon l’étude : l’arrivée de nouveaux entrants issus des renouvelables ou de la reconversion des énergies fossiles ; une phase de consolidation marquée par des opérations de fusions-acquisitions pour atteindre une taille critique ; et, enfin, une convergence technologique entre biométhane, hydrogène vert et méthanation, ouvrant la voie à de nouvelles synergies industrielles.

Plusieurs accords stratégiques pour EDF à l’issue World Nuclear Exhibition 2025

EDF a clôturé le World Nuclear Exhibition (WNE) 2025 à Paris sur une note ambitieuse, marquée par la signature d’une série d’accords industriels et institutionnels confirmant son rôle moteur dans la relance du nucléaire en France et à l’étranger. Le groupe, qui exploite aujourd’hui 56 réacteurs en France, représentant environ 70 % de la production électrique nationale, a annoncé de nouveaux partenariats clés pour soutenir la croissance du nucléaire civil. En Pologne, EDF a signé six accords de coopération avec des entreprises locales dans le cadre du programme de développement de la technologie EPR, visant le deuxième site nucléaire du pays. En Slovénie, des accords avec IBE et Numip doivent préparer la chaîne d’approvisionnement pour un futur projet nucléaire d’ici 2028. Dans les pays nordiques, EDF, via Nuward et Fortum, a renforcé sa coopération autour des projets EPR et SMR, tandis que plusieurs accords techniques ont été conclus avec ABB, Konecranes et WSP.

Sur le plan européen, EDF a également signé une déclaration commune avec Framatome, Tractebel, Ansaldo Energia, Ansaldo Nucleare et Arabelle Solutions pour accélérer le développement du petit réacteur modulaire (SMR) Nuward, dont la puissance est estimée à 340 MW. En Serbie, un protocole signé avec l’Institut des sciences nucléaires Vinča vise à renforcer la formation et la recherche, favorisant l’émergence d’une nouvelle génération d’ingénieurs nucléaires.

En France, EDF a consolidé la pérennité de son parc nucléaire en exploitation à travers plusieurs accords structurants : renouvellement de la convention pluriannuelle avec les associations régionales partenaires, création d’une académie de formation professionnelle avec Apco Technologies dans le cadre de l’initiative Start1, et protocole de durabilité avec Everllence pour garantir la viabilité d’un fournisseur stratégique de moteurs diesel. EDF a également signé un contrat de long terme avec Arabelle Solutions pour la maintenance des systèmes de contrôle-commande de ses centrales, essentiels à la sûreté de ses 19 sites de production. Enfin, sa filiale Metroscope s’est associée à Assystem pour accélérer le déploiement de solutions de surveillance et de diagnostic basées sur l’intelligence artificielle, au service d’une meilleure performance opérationnelle.

Avec cette série d’accords couvrant plus de 10 pays, EDF confirme sa position de leader européen du nucléaire et son engagement à soutenir une filière décarbonée, sûre et compétitive, au cœur de la transition énergétique mondiale.

Transport : vers une méthode européenne unique de calcul des émissions

Bruxelles franchit une nouvelle étape dans la transparence environnementale du transport. Les négociateurs du Parlement européen et du Conseil sont parvenus, mercredi, à un accord préliminaire sur la mise en place d’une méthode de calcul unique des émissions de gaz à effet de serre (GES) générées par les activités de transport au sein de l’Union européenne. Objectif : permettre une comparaison plus fiable entre les différents modes de transport et réduire les risques d’écoblanchiment. Concrètement, les entreprises ne seront pas contraintes de mesurer leurs émissions, mais si elles choisissent de le faire — pour des raisons contractuelles, de déclaration ou de communication — elles devront désormais appliquer cette méthode commune, fondée sur le calcul des émissions par tonne-kilomètre ou passager-kilomètre. L’accord privilégie l’usage de données primaires, jugées plus précises, et prévoit des incitations pour les opérateurs adoptant cette approche. L’Union européenne s’engage également à développer, dans un délai de quatre ans, un outil de calcul public et gratuit à destination des petites et moyennes entreprises, accompagné d’un guide pratique. Les eurodéputés ont également obtenu qu’une évaluation soit menée sur l’intégration des émissions sur l’ensemble du cycle de vie des services de transport — de la production des véhicules jusqu’à leur fin d’exploitation — en vue d’une future extension du dispositif. Pour Antonio Decaro, rapporteur (S&D, Italie), cet accord « marque une avancée majeure pour la fiabilité des données environnementales du secteur ». Norbert Lins (PPE, Allemagne) souligne, lui, que les PME bénéficieront « d’un cadre simplifié et d’incitations à la précision sans charges excessives ». L’accord doit désormais être formellement validé par le Conseil et le Parlement avant sa mise en œuvre, prévue dans un délai de quatre ans et demi.

Vous aimerez aussi