Quatre infos à retenir cette semaine

En bref
12/10/2025
8 min

Neutralité carbone, méthanisation, valorisation des biodéchets et structuration du CO₂ biogénique… L’Ademe relance un exercice stratégique de prospective pour actualiser les scénarios vers la neutralité carbone à l’horizon 2050. Dans le Grand Est, Engie et CVE Biogaz signent un premier contrat de long terme dans le cadre des nouveaux certificats de production de biogaz. De leur côté, GRDF et France Biodéchets nouent un partenariat pour massifier le tri et la valorisation des biodéchets. Enfin, un consortium d’acteurs publics et privés lance le projet GECO₂ pour structurer une filière française du CO₂ biogénique à fort potentiel industriel.

Par Laura Icart 

L’Ademe relance la prospective pour atteindre la neutralité carbone en 2050

L’Ademe a annoncé relancer le 7 octobre un grand exercice de prospective pour atteindre la neutralité carbone en 2050, en partenariat avec plusieurs acteurs publics comme RTE, Natran (ex-GRTgaz), Inria et la Fondation pour la recherche sur la biodiversité. Cette initiative, qui fait suite à l’étude « Transition(s) 2050 », vise à actualiser les scénarios existants en tenant compte des évolutions récentes, telles que les crises sanitaires, géopolitiques et le changement climatique. Sylvain Waserman, PDG de l’Ademe, souligne l’importance de cette démarche « pour éclairer les choix collectifs face à un monde en rapide mutation ». L’exercice se structure autour de cinq scénarios : un tendanciel et quatre alternatifs, chacun fondé sur des choix sociétaux différents pour parvenir à la neutralité carbone. « Sur le volet énergie-climat, la DGEC a demandé à l’Ademe et à RTE de travailler ensemble à de futurs scénarios communs de neutralité carbone », explique Sophie Mourlon, à la tête de la direction générale de l’énergie et du climat (DGEC). « Ce travail collaboratif renforcera la complémentarité des compétences de chaque acteur, en particulier en matière de mix énergétique et de gestion des réseaux de gaz » explique l’agence. Par rapport à la première phase, les analyses seront plus détaillées, intégrant des enjeux comme la biodiversité, l’économie circulaire, l’adaptation ou encore le numérique. Ce travail repose sur une approche systémique, abordant les interdépendances entre énergie, climat, alimentation, eau et autres domaines. L’originalité de cette prospective réside également dans son ancrage territorial, avec des scénarios adaptés à six territoires contrastés pour évaluer les impacts locaux. Le projet bénéficiera « de l’expertise de nombreux partenaires publics spécialisés et sera enrichi par une concertation prévue pour fin 2025 », impliquant ONG, syndicats, collectivités et entreprises. Le but est de fournir des analyses robustes et adaptées aux défis actuels, tout en nourrissant la planification écologique nationale, avec une première publication des résultats prévue pour fin 2026.

Certificat de production de biogaz : Engie et CVE Biogaz signe un premier BPA

Engie et CVE Biogaz ont officialisé le 9 octobre la signature d’un contrat inédit de vente de biométhane sur 15 ans dans le Grand Est. À partir de 2027, l’unité de méthanisation de Ludres (Meurthe-et-Moselle) injectera du biométhane dans le réseau national, dans le cadre du nouveau mécanisme des certificats de production de biogaz (CPB). Concrètement, Engie s’engage à acheter la totalité de la production de biométhane issue de l’unité de Ludres pendant 15 ans. L’unité de méthanisation, qui verra le jour début 2027, produira 31 GWh de biométhane par an, soit l’équivalent de la consommation de 8 000 logements neufs en valorisant chaque année 33 000 tonnes de biodéchets issus des ménages, de la restauration, du secteur agroalimentaire et des exploitations agricoles locales. « La signature de ce premier BPA sous le mécanisme des CPB avec Engie, pour notre projet phare de Ludres, démontre la pertinence de notre partenariat sur le long terme. Le mécanisme des CPB va contribuer à atteindre l’objectif de 10 % de biométhane dans le mix gazier d’ici 2030 », explique Arnaud Bossis, directeur général de CVE Biogaz, qui évoquait dans Gaz d’aujourd’hui en début d’année une dizaine de projets dans le portefeuille de CVE concernés par ce dispositif extra-budgétaire. Néanmoins « une visibilité sur trois ans pour lancer ce dispositif n’est pas suffisante » nous indique-t-il, alors que la filière demande depuis plusieurs mois des objectifs post 2028. Il se dit également « inquiet du manque de visibilité réglementaire », alors que la PPE 3 n’a toujours pas été publiée.

France Biodéchets et GRDF s’engagent dans un partenariat stratégique pour valoriser les biodéchets par méthanisation

En France, les biodéchets représentent un gisement encore largement sous-exploité. Chaque année, ce sont près de 10 millions de tonnes de déchets alimentaires qui sont produits, mais moins de 10 % sont aujourd’hui triés et valorisés. Pourtant, la loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (Agec) impose depuis le 1er janvier 2024 le tri à la source des biodéchets pour tous les producteurs, ménages comme professionnels. Les biodéchets constituent environ un tiers du contenu de la poubelle grise, soit environ 83 kg par habitant chaque année. Malgré le cadre réglementaire, seule une commune sur deux propose actuellement une solution adaptée de tri (collecte séparée ou compostage) et la couverture nationale reste incomplète, particulièrement en zones rurales et périurbaines. À l’occasion du salon Pollutec à Lyon, France Biodéchets et GRDF ont officialisé le 7 octobre une convention de partenariat destinée à renforcer la valorisation des biodéchets via la méthanisation. Ce rapprochement s’inscrit dans une dynamique d’économie circulaire et de décarbonation des territoires, alors que les biodéchets représentent « un gisement énergétique estimé à 9 TWh par an de biométhane d’ici 2030 ». L’enjeu est double : faire reconnaître la méthanisation comme voie prioritaire de traitement et structurer une filière encore émergente, où moins de 10 % des biodéchets sont aujourd’hui triés. La convention prévoit quatre axes de coopération, allant de la promotion du tri à la mise en œuvre de solutions innovantes, en passant par le partage de bonnes pratiques. « Ce partenariat vient lever des freins essentiels à la mise en œuvre du tri à la source », souligne Stephan Martinez, président de France Biodéchets. « Il s’agit également d’accompagner entreprises et collectivités dans la production de gaz vert et d’engrais naturels » ajoute Stéphane Gorisse, directeur du développement des gaz verts chez GRDF. Des journées techniques, un observatoire national et des actions de sensibilisation viendront structurer cette ambition commune.

GECO₂ : une alliance pour structurer la filière du CO₂ biogénique en France

Un consortium d’acteurs de la filière, dont AMGE, ATEE, Biogaz Vallée, GRDF, et MD CO₂, un pionnier du captage et de la valorisation du CO₂ dans le Grand Est, ont annoncé le 7 octobre se structurer autour du projet GECO₂. Le CO₂ biogénique, coproduit issu de la méthanisation, se positionne comme une solution clé pour décarboner les secteurs industriels. Leur ambition : répondre à la demande croissante de CO₂ dans des industries variées telles que l’agroalimentaire, la chimie et les carburants de synthèse, tout en réduisant l’empreinte carbone de cette matière première, avec l’objectif de créer une filière coordonnée et pérenne, qui inclut la mise en place d’une réglementation adaptée, la certification de la qualité du CO₂ biogénique, ainsi que l’optimisation de son utilisation dans des applications telles que la carbonatation, la fertilisation ou la production de carburants de synthèse. Aujourd’hui, une grande majorité du CO₂ utilisé en France provient de sources fossiles, notamment dans la production d’engrais, mais la méthanisation offre une alternative durable et prometteuse. C’est dans cette optique que le projet GECO₂ a remporté l’appel à projets 2025-2027, financé par la région Grand Est et le fonds européen agricole pour le développement rural (Feader). Le programme de GECO₂, prévu pour durer trois ans, se concentre sur la structuration de la chaîne de valeur du CO₂ biogénique, le renforcement de sa durabilité et de sa reconnaissance à travers des labels et des standards, et enfin sur la mise en place d’une gouvernance claire de la filière. En travaillant sur ces axes, GECO₂ ambitionne de contribuer de manière significative à la transition énergétique de la France et de positionner le CO₂ biogénique comme une matière première stratégique pour l’économie circulaire et la compétitivité des industries utilisatrices.

Vous aimerez aussi