Quatre infos à retenir cette semaine

En Bref...
29/09/2025
8 min

Alors que la rumeur d’un moratoire sur l’éolien et le solaire terrestres, envisagé dans le cadre de la nouvelle PPE, a déclenché un tollé dans le secteur et parmi les ONG, le gouvernement a tenté d’éteindre l’incendie. Dans le même temps, les projets avancent sur le terrain : à Créteil, la première station française d’hydrogène alimentée par des déchets a été inaugurée ; en Espagne, Waga Energy annonce un nouveau site de production de biométhane. Enfin, à Berlin, l’Alliance H2med, fer de lance du corridor européen de l’hydrogène, élargit ses rangs et s’affirme comme un levier clé de souveraineté énergétique.

Par Laura icart 

PPE 3 : une rumeur de moratoire remet une pièce dans la machine

Jamais sans doute une programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) n’aura été aussi politisée. C’est une information qui a fait l’effet d’une déflagration dans les milieux de l’énergie et de l’écologie. Jeudi 25 septembre, le média Contexte révélait que le Premier ministre, Sébastien Lecornu, envisagerait de publier par décret la future PPE en y incluant un moratoire sur les énergies renouvelables terrestres – solaire et éolien. L’objectif : éviter une censure du Rassemblement national, dans un contexte parlementaire sous tension. Dès vendredi Matignon démentait formellement. « Cette information est complètement fausse et mensongère. Il n’est pas question de revenir sur nos ambitions énergétiques », a assuré Sébastien Lecornu dans une interview au Parisien. Le chef du gouvernement a rappelé que « la décarbonation reste une priorité stratégique pour notre souveraineté », tout en ajoutant qu’« aucune rente ne sera tolérée », en référence à l’utilisation des aides publiques par les entreprises du secteur. L’hypothèse d’un moratoire n’est pas nouvelle. En juin dernier, un amendement en ce sens, déposé par Les Républicains, avait été rejeté à une large majorité par l’Assemblée nationale. Le retour de cette mesure par voie réglementaire serait donc perçu, par ses opposants, comme un contournement du processus démocratique. « Si cette information devait être confirmée, la politique énergétique de la France vivrait un moment très grave », alertait jeudi Jules Nyssen, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). « Le moratoire imposé par François Fillon en 2010 sur le solaire avait détruit plus de 20 000 emplois. Celui-ci pourrait en détruire bien plus. » Pour le Réseau action climat, il s’agirait d’une « manœuvre cynique », alignée sur les thèses du Rassemblement national. L’ONG estime qu’un tel recul sur les renouvelables compromettrait la sortie des énergies fossiles, qui pèsent chaque année plus de 60 milliards d’euros sur la balance commerciale de la France, tout en affaiblissant les filières industrielles nationales, engagées dans une compétition féroce face à la Chine et aux États-Unis. « Les investissements énergétiques s’inscrivent dans une logique de temps long. La publication rapide de la PPE est une nécessité absolue » rappelle dans un communiqué Enerplan. L’organisation rappelle que deux projets de gigafactories de panneaux solaires, Carbon et Holosolis, représentant 5 000 emplois directs à horizon 2030, sont en cours de montage.

Biométhane : Waga Energy s’allie à Enagás Renovable et Bioreciclaje pour un projet d’envergure en Andalousie

Un consortium public-privé composé de Bioreciclaje de Cádiz – réunissant Valoriza, GS Inima et le consortium pour la gestion des déchets urbains de la province de Cadix – et Enagás Renovable, s’associe au français Waga Energy pour développer une unité de production de biométhane sur le site de stockage de Medina-Sidonia, en Andalousie. La future installation, opérationnelle en 2027, permettra d’injecter jusqu’à 80 GWh de gaz renouvelable par an dans le réseau, l’équivalent de la consommation annuelle de 16 000 foyers. Dotée de la technologie Wagabox de Waga Energy, cette unité contribuera à éviter l’émission de 21 000 tonnes de CO₂ équivalent chaque année. Ce projet s’inscrit dans une logique d’économie circulaire et marque une nouvelle étape pour la valorisation énergétique des déchets du complexe environnemental de Miramundo, qui traite près de 340 000 tonnes de déchets par an dans la province. Il s’agit du deuxième projet mené en Espagne par Waga Energy, après celui de Can Mata, près de Barcelone.

À Créteil, l’hydrogène renouvelable prend racine dans les déchets : une première en France

Le Syndicat mixte de traitement des déchets urbains du Val-de-Marne (SMITDUVM) et ses partenaires ont inauguré le 23 septembre une station inédite de production et de distribution d’hydrogène renouvelable directement raccordée à une unité de valorisation énergétique (UVE). Portée par la société H2 Créteil, qui réunit Suez, SIP EnR, filiale du Sipperec et la Banque des Territoires, c’est une première en France, et peut-être un modèle à suivre. Alimentée exclusivement par l’électricité produite à partir des déchets ménagers de 19 communes, l’installation permettra dès octobre 2025 de produire une tonne d’hydrogène par jour, avec un potentiel de montée à 2 tonnes. L’UVE de Créteil, exploitée par Suez, valorise chaque année plus de 320 000 tonnes de déchets et produit environ 140 GWh d’électricité ainsi que 130 GWh de chaleur, alimentant notamment le réseau de chauffage urbain de Créteil et de Maisons-Alfort. Grâce à cette nouvelle brique industrielle, elle élargit son rôle de pilier de la transition énergétique locale, en fournissant désormais une énergie zéro carbone destinée à la mobilité propre. « La création de cette station marque une étape majeure dans notre stratégie de valorisation énergétique. Ce projet démontre que le développement durable, loin d’être une contrainte, est un levier puissant pour innover, créer de l’emploi et renforcer la souveraineté énergétique », déclare Axel Urgin, président du SMITDUVM. Concrètement, la station permettra d’alimenter en hydrogène vert la ligne 103 des bus RATP, des bennes à ordures de Grand Paris sud-est avenir, ainsi que des véhicules particuliers. Soutenu financièrement par l’Ademe, la région Île-de-France, la Banque des Territoires et l’Union européenne via le programme CEF Transport, le projet s’inscrit dans la stratégie nationale de l’hydrogène, qui prévoit 9 milliards d’euros d’investissements d’ici 2030 pour faire émerger une filière compétitive.

Hydrogène : l’Alliance H2med accélère en Europe et s’élargit à 49 membres

Réunie ce 24 septembre à Berlin, l’Alliance H2med a marqué une étape décisive dans la structuration du corridor européen de l’hydrogène, en annonçant l’adhésion de 40 nouveaux membres issus de l’ensemble de la chaîne de valeur, portant à 49 le nombre total de partenaires industriels et technologiques. Fondée en décembre 2024 par les gestionnaires d’infrastructures REN, Enagás, Teréga, Natran et OGE, l’Alliance s’impose comme le noyau opérationnel du plus avancé des projets européens d’interconnexion hydrogène. Soutenue par la Commission européenne et les États membres concernés, dont la France, l’Espagne, le Portugal et l’Allemagne, l’initiative bénéficie d’un appui politique renforcé, à l’image de la présence à Berlin de hauts représentants gouvernementaux et de la Commission. « H2med est une infrastructure stratégique pour l’autonomie énergétique européenne et un vecteur majeur de réindustrialisation bas carbone », a déclaré Laurent Kueny, directeur de l’énergie au ministère français de l’Économie et de la souveraineté industrielle. Les projets BarMar et CelZa, qui relieront les réseaux nationaux portugais, espagnol et français, figurent parmi les corridors prioritaires du mécanisme européen pour l’interconnexion en Europe (MIE) et bénéficient d’un financement européen. L’Alliance prévoit désormais de structurer plusieurs groupes de travail thématiques, afin d’assurer la synchronisation des calendriers industriels et la montée en puissance du marché de l’hydrogène à l’échelle continentale.

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