Quatre infos à retenir cette semaine

En Bref...
14/09/2025
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Cette semaine, l’actualité énergétique et climatique européenne et mondiale met en lumière la montée en puissance des technologies propres et les défis financiers de la transition. En France, les petits réacteurs modulaires (SMR) et avancés (AMR) pourraient devenir des solutions concrètes de décarbonation industrielle et urbaine, à condition d’un soutien public massif et d’une harmonisation européenne. Pendant ce temps, la Chine confirme son rôle moteur dans la transition énergétique, avec 625 milliards de dollars investis en 2024 dans le solaire, l’éolien et le stockage. En France, les financements pour l’adaptation climatique inquiètent l’I4CE, alors que les besoins liés au réchauffement atteignant + 4 °C à la fin du siècle restent sous-dotés. Enfin, la Banque européenne d’investissement mobilise 17,5 milliards d’euros pour aider plus de 350 000 PME à réduire leur consommation énergétique et accélérer leur transition carbone.

Par la rédaction, avec AFP

SMR et AMR : la France face au défi des petits réacteurs nucléaires

Face à la montée des besoins mondiaux en chaleur et électricité décarbonée, les petits réacteurs modulaires (SMR) et avancés (AMR) apparaissent comme une solution complémentaire, en particulier pour les usages où les énergies renouvelables ou le nucléaire de grande puissance atteignent leurs limites. Selon le rapport de prospective de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) publié et présenté ce 9 septembre, seuls les SMR, technologiquement matures, pourraient être déployés commercialement dans la décennie 2030, tandis que les AMR, prometteurs mais plus complexes, visent un horizon 2040-2050. » C’est un pari technologique, comme l’a été en 1950 le grand nucléaire, souligne François Lévêque, professeur d’économie à Mines Paris-PSL, co-président du groupe de travail, avec son degré d’incertitude et d’obstacles mais c’est le propre de la recherche et de l’innovation », insistant sur la nécessité d’investir « sans regret sur ces technologies. »  Le rapport souligne l’importance d’effets de série européens pour rendre ces technologies compétitives. « L’échelle minimale pour amortir les coûts fixes élevés des SMR-AMR est l’Europe, pas la France seule , note le document, qui insiste sur la nécessité d’une harmonisation des normes de sûreté et de sécurité à l’échelle européenne. Les SMR sont particulièrement adaptés à la production de chaleur industrielle inférieure à 300 °C et aux réseaux urbains décentralisés, tandis que les AMR pourraient fournir de la chaleur à plus haute température et recycler davantage de matières. Le groupe de travail appelle à « un soutien public massif, national ou européen » pour financer les prototypes et sécuriser l’accès aux combustibles stratégiques. Il recommande également d’anticiper les besoins en compétences de la filière et de planifier le traitement des déchets nucléaires. Le rapport insiste enfin sur l’importance d’identifier tôt les sites potentiels afin de faciliter l’acceptabilité des projets et de sécuriser leur financement. Si l’Europe peut encore rattraper son retard face à la Chine, la Russie et les États-Unis, cela « nécessite une action coordonnée et rapide pour que SMR et AMR deviennent des solutions concrètes de décarbonation ».

La Chine a dépensé 625 milliards de dollars en 2024 dans la transition énergétique

« La transition énergétique chinoise n’est plus une perspective : elle est en marche et redéfinit l’économie mondiale de l’énergie, en réduisant la dépendance aux combustibles fossiles tout en faisant baisser les coûts des technologies propres à l’échelle planétaire » estime le cabinet Ember dans un rapport publié le 9 septembre. En 2024, la production électrique éolienne et solaire a bondi de 25 % par rapport à l’année précédente. Sur les six premiers mois de 2025, elle était 27  % supérieure à 2024, suffisant pour réduire de 2 % la production issue des énergies fossiles. Les 2 073 TWh générés par le vent et le solaire sur 12 mois dépassent désormais toutes les autres sources d’électricité propre réunies, contre seulement la moitié il y a quatre ans. Cette transformation est portée par un investissement sans précédent. La Chine a dépensé 625 milliards de dollars en 2024, soit près d’un tiers des investissements mondiaux. Les capacités de stockage par batteries ont triplé en trois ans, tandis que les investissements dans les réseaux électriques ont atteint 608 milliards de RMB, un record historique. La transition ne se limite pas à la production d’électricité. « L’électricité est désormais la principale source d’énergie dans l’industrie et les bâtiments, et progresse rapidement dans le transport », souligne le rapport. La part de l’électricité dans la consommation finale a atteint 32 % en 2023, dépassant celle de nombreux pays matures. Outre l’économie et l’innovation, la stratégie chinoise répond à une ambition politique : établir une « civilisation écologique » capable de concilier objectifs économiques, sociaux et environnementaux, inscrite dans la constitution depuis 2018. L’investissement massif dans les technologies propres a contribué pour 13,6 billions de RMB (1,9 trillion de dollars) au PIB national en 2024, et la Chine détient désormais 75 % des brevets mondiaux dans ce domaine, contre 5 % en 2000. À l’international, cette dynamique engendre des réductions de coûts importantes dans le solaire, l’éolien, les batteries et les véhicules électriques, favorisant l’adoption rapide de ces technologies, y compris dans les marchés émergents qui commencent à surpasser les pays de l’OCDE.

Budget : inquiétude pour les dépenses d’adaptation climatique

Les dépenses publiques pour l’indispensable adaptation de la France au changement climatique semblent menacées par une politique budgétaire très contrainte, affirme le 12 septembre l’Institut de l’économie pour le climat (I4CE). Cet institut indépendant de recherche, financé lui-même pour plus de moitié par des fonds publics, s’est intéressé aux moyens alloués pour cette adaptation : à la fois la « réduction des vulnérabilités« , la « gestion des crises » et la « prise en charge des dommages » en lien avec le changement climatique. « La période 2020-2024 a effectivement été celle d’une réelle prise en charge du sujet (…). L’adaptation a – comme la planification écologique plus largement – bénéficié des politiques de relance post-Covid« , se félicite l’I4CE. Le gouvernement a présenté en mars son troisième plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc3), destiné à préparer les transports, les infrastructures énergétiques ou l’agriculture à un réchauffement en France de 4 °C d’ici la fin du siècle. Mais l’I4CE reprend à son compte l’estimation du Haut Conseil pour le climat, selon lequel « les financements connus à ce stade pour le Pnacc3 sont insuffisants comparés aux estimations de besoins« . « La période plus récente – marquée par la contrainte budgétaire – fait peser d’importantes incertitudes sur la suite de la dynamique« , d’après les auteurs du rapport « Adapter la France à + 4 °C : moyens, besoins, financements ». Et si « certaines avancées semblent bien acquises, d’autres en revanche pourraient être remises en cause« , avancent-ils. Le fonds vert (qui soutient les collectivités locales) a vu ses ressources baisser en 2025. Et l’I4CE s’inquiète de « la fin d’un cycle de politiques d’aides à l’investissement sans que les relais ne soient prévus » et de la baisse de certaines dépenses, avec « une réduction nette des crédits pourtant initialement prévus » voire « des annulations de crédits« . « Les premières discussions engagées dans le cadre de la préparation du budget 2026 ne laissent pas entrevoir d’amélioration à court terme« , ajoute-t-il. Les auteurs chiffrent à 1,7 milliard d’euros en 2025 les dépenses publiques consacrées à l’adaptation climatique. Plus de la moitié de la somme (939 millions d’euros) correspond aux programmes des agences de l’eau pour économiser cette ressource.

L’EIB mobilise 17,5 milliards d’euros pour booster l’efficacité énergétique des PME européennes

Plus de 350 000 petites et moyennes entreprises (PME) européennes bénéficieront d’un soutien renforcé à l’efficacité énergétique grâce à une nouvelle initiative de financement de 17,5 milliards d’euros lancée par le groupe Banque européenne d’investissement (BEI), avec l’appui de la Commission européenne. L’enveloppe, qui couvrira la période 2025-2027, vise à mobiliser plus de 65 milliards d’euros d’investissements privés et publics, doublant presque l’effort actuel. L’objectif est clair : réduire la facture énergétique des entreprises, renforcer leur compétitivité et accélérer leur transition vers la neutralité carbone. Pour faciliter l’accès des PME, un guichet unique sera créé et un modèle innovant de “servicisation” – l’efficacité énergétique comme service – sera déployé en partenariat avec la fondation Solar Impulse. Cette approche, qui supprime les coûts initiaux d’investissement, doit permettre une adoption plus rapide de solutions durables. “C’est un pas décisif pour soutenir la compétitivité de l’Europe”, a souligné Nadia Calviño, présidente de la BEI lors de l’annonce le 11 septembre.

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