« Les ELD assurent un service de proximité au service de la transition énergétique des territoires »

Publié le 18/10/2023

7 min

Publié le 18/10/2023

Temps de lecture : 7 min 7 min

Enjeu majeur des prochaines années, la transition énergétique et écologique se passera au cœur de nos territoires. Le Syndicat professionnel des entreprises gazières non nationalisées (SPEGNN) représente l’ensemble des entreprises locales de distribution de gaz. Acteur engagé dans la transition énergétique des territoires, Stéphane Andrieu, délégué général du syndicat, explique à Gaz d’aujourd’hui les grands axes de travail du SPEGNN devenu ce 18 octobre Gaz et territoires. Ancrage local, intégration des gaz renouvelables, nouveau contrat de concession, baisse des consommations et péréquation tarifaire, les sujets abordés sont nombreux.

Propos recueillis par Laura Icart

 

Le SPEGNN, créé il y a 75 ans, change d’identité pour devenir Gaz et territoires : un nom plus en adéquation avec l’ADN de l’association ?  

Gaz et territoires regroupe les 31 entreprises locales de distribution de gaz en France, certaines en activité depuis 150 ans. Nous représentons des acteurs locaux, appartenant à la sphère publique ou coopérative, réalisant des missions de service public et d’intérêt général au service des territoires où nous sommes installés – environ 5 % du territoire national. Les entreprises locales de distribution (ELD) ont accompagné les évolutions du secteur gazier depuis sa nationalisation, du gaz de houille aux gaz renouvelables. Il était important pour le syndicat d’avoir une identité qui reflète aujourd’hui le cœur de notre action : l’accélération de la transition énergétique via le développement des gaz renouvelables et notre ancrage local au plus proche des réalités du terrain.

Les entreprises locales de distribution de gaz accompagnent les usagers dans chaque territoire. Quelle est leur valeur ajoutée à l’heure de la planification écologique?

De même que le gestionnaire de réseau de distribution national [GRDF, NDLR], les ELD répondent en premier lieu à une mission de service public et d’intérêt général dans leurs différentes activités de gestionnaires de réseaux, de fournisseurs ou de producteurs de gaz renouvelables. Leurs spécificités, c’est un modèle évolutif et collaboratif répondant à la typologie du territoire d’implantation et aux besoins des populations locales. Notre volonté c’est la proximité avec les acteurs économiques, les élus et nos clients. Les ELD sont des employeurs locaux. Elles sont aussi créatrices de liens et vectrices d’acceptabilité sociale par la relation de confiance qu’elles nouent avec les acteurs locaux. Nous développons des modèles en circuit court, avec une vision multi-énergies dans laquelle les gaz renouvelables occupent une place de plus en plus importante. La planification écologique [présentée le 17 septembre par le président de la République, NDLR] qui sera déclinée à un échelon territorial vient renforcer cette dynamique d’avoir des objectifs et des potentiels locaux. En effet, les potentiels ne sont pas les mêmes selon les territoires et c’est important de le comprendre pour mener une politique de transition en adéquation avec le gisement, les besoins, et répondre aux objectifs de décarbonation de la France.

Justement, cette évolution, cette modernisation, s’illustrent aussi par un nouveau modèle de contrat de concession plus représentatif des ambitions affichées ?

Le contrat de concession est un contrat qui permet à nos adhérents par délégation de service public de gérer et exploiter le réseau de gaz, propriété des autorités concédantes avec un double enjeu en ce qui nous concerne puisque les collectivités sont aussi les principales actionnaires des ELD. Le précédent modèle de contrat datait de 2012. C’est un contrat « gagnant-gagnant » intégrant une véritable vision pluriannuelle pour les investissements et une plus grande subsidiarité dans sa mise en œuvre. Nous avons travaillé pendant deux ans avec  la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) sur ce nouveau modèle qui permet de d’intégrer une relation contractuelle modernisée et ambitieuse en incorporant non seulement les nouvelles réglementations mais aussi la dynamique autour des gaz renouvelables, et une série d’indicateurs de suivi et de performances pour toujours assurer une même qualité de service de haut niveau dans les zones couvertes par les ELD. Une des nouveautés de ce contrat figure au niveau de la gouvernance des investissements avec la mise en place d’un schéma directeur des investissements gaz applicable pendant la durée de la concession, décliné en programmes pluriannuels de cinq ans et assorti d’indicateurs de suivi. C’est tout sauf anodin puisqu’il s’agit de se doter d’une véritable vision de court, moyen et long terme en matière d’investissement pour accompagner la transition énergétique afin d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Ce nouveau modèle fixe aussi un cadre contractuel souple, permettant des adaptations locales du service public de distribution du gaz au regard des objectifs de chaque autorité concédante. Cette souplesse est d’autant plus justifiée que les ELD, opérateurs publics détenus majoritairement par les collectivités territoriales, entretiennent des liens étroits avec ces dernières et, par leur ancrage local, participent activement à la vie économique des territoires où elles sont implantées.

Les groupes de travail organisés dans le cadre de l’élaboration de la loi de programmation quinquennale sur l’énergie et le climat (LPEC) ont proposé d’instaurer une péréquation du tarif de la distribution pour éviter des phénomènes d’emballements tarifaires. En quoi est-ce une évolution majeure ?

La péréquation fait effectivement partie des propositions officielles du groupe de travail de la LPEC. Pour nous c’est effectivement un dispositif majeur dans le contexte de la transition, qui ne nécessite pas qui plus est de recourir aux finances publiques locales ou nationales. La transition écologique et énergétique a pour conséquence une baisse parfois significative et rapide des consommations locales de gaz [développement d’un réseau de chaleur, substitution du gaz par une autre énergie pour un client industriel, NDLR] qui se traduit par des baisses importantes des volumes de gaz acheminés sur les réseaux publics de distribution à une maille locale. Nous les constatons déjà à de multiples endroits du territoire. Si les tarifs d’utilisation de ces réseaux, acquittés par les consommateurs, faisaient jusqu’ici l’objet d’une relative homogénéité entre les différents gestionnaires en France, ces nouvelles dynamiques locales conduisent, en présence de coûts fixes et en raison de ces baisses de consommation de gaz, à une évolution à la hausse parfois sensible de ces tarifs au niveau local. En fonction de la typologie des territoires et leur profil énergétique, la soutenabilité tarifaire n’est pas assurée de la même manière selon les ELD, aussi cette situation peut créer un risque avéré d’emballements tarifaires au niveau local par rapport au tarif de l’opérateur national GRDF. Cette péréquation nationale permettrait davantage d’équité pour tous les acteurs de la distribution de gaz sur l’ensemble du territoire. Elle va également permettre à l’ensemble des gestionnaires de réseaux publics de gaz exploitant des concessions historiques d’appliquer la réfaction tarifaire pour le biométhane, facilitant ainsi l’émergence des projets de gaz renouvelables. Enfin, elle facilitera également l’activité des fournisseurs de gaz sur les territoires des distributeurs locaux en prévoyant un unique tarif de la distribution de gaz. Cela permettra de faire émerger une diversité d’offres de fourniture sur tout le territoire.