« La place du gaz dans la transition énergétique n’a pas été suffisamment mise en avant »

Publié le 20/07/2018

7 min

Publié le 20/07/2018

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  Julien Aubert, député de la 5e circonscription du Vaucluse et conseiller régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur est l'invité du grand entretien de Gaz d'aujourd'hui. Il revient sur la programmation pluriannuelle de l'énergie et sur ses activités de parlementaire liées aux sujets énergétiques. Propos recueillis par la rédaction de Gaz d'aujourd'hui   Vous avez été vice-président de la commission spéciale pour l'examen du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte. Trois ans après sa promulgation, quel bilan faites-vous ? Tout d’abord un regret. Puisque l’objectif concernant le nucléaire nous semblait tout à fait irréalisable, il avait néanmoins été fixé dans la loi. Nicolas Hulot est revenu sur cette loi sans en faire passer une nouvelle : c’est donc un échec pour le législateur que nous sommes. Ensuite, en matière de gaz, je crois que la place du gaz dans la transition énergétique n’a pas été suffisamment mise en avant et que nous manquons d’une réflexion propre en se concentrant beaucoup trop sur l’électricité. Le débat public autour de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) est désormais clos. Quel visage aura la PPE selon vous ? J’espère qu’elle ne sera pas uniquement concentrée sur les enjeux électriques mais qu’il s’agira bien d’une programmation de l’énergie. Cela signifierait aborder des cas très pratiques : quelle rémunération pour le couplage carbone-gaz (voire même charbon) des énergies vertes intermittentes ? Quelle stratégie d’investissement pour les filières émergentes, notamment l’hydrogène, le biogaz ou gaz vert ? Ces questions méritent d’être posées si l’on veut que la programmation pluriannuelle de l’énergie soit utile. La mobilisation des acteurs énergétiques, notamment au travers des cahiers d’acteurs, vous a-t-elle parue intéressante ? Tout à fait. Je regrette néanmoins que le débat se situe en dehors du Parlement. Le gouvernement est seul maître du débat et choisit, sans consultation du Parlement, les contributions d’acteurs qui lui paraissent opportunes. J’espère toutefois que ces cahiers d’acteurs seront bien pris en charge. Quels sont les sujets relatifs au gaz qui ont dominé les débats et qui doivent faire l’objet d’une attention particulière dans la PPE ? Comme je vous l’ai dit, ces cahiers d’acteurs ne sont pour l’instant pas adressés au législateur. Donc nous serons en terminaison de ce débat. Je renouvelle mon souhait qu’en matière de gaz, on développe une réflexion propre aussi bien en matière d’alimentation que sur les infrastructures, puisqu’on ne peut développer non plus massivement des infrastructures concurrentes à l’électrique. Je pense qu’on gagnerait à définir plus clairement quel type d’énergie nous voulons pour quel type d’usage. « Prendre en compte des spécificités des territoires dans l’élaboration de la politique énergétique me semble tout à fait conciliable avec la nécessité de mettre en place une stratégie énergétique au plan national. » Le débat public sur la PPE rappelle la nécessité de tenir compte des spécificités des territoires dans l’élaboration de la politique énergétique. Pensez-vous que les territoires sont la clé pour réussir notre transition énergétique ? C’est souvent mis en avant, mais je crois que nous avons d’abord besoin d’une stratégie nationale qui soit déclinée territorialement avec des contrats d’objectifs et de moyens de manière à ce que ce foisonnement ne se traduise pas par des déséquilibres sous-optimaux. Prendre en compte des spécificités des territoires dans l’élaboration de la politique énergétique me semble tout à fait conciliable avec la nécessité de mettre en place une stratégie énergétique au plan national. « La production de gaz verts est un moyen de mener une politique d’aménagement du territoire avec la création d’emplois à la clé. » L’enjeu autour de la production de biométhane alliant le monde énergétique et agricole a été régulièrement abordé lors de débats publics. Les gaz verts apportent-ils un nouveau dynamisme au cœur de territoires ? En effet, la production de gaz verts est un moyen de mener une politique d’aménagement du territoire avec la création d’emplois à la clé. C’est particulièrement vrai notamment pour la valorisation des déchets agricoles. Encore faut-il qu’on y mette la même énergie que pour d’autres types de production. Vous êtes, depuis le 6 février, président du groupe d’études « enjeux économiques de la filière industrielle énergétique ». Quelles sont les missions et les enjeux de ce groupe ? Ce groupe est l’occasion pour moi de confronter les points de vue des principaux acteurs industriels de la filière énergétique sous le format d’une table ronde thématique mensuelle. Depuis la création du groupe d’études, nous avons organisé une table ronde sur l’avenir de l’éolien, sur les métaux rares dans les filières énergétiques ou encore plus récemment une série de trois tables rondes consacrées aux compteurs communicants dits « Linky ». Les réunions de l’automne prochain seront consacrées au débat sur la programmation pluriannuelle de l’énergie.   « Le gaz est une énergie utile dans la transition énergétique parce qu’elle doit progressivement évincer des énergies comme le pétrole ou le charbon, beaucoup plus émettrices de gaz à effet de serre. »   Quels sont, selon vous, les secteurs prioritaires pour mettre notre pays sur la voie d’une trajectoire de neutralité carbone à l’horizon 2050 ? Bien que ce ne soit pas du gaz, je crois que la meilleure manière de décarboner l’environnement c’est le nucléaire. Ensuite, le gaz est une énergie utile dans la transition énergétique parce qu’elle doit progressivement évincer des énergies comme le pétrole ou le charbon qui sont beaucoup plus émettrices de gaz à effet de serre.   Le médiateur national de l’énergie déclarait en mai dernier que la connaissance des Français en matière énergétique était moyenne. Avez-vous le même ressenti ? Les Français voient l’énergie par le pouvoir d’achat, par le coût. L’inconvénient des politiques énergétiques qui sont menées aujourd’hui, c’est qu’elles sont souvent extrabudgétaires, ou elles passent par des cadeaux qui visent à prélever quelques centimes d’euros sur la facture de transport de carburant. Ce qui fait que les Français ne savent pas combien ils payent. En outre, les objectifs de ces politiques sont parfois flous ou contradictoires : par exemple, le bilan carbone n’est pas le même objectif que la maîtrise d’énergie qui n’est pas non plus le même objectif que l’accès social à l’énergie ! Donc nous devons mettre de l’ordre et c’est en tant que rapporteur spécial pour la commission des finances sur le budget de l’énergie que je compte bien y voir un peu plus clair. J’ai commencé d’ailleurs cette année avec les certificats d’économie d’énergie (CEE).    

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