Le haut-commissaire à l’énergie atomique critique la stratégie énergétique de la France, selon Les Échos

En France, la part des fossiles doit passer dans la consommation finale de 60 % en 2022 à 42 % en 2030, selon la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) et de la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) et de 30 % en 2035. ©Shutterstock

Publié le 03/03/2025

4 min

Publié le 03/03/2025

Temps de lecture : 4 min 4 min

Le haut-commissaire à l’énergie atomique juge sévèrement la stratégie énergétique de la France pour 2035, dans un avis destiné à Matignon, et estime que l’objectif de réduction des émissions de CO₂ pour 2030 est « trop ambitieux« , rapporte le 3 mars le quotidien Les Échos.

Par la rédaction, avec AFP

 

« La stratégie volontariste de l’offre fait peser un risque de surproduction [d’électricité] si les possibilités d’exportation ne sont pas au rendez-vous » craint Vincent Berger, haut-commissaire à l’énergie atomique, pour qui une surcapacité de production électrique serait « très pénalisante pour le consommateur ou pour le contribuable », selon le document consulté par Les Échos. Car à l’horizon 2035, la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit une production d’électricité de 692 TWh. Or ces dernières années, la demande d’électricité reste inférieure à la moyenne des années pré-Covid 2014-2019 : en 2024, malgré une hausse par rapport à 2023, elle était encore 12,7 % plus basse qu’avant la pandémie.

Objectif : 692 TWh d’électricité produite à horizon 2035

Cette potentielle surcapacité de production électrique rendrait les investissements massifs difficiles à rentabiliser. Raison pour laquelle le haut-commissaire à l’énergie atomique prône une « revue à la baisse de la croissance du photovoltaïque » dans la PPE. Contacté par l’AFP, le cabinet du ministre chargé de l’Industrie et de l’énergie n’avait pas réagi dans l’immédiat. L’entourage du Premier ministre, dont dépend le Haut-Commissariat à l’énergie atomique, a indiqué qu’il ne « confirmait pas ces Informations ». Selon cette source, « ces sujets ne relèvent pas du champ de compétences du HCEA mais de celui de RTE [le gestionnaire du réseau de transport électrique, NDLR], dont les travaux (…) très fouillés et avec une large concertation, ont alimenté les travaux du gouvernement sur la PPE ». Toujours selon Les Échos, Vincent Berger s’étonne aussi dans l’avis que la stratégie énergétique de la France pour 2025-2035 ait été « construite sur la base d’une directive européenne dont la réalité montre qu’elle ne pourra malheureusement pas être suivie des faits ».  Le haut-commissaire désigne là l’engagement de tous les États membres de l’Union européenne à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 55 % en 2030 par rapport à 1990. Un objectif jugé « trop ambitieux » et qui « ne sera pas atteint« , selon Vincent Berger. En 2023, à sept ans de l’échéance, la France n’avait fait qu’un peu plus de la moitié du chemin : par rapport à 1990, ses émissions se se sont réduites que de 31 %, selon le ministère de la Transition écologique.

Tous les leviers ne « sont pas mobilisés » selon le HCC

Fin janvier, le Haut Conseil pour le climat (HCC) avait également alerté le gouvernement sur les points à muscler dans la mise en œuvre de sa feuille de route énergétique, mettant en garde l’exécutif sur des « leviers d’action indispensables qui ne semblent pas encore pleinement mobilisés« . Six conditions de réussite de la PPE 3 étaient évoquées par le HCC. Qu’il s’agisse de bouclages physiques (énergie, électricité, biomasse) et de la sortie des énergies fossiles, de l’accélération du développement d’une mobilité propre, d’une meilleure résilience du secteur énergétique aux aléas climatiques et géopolitiques, d’une transition qui soit accessible à tous, d’investissements et de signaux prix incitatifs ou d’un renforcement de la gouvernance, le HCC multiplie les recommandations et les mises en garde au gouvernement. Les trajectoires détaillées de sortie des énergies fossiles « doivent être précisées en mobilisant l’ensemble des gisements de réduction d’émissions, y compris la sobriété ». Le HCC attend du gouvernement qu’il précise notamment les bouclages physiques (énergie, électricité, biomasse) via des trajectoires détaillées, « qui indiquent les incertitudes et qui tiennent mieux compte des leviers d’autres politiques sur les dynamiques de consommation énergétique ».