Le biogaz carburant intégré dans la Tiruert

En France plus de 35 000 véhicules roulent au GNV/bioGNV dont 60% sont des des véhicules lourds.

Publié le 19/10/2023

5 min

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L’amendement porté par le député Renaissance du Rhône et président du Conseil supérieur de l’énergie Jean-Luc Fugit, déposé au nom de la commission développement durable et de l’aménagement du territoire, visant à inclure le biométhane dans le mécanisme de la taxe incitative relative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports (Tiruert) a été retenu par le gouvernement alors que celui-ci a eu recours ce 18 octobre à l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter la première partie du projet de loi de finances (PLF) pour l’année 2024.

Par Laura Icart

 

Au pays des acronymes, la Tiruert n’est pas la plus connue. Pourtant la taxe incitative à l’utilisation d’énergie renouvelable dans les transports constitue un véritable levier malgré son caractère incitatif pour maximiser la contribution des différentes filières pour accélérer la décarbonation des transports. Réclamée depuis longtemps par la filière du bioGNV, l’intégration du biométhane a été bel et bien adoptée par le gouvernement. Pour le député Jean-Luc Fugit qui a porté cet amendement ayant reçu un avis favorable de la commission du développement durable, mais négatif de la Commission des finances, « cet amendement répond à une attente légitime » de la filière du bioGNV et « permet de mettre l’ensemble des filières qui agissent pour la décarbonation des transports sur un pied d’égalité ».

La Tiruert, késako ?

Introduite en 2022, cette taxe s’avère stratégique pour l’État français. Elle est la traduction d’objectifs européens de décarbonation du transport particulièrement ambitieux, visant à la fois l’incorporation en volume de carburants verts et la réduction de l’intensité carbone des carburants mis à la consommation. La Tiruert concerne les pétroliers et les distributeurs de carburants routiers et aériens. L’atteinte des objectifs en volume peut être réalisée « physiquement » (par incorporation effective de biocarburants – biodiesel, bioessence) ou s’effectuer par l’achat de certificats d’énergies renouvelables (aux opérateurs de bornes de stations électriques, par exemple). L’objectif d’incorporation a été fixé à 9 % pour l’année 2024. Concrètement, comment cela fonctionne ? Si l’objectif n’est pas rempli par les acteurs concernés, ceux-ci doivent s’acquitter d’une pénalité (un montant de 1,4 euro par litre a été fixé pour 2024). Dans les faits, aucune pénalité n’est appliquée, les distributeurs atteignant leurs objectifs. Jusqu’à présent la France comptait principalement sur les biocarburants conventionnels (essentiellement du colza pour le gazole) pour remplir cet objectif, mais la part des biocarburants de première génération est plafonnée en Europe à 7 %. Pour atteindre les objectifs de 9 %, les distributeurs vont devoir se tourner vers l’achat de certificats d’électricité ou d’hydrogène renouvelables, mais les volumes représentés par ces énergies ne seront pas suffisants pour atteindre des objectifs allant croissant jusqu’en 2030. Et ce d’autant, comme le prévoit la directive européenne sur les énergies renouvelles 3 (RED III), les Etats devront atteindre des objectifs de décarbonation du transport mesurés, non plus seulement en volume, mais en intensité carbone (baisse d’émissions de gaz à effet de serre). « C’est tout  l’intérêt d’inclure de nouvelles énergies renouvelables, reconnues pour leur efficacité en matière de réduction de GES, comme le biométhane » précise  Max-Erwann Gastineau, directeur affaires publiques et territoires à France gaz.

Pourquoi cette reconnaissance est importante ?

L’intégration du bioGNV dans le mécanisme de fiscalité carburant Tiruert en 2024 enverrait « un signe important pour la filière car elle va participer au développement d’une solution de décarbonation du transport reconnue » souligne Max-Erwann Gastineau.  « La filière mobilité gaz a souffert de la hausse de prix du gaz en 2022 et d’un manque de compétitivité face au prix du gazole, elle a besoin d’un dispositif qui vienne soutenir sa compétitivité et massifier son développement » ajoute-t-il. L’amendement anticipe RED 3 et complète la Tiruert en prévoyant des objectifs mesurant l’intensité d’émissions de gaz à effet de serre dans les transportsConcrètement, cela signifie que le bioGNV participera à une évolution du système actuel pour le réorienter vers des carburants certes renouvelables, mais aussi moins carbonés.

Ce nouveau système, qui coexistera avec l’actuel (offrant des objectifs d’inspiration physique ou au moyens de certificats pour le transport), entrera en application au 1er janvier 2025. « Le tarif de la taxe est défini pour chaque année. Il est, pour l’année 2025, de 100 euros par tonne » précise l’amendement. « Le pourcentage national cible de réduction de l’intensité d’émission de gaz à effet de serre dans les transports est de 5 % en 2025 » est-il encore précisé. Pour l’association représentante de la mobilité gaz (France mobilité biogaz), l’intégration du bioGNV à la Tiruert est « une très bonne nouvelle qui va permettre de décorréler le prix de bioGNV du prix du gaz fossile » et une « reconnaissance par l’État de l’intérêt de la filière pour accompagner la décarbonation du transport lourd », nous confie Régis Gaignault, secrétaire général de FMB. C’est aussi un levier supplémentaire pour doper la production de biométhane. « La Tiruert va permettre à la fois de bien rémunérer la production de biométhane, avec des contrats de type BPA (biomethane purchase agreement) et d’offrir aux clients du bioGNV un prix maîtrisé et compétitif par rapport au gazole » précise-t-il.