Inflation, énergie, climat : la rentrée chargée de l’exécutif

Sur la planification écologique, "le gouvernement présentera des paquets de mesures dès l'automne" a souligné Le porte-parole du gouvernement Olivier Véran à l'issue du Conseil des ministres.

Publié le 24/08/2022

8 min

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Le président de la République a appelé mercredi le gouvernement à « l’unité » face à « la grande bascule » qui marque la rentrée avec « la fin de l’abondance », « des évidences » et « de l’insouciance« . « C’est une grande bascule que nous vivons », a averti le chef de l’État, revenant sur la récente « série de crises graves« , de l’Ukraine à la sécheresse, en préambule du conseil des ministres de rentrée à l’Élysée. Emmanuel Macron prépare déjà les Français à une fin d’année difficile marquée par une inflation importante, des factures énergétiques qui vont peser de plus en plus lourd dans le budget des ménages malgré les mesures gouvernementales, dans un contexte où les effets du réchauffement climatique sont de plus en plus prégnants dans le quotidien des Français.

Par la rédaction, avec AFP

 

« Le moment que nous vivons peut sembler être structuré par une série de crises graves (…) et il se pourrait que d’aucuns voient notre destin comme étant perpétuellement de gérer les crises ou des urgences. Je crois pour ma part que ce que nous sommes en train de vivre est plutôt de l’ordre d’une grande bascule ou d’un grand bouleversement », a déclaré Emmanuel Macron lors d’une allocution devant les ministres, exceptionnellement retransmise. Alors que, face à cette situation, « nos compatriotes peuvent réagir avec beaucoup d’anxiété », il a appelé les membres du gouvernement à « dire les choses« , à « nommer avec beaucoup de clarté et sans catastrophisme ».

Ukraine, inflation, climat, sécurité : la rentrée chargée de l’exécutif

« J’attends du gouvernement le respect de la parole donnée et des engagements que nous avons pris à l’égard de la nation », a-t-il ajouté. « Ce que je souhaite que nous puissions faire dans les prochaines semaines et les prochains mois, c’est de réaffirmer une unité très forte du gouvernement, des forces de la majorité » autour « d’un cap qui nous permettra de consolider notre souveraineté, notre indépendance française et européenne. » Face à « la montée des régimes illibéraux » et « le renforcement des régimes autoritaires », le président a appelé les ministres au « sérieux », à « la crédibilité » et à ne pas céder à la tentation de la « démagogie ». « Il est facile de promettre tout et n’importe quoi, parfois de dire tout et n’importe quoi. Ne cédons pas à ces tentations, c’est celle de la démagogie. Elles fleurissent dans toutes les démocraties aujourd’hui, dans un monde complexe qui fait peur. Ça peut toujours sembler séduisant de dire ce que les gens veulent entendre (…) mais il faut d’abord raisonner en se demandant si c’est efficace et utile« , a-t-il ajouté, sans citer d’exemples concrets.

L’inflation atteint 6,7 % en France

« Nous avons protégé votre pouvoir d’achat comme aucun autre pays » souligne le porte-parole du gouvernement Olivier Véran à l’issue du conseil des ministres ce mercredi 24 août, qui a rappelé les principales mesures prises par l’exécutif depuis le début de la crise pour réduire les effets de l’inflation dans le quotidien des Français. « Hormis Malte, personne ne fait mieux » dans l’Union européenne a assuré Olivier Véran. Selon les chiffres publiés mi-août par Eurostat, l’office statistique de l’Union européenne, le taux d’inflation annuel de l’Union européenne s’est établi à 9,8 % en juillet 2022, contre 9,6 % en juin. Un an auparavant, il était de 2,5 %. Les taux annuels les plus faibles ont été effectivement observés en France et à Malte (6,8 %) et en Finlande (8 %). Un chiffre estimé à 6,7 % pour la France selon l’Insee. Les taux annuels les plus élevés ont quant à eux été enregistrés en Estonie (23,2 %), en Lettonie (21,3 %) et en Lituanie (20,9 %). Par rapport à juin, l’inflation annuelle a baissé dans six États membres, est restée stable dans trois et a augmenté dans dix-huit autres. Et c’est bien l’énergie la principale contributrice à cette inflation galopante. Le porte-parole du gouvernement souligne d’ailleurs que « d’après l’Insee, les mesures gouvernementales ont permis d’agir à la racine », en l’illustrant notamment par le bouclier tarifaire qui a permis selon la Commission de régulation de l’énergie (CRE) d’éviter un doublement de la facture de gaz et en évoquant également la hausse de 4 % de l’allocation de rentrée scolaire.

Sécheresse, canicule et incendies à répétition

« C’est un été d’après le changement climatique, de prise de conscience totale même chez les plus sceptiques » a déclaré Olivier Véran alors que la France et l’Europe connaissent selon les experts l’un des étés les plus chauds et les plus secs depuis plusieurs décennies. Le mois de juin est d’ailleurs devenu le troisième mois de juin le plus chaud jamais enregistré sur Terre. L’Europe dans son ensemble a connu le deuxième mois de juin le plus chaud jamais enregistré, avec environ 1,6 °C de plus que la moyenne. Olivier Véran a indiqué que le gouvernent présenterait des mesures à l’automne pour construire cette planification écologique voulue par le président de la République. « Ne pas faire de cet été la règle », c’est l’ambition de l’exécutif qui prévoit « un grand chantier pour replanter nos forêts qui ont brûlé » et de s’attaquer dès aujourd’hui au problème de l’eau avec de plus en plus de communes sous restriction. Le réchauffement climatique « s’inscrit dans la durée » a conclut Olivier Véran, appelant à une réduction des émissions de CO2 avec « des décisions courageuses » et invitant les Français à « être acteurs de cette transition énergétique ».

La crise énergétique au cœur des préoccupations

Sécuriser les approvisionnements énergétiques et accélérer le développement des énergies renouvelables pour réduire notre dépendance aux fossiles et pour renforcer notre résilience énergétique sont les principaux outils que le gouvernement va mettre en place ces prochaines semaines via un plan et un projet de loi. Si « le bouclier énergétique se poursuit jusqu’à la fin de l’année », a rappelé Olivier Véran, les Français doivent se préparer à un réveil difficile « à terme, à partir du début de l’année prochaine ». Même s’il utilise le conditionnel – « il y aura peut-être des augmentations mises sur la table et discutées » -, Olivier Véran a clairement souligné le fait que la France ne pourra « pas indéfiniment geler les prix » même s’il n’y aura pas d’arrêt brutal du bouclier énergétique. Le dispositif a déjà coûté plus de 21 milliards d’euros à l’État. En France, près de 12 millions de personnes vivent en situation de précarité énergétique. Pour 2023, la Première ministre Élisabeth Borne a dit en juillet que le bouclier tarifaire, qui concerne aujourd’hui également l’électricité, pourrait être remplacé par des aides plus ciblées à destination des Français modestes.

Sans « bouclier », le prix du gaz serait deux fois plus élevé, selon le régulateur

Les consommateurs de gaz naturel en France bénéficiant des tarifs réglementés d’Engie continueront de payer le même prix au 1er septembre que l’an passé, a confirmé mardi la Commission de régulation de l’énergie, selon laquelle, sans la protection de l’État, le gaz serait 105,1 % plus cher qu’au 1er octobre 2021. Au moment de sa création par le gouvernement précédent le 1er octobre 2021, le « bouclier tarifaire » qui a gelé les barèmes applicables pour les tarifs réglementés de vente de gaz (TRV) visait à épargner aux consommateurs français une hausse attendue de 19,5 % des prix du gaz naturel en novembre 2021, et de même niveau en décembre 2021. Le gouvernement s’attendait à ce que les cours du gaz baissent à la fin de l’hiver. Or les prix n’ont cessé de flamber cette année sur les marchés européens, surtout depuis le début de la guerre en Ukraine le 24 février et le tarissement progressif des exportations de gaz russe vers l’Europe. Illustration concrète cet après-midi, le prix du gaz naturel européen dépassait les 300 euros le MWh, un record depuis mars, en hausse de plus de 11 %, poussé depuis plusieurs séances par l’annonce d’une suspension complète de l’approvisionnement en gaz russe via Nord Stream1 pour une période de trois jours. « Le niveau moyen des tarifs réglementés de vente au 1er septembre 2022 aurait été supérieur de 116,5 % hors taxes, soit 105,10 % TTC par rapport au niveau en vigueur fixé au 1er octobre 2021« , précise la CRE dans son communiqué diffusé mardi soir, annonçant que les tarifs resteront « gelés au 1er septembre 2022, à leur niveau du 1er octobre 2021″.

Crédits : A. Taoualit/Shutterstock.