Ce qu’il faut retenir du discours d’Ursula von der Leyen

Publié le 14/09/2022

6 min

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La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a prononcé ce matin son discours sur l’état de l’Union. Si l’exercice éminemment politique est annuel, la crise énergétique, la spirale inflationniste et la guerre en Ukraine ont très largement dominé cette allocution en présence de la Première dame ukrainienne Olena Zelenska.

Par Laura Icart  

 

Le plafonnement des revenus des producteurs d’électricité à base d’énergie renouvelable et de nucléaire, la réforme en profondeur du marché de l’électricité, la protection des consommateurs européens et la compétitivité font partie des sujets évoqués ce matin par la présidente de la Commission européenne, qui a également présenté les initiatives phares que la Commission prévoit d’entreprendre au cours de l’année à venir. Et si la réduction de la dépendance de l’UE aux combustibles fossiles russes est un enjeu majeur, Ursula von der Leyen a insisté, dans la lignée du plan REpowerUE, pour investir « davantage » dans les énergies renouvelables et notamment l’hydrogène. Elle a d’ailleurs annoncé la mise en place d’une nouvelle banque publique dédiée au développement de l’hydrogène. Objectif : construire les conditions de marché propices au développement de ce vecteur énergétique, sans se laisser distancer par la Chine et les États-Unis.

Le gaz russe ne représente plus que 9 % des importations

« La solidarité de l’Europe avec l’Ukraine restera inébranlable. Depuis le premier jour, l’Europe est aux côtés de l’Ukraine. Avec des armes. Avec des fonds. Avec l’hospitalité pour les réfugiés. Et avec les sanctions les plus sévères que le monde ait jamais vues » a rappelé Ursula von der Leyen. Si le gaz russe par gazoduc représentait 40 % des importations de gaz de l’UE l’année dernière, il ne représente plus aujourd’hui que 9 %. L’UE a également rempli son objectif commun de remplissage des stockages gaziers puisque la taux de remplissage à date a atteint 84 %. Et si la Russie continue selon la présidente « à manipuler le marché de l’énergie » en préférant « torcher le gaz plutôt que le livrer », les mesures mises en place pour accompagner les Européens particuliers comme entreprises doivent être « renforcées » pour faire face à la hausse de prix a souligné la présidente, tout en insistant également sur la nécessité d’être mieux équipé pour faire face au changement climatique qui impacte directement notre système énergétique. « La crise climatique pèse lourdement sur nos factures. Les vagues de chaleur ont fait grimper la demande d’électricité. Les sécheresses ont mis hors service les centrales hydroélectriques et nucléaires. »

140 milliards d’euros pour amortir le choc

Déjà abordé en début de semaine dernière lorsque la Commission a présenté ses cinq mesures pour réduire la facture énergétique européenne, le plafonnement des recettes pour les entreprises qui produisent à faible coût de l’électricité et réalisent des bénéfices extraordinaires sur « le dos des consommateurs ». Et si la présidente a rappelé que « dans notre économie sociale de marché, les profits sont une bonne chose », elle a précisé qu’au vu de la situation actuelle « les profits doivent être partagés et canalisés vers ceux qui en ont le plus besoin ». Cette redistribution pour soutenir les entreprises et les ménages les plus vulnérables pourrait permettre de lever « plus de 140 millions d’euros ». L’industrie des combustibles fossiles a « également un devoir particulier ». Ursula von der Leyen estime que les grandes compagnies pétrolières, gazières et charbonnières qui réalisent elles aussi d’énormes bénéfices doivent « payer une part équitable et apporter une contribution de crise ».

S’adapter aux nouvelles conditions du marchés du gaz

« Aujourd’hui, notre marché du gaz a totalement changé : du gaz principalement acheminé par gazoduc nous sommes passés à des quantités croissantes de gaz naturel liquéfié » souligne la présidente qui insiste sur le fait que la référence utilisée actuellement sur le marché du gaz, le TTF, « n’a pas été adaptée à cette nouvelle donne ». La Commission travaillera dans les prochaines semaines pour établir « une référence plus représentative » a-t-elle dit, sans donner davantage de précisions. La présidente a également évoqué les mesures qu’allait prendre la Commission pour aider les entreprises confrontées à de graves problèmes de liquidité sur les marchés à terme de l’électricité. Un travail a été entamé avec les régulateurs pour amoindrir ces problèmes en modifiant les règles relatives aux garanties – et en prenant des mesures afin de limiter la volatilité intra-journalière des cours. « Nous modifierons l’encadrement temporaire des mesures d’aide d’État en octobre, afin de permettre la fourniture de garanties publiques, tout en préservant l’égalité des conditions de concurrence. »

Une réforme « en profondeur » du marché de l’électricité

« Au-delà de la crise immédiate, nous devons penser à l’avenir » et l’avenir pour l’UE c’est « une réforme complète et en profondeur » de son marché de l’électricité, où les prix ont explosé ces dernières semaines (plus de 1 000 euros le MWh), dans le sillage des cours du gaz. Le marché de l’électricité actuel ne correspond plus aux besoins des consommateurs européens. « Il faudra découpler les prix de l’électricité de l’influence dominante du gaz » a ajouté la présidente.

Une banque publique de l’hydrogène

« L’hydrogène peut changer la donne pour l’Europe » a déclaré la présidente von der Leyen qui a annoncé la création d’une banque européenne pour aider à garantir l’achat d’hydrogène. Elle pourra investir 3 milliards d’euros pour aider à construire le futur marché de l’hydrogène. « Nous devons passer du marché de niche au marché de masse, nous voulons produire 10 millions de tonnes d’hydrogène renouvelable dans l’UE chaque année d’ici à 2030« , ce qui nécessite « de combler le déficit d’investissement« , a-t-elle indiqué devant le Parlement européen, assurant que cette banque publique servira également à « garantir l’achat d’hydrogène« .

Les ministres de l’Énergie de l’UE se réuniront de nouveau le 30 septembre pour étudier les nouvelles propositions sur lesquelles la Commission travaille actuellement et qui doivent répondre à des besoins de court terme mais aussi à des mesures plus structurelles sur l’évolution du système énergétique européen.

Crédit : European Union, 2022.