Approvisionnement : Emmanuel Macron réunit un conseil de défense sur l’énergie

Publié le 30/08/2022

6 min

Publié le 30/08/2022

Temps de lecture : 6 min 6 min

Le président Emmanuel Macron réunira vendredi un conseil de défense consacré à l’approvisionnement en gaz et en électricité de la France, a indiqué mardi l’Élysée. Objectif : préparer tous les scénarios possibles pour l’automne et l’hiver alors que les prix de gros sur les marchés atteignent des sommets et que la Russie a encore réduit ce matin ses livraisons de gaz à Engie.

Par la rédaction, avec AFP

 

« L’approvisionnement en gaz et en électricité étant un intérêt vital pour le pays, le conseil de défense et de sécurité nationale (CDSN) aura pour objectif de faire le point sur la situation ainsi que sur les scénarios envisagés pour se préparer à tous les cas de figure cet automne et cet hiver », a expliqué à l’AFP un conseiller de l’Élysée. « On ne peut pas parler de gaz et de crise énergétique sans parler de la Russie et de la guerre en Ukraine, ce qui veut dire qu’il y a des sujets de l’ordre de la sécurité nationale et à haute valeur stratégique« , a plaidé mardi sur France info le porte-parole du gouvernement Olivier Véran pour justifier le recours à ce dispositif où les délibérations sont secrètes et qui a déjà fait réagir l’opposition.

L’énergie au cœur de l’échiquier géopolitique

« Ne voyez pas ça comme une enceinte secrète, c’est vraiment un travail collégial, collectif », a-t-il cependant ajouté, en précisant avoir participé à de nombreux conseils de défense sanitaire en tant que ministre de la Santé. Initialement réservés aux sujets de défense, ces conseils avaient été utilisés à de nombreuses reprises par le chef de l’État à l’époque de la crise covid, provoquant des critiques des oppositions politiques sur l’exercice solitaire du pouvoir. « Un conseil de défense énergie, pour moi c’est le secret. Le conseil des ministres je vois ce que c’est, l’assemblée, je vois ce que c’est, le Sénat je vois ce que c’est, c’est prévu dans la constitution. Le conseil de défense ça n’existe pas« , a critiqué mardi sur LCI le patron des Verts Julien Bayou. La semaine dernière, les prix se sont envolés sur les marchés de gros, dépassant les 1 000 euros du MWh pour l’électricité et 300 euros pour le gaz, avec des différentiels impressionnants notamment sur le prix de l’électricité en Allemagne et en France. Entraînée par les cours du gaz, l’Europe a connu une semaine de prix records de l’électricité pour livraison début 2023, culminant vendredi à 950 euros le MWh en Allemagne et à 1 300 euros en France. Il y a un an, les prix dans ces deux pays étaient seulement d’environ 85 euros par MWh. Et la situation s’annonce compliquée avec les annonces de Gazprom qui fait peser le risque de pénurie sur l’UE, même si la France semble moins concernée à ce stade. La situation est également tendue du côté de l’électricité, en raison de l’indisponibilité d’une partie du parc nucléaire, notamment pour des problèmes de corrosion. Hier, lors de son allocution à la Rencontre des entrepreneurs de France (REF) organisée par le Medef, la Première ministre Élisabeth Borne a vivement encouragé les entreprises à agir pour améliorer leur sobriété énergétique, faute de quoi elles seraient les « premières touchées » par des mesures de « rationnement » dans les prochains mois.

Des nouvelles réductions de gaz russe à Engie

Engie a annoncé ce matin que Gazprom allait encore réduire ses livraisons à la France. Des réductions supplémentaires et immédiates « en raison d’un désaccord entre les parties sur l’application de contrats ». Les livraisons de gaz russe à Engie avaient déjà considérablement diminué depuis le début du conflit en Ukraine, passant récemment à seulement 1,5 TWh par mois, a précisé Engie dans un bref communiqué. Ce chiffre est à rapporter à des approvisionnements « totaux annuels en Europe supérieurs à 400 TWh« , ajoute le principal fournisseur de gaz en France, dont l’État français détient près de 24 %. Le groupe rappelle avoir déjà mis en place des mesures pour pouvoir fournir ses clients même en cas d’interruption des flux de Gazprom. « Engie avait d’ores et déjà sécurisé les volumes nécessaires pour assurer l’approvisionnement de ses clients et pour ses propres besoins« , est-il indiqué dans le texte. Fin juillet, l’énergéticien français assurait avoir « limité » son exposition financière, « même en cas d’arrêt des livraisons de gaz russe » et « réduit significativement » son exposition physiqueConcrètement, le groupe réduit à environ 4 térawattheures (TWh) son exposition aux volumes livrés par Gazprom en vue de l’hiver 2022-2023, contre 15 TWh au mois de mars dernier, grâce notamment à une « gestion globale du portefeuille gaz » avec des volumes supplémentaires contractés par de nouvelles sources d’approvisionnement comprenant du gaz naturel liquéfié (GNL) mais aussi par gazoduc. « Les volumes résiduels, qui représentent environ 4 % de la fourniture de gaz d’Engie à ses clients B to B, B to C et pour la consommation de ses propres centrales à gaz à cycle combiné en Europe, se situent largement dans la fourchette habituelle de volatilité gérée en permanence, notamment pour les variations de volume dues aux conditions climatiques » était-il précisé. Une réalité confirmé par Claire Waysand, directrice générale adjointe d’Engie à la REF où elle a rappelé que l’énergéticien n’était pas « inquiet » pour l’hiver. « Nous avons les volumes nécessaires en France pour passer l’hiver à climat moyen », même si le facteur météorologique reste déterminant et qu’un scénario d’un hiver très froid pourrait être problématique. Un fait également rappelé ce matin par Olivier Véran qui a confirmé mardi sur France info que l’objectif serait atteint « d’ici à la fin de l’été », à savoir le remplissage des stockages gaziers français au maximum mais qui a averti que cela ne signifiait pas que la France aurait « suffisamment de gaz pour passer l’hiver si les Russes le coupaient et si on en consommait beaucoup ».

Crédit : Shutterstock.