Sébastien Lecornu dénonce un « chantage politique » et saisit la justice après les accusations des écologistes

Énergie
10/12/2025
6 min

Le Premier ministre Sébastien Lecornu a fermement réagi aux accusations de « chantage politique » portées par les écologistes, après qu’un conseiller de Matignon ait été accusé d’avoir tenté de conditionner les objectifs de la transition énergétique au soutien des Verts sur le projet de budget de la Sécurité sociale voté ce 9 décembre. Le Premier ministre a rejeté ces accusations et annoncé son intention de saisir la justice pour faire toute la lumière sur cette affaire, qu’il a qualifiée de « tentative d’ingérence » d’un groupe d’intérêts.

Par Laura Icart

C’est une séance de question au gouvernement ( QAG) particulièrement tendue qui s’est déroulée cet après-midi dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale quelques heures avant un vote décisif sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), les écologistes par le biais de leur président ont accusé Matignon de se livrer «  à des arrangements de boutique » pour obtenir leur vote sur le PLFSS au risque sinon de voir raboter les objectifs sur les énergies renouvelables dans la prochaine Programmation  pluriannuelle de l’énergie, toujours prévue « avant Noël » et qui agite décidément comme jamais la vie politique française de ligne rouge à objet de chantage. Hier, « des messages auraient été passés par un conseiller du Premier ministre à des acteurs du secteur des renouvelables pour influer sur le vote des députés écologistes » nous indique une source au Parlement.

Un échange tendu à l’Assemblée

Cyrielle Chatelain, cheffe des députés écologistes, a révélé ce matin sur BFM TV qu’un conseiller du gouvernement aurait contacté des acteurs du secteur des énergies renouvelables, leur affirmant que les objectifs en matière d’énergies renouvelables « seraient dépendants du vote des écologistes sur le budget. » Selon elle, ce conseiller aurait « également mis en garde contre des conséquences dramatiques pour l’industrie si le groupe écologiste ne soutenait pas le projet de loi. » Lors des QAG, la présidente des écologistes qui réclame comme plusieurs autres groupes politiques depuis de nombreux mois une sortie rapide de la PPE notamment pour donner de la visibilité aux filières industrielles a qualifié cette situation de « chantage politique » et a exigé une condamnation sans ambiguïté de la part du Premier ministre, rappelant que les écologistes n’accepteraient jamais un lien entre les choix énergétiques et les votes parlementaires.  Elle a également réclamé des garanties que les objectifs de la France en matière d’énergies renouvelables, notamment le solaire, seraient maintenus malgré les pressions politiques. Le projet de PP3 prévoyait un objectif de 54 GW sur le solaire en 2030, si plusieurs bruits ont circulé ces dernières semaines faisant état d’une baisse des ambitions, ces dernières heures un chiffre en dessous de 50 GW aurait été évoqué sans que personne ne vienne ni le confirmer ni l’infirmer.

« Je démens, je condamne, je saisis la justice »

Sébastien Lecornu a immédiatement réfuté les accusations et assuré avoir mené une enquête interne pour déterminer la véracité des faits. Il a affirmé que « de toutes les évidences, un groupe d’intérêts » avait cherché à s’immiscer dans les discussions politiques entre le gouvernement et les écologistes. « À aucun moment, un conseiller de Matignon n’a fait pression sur des entreprises ou des syndicats », a-t-il insisté. Pour apaiser la situation, le Premier ministre a annoncé sa décision de saisir la justice. « Je ne peux accepter aucune suspicion concernant la défense d’intérêts particuliers, surtout sur des sujets aussi sensibles que la transition énergétique », a ajouté le Premier ministre, soulignant que le débat sur la politique énergétique devait se dérouler « loin de tout intérêt particulier, si ce n’est celui de l’intérêt général. » Le Premier ministre a aussi pris soin de démentir les rumeurs qui circulent sur un éventuel moratoire sur les énergies renouvelables, qualifiant ces spéculations de « fausses rumeurs » et réaffirmant l’engagement du gouvernement à accélérer la transition énergétique, notamment à travers des projets comme l’éolien en mer ou le solaire.  « Je réunirai l’ensemble des formations politiques pour discuter de la PPE » a indiqué Sébastien Lecornu « avant le vote du PLF » qui pourrait avoir lieu la semaine du 22 décembre expliquant vouloir avoir « une clarification de notre stratégie en matière de transition énergétique, parce qu’on ne peut pas la déconnecter évidemment du budget de la nation et des grands équilibres qu’il nous faut mettre en place pour les années qui viendront. »

Si Cyrielle Chatelain a salué l’engagement du Premier ministre à saisir la justice, elle a exprimé des doutes sur la volonté réelle du gouvernement de tenir ses engagements en matière de climat. « Nous ne lâcherons pas sur la question de la transition énergétique », a-t-elle réaffirmé, demandant au Premier ministre de « tenir parole » sur les objectifs de développement des énergies renouvelables. Elle a également pointé le manque de soutien du gouvernement dans la mise en œuvre de la transition énergétique et a averti qu’aucune « baisse des objectifs » ne serait tolérée.

La patate chaude laissé par le gouvernement Bayrou n’en finit plus de faire des émules. Sans cesse repoussée depuis deux ans, les ultimes arbitrages autour de la PPE 3 sont attendus « d’ici à Noel » et sûrement après le vote du budget, à moins qu’un nouveau rebondissement ne vienne remettre une nouvelle pièce dans la machine.

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