Hydroélectricité : Paris et Bruxelles trouvent un accord qui permet de relancer les investissements

Hydroélectricité
28/08/2025
5 min
La production hydroélectrique en France souffre d’un manque d’investissements lié au régime de concessions auquel il est soumis et qui est à l’origine du contentieux avec la Commission européenne. ©Shutterstock

Paris et Bruxelles sont parvenues à un « accord de principe » en vue de la résolution des contentieux avec la Commission européenne sur l’hydroélectricité en France, qui empêchaient de relancer les investissements dans le secteur, a annoncé Matignon ce 28 août.

Par la rédaction, avec AFP

Cet accord de principe « est une excellente nouvelle », s’est félicité le Premier ministre François Bayrou dans un communiqué. « Après plus de 10 années de précontentieux, une voie a enfin été dégagée pour lever cette situation de blocage et relancer les investissements dans les barrages hydroélectriques français », a-t-il ajouté. Sa mise en œuvre se fera via une proposition de loi qui sera prochainement déposée à l’initiative des députés, a-t-il précisé.

Deuxième source de production électrique en France

Le parc hydroélectrique contribue non seulement à la production énergétique mais constitue aussi un important outil de flexibilité pour le système électrique français et européen, grâce aux capacités de stockage des barrages. Ces derniers représentent la deuxième source production électrique en France derrière le nucléaire, avec 13,92 % de la production d’électricité en 2024, soit 74,7 térawattheures (TWh). Et il s’agit de la première source d’électricité renouvelable française (50,47 %). Aujourd’hui, les installations hydroélectriques en France sont principalement exploitées sous le régime de la concession : les ouvrages appartiennent à l’État qui en confie l’exploitation à un concessionnaire pendant une durée définie par contrat. L’autre régime, celui de l’autorisation, concerne les installations de moins de 4,5 MW. Les exploitants en sont généralement aussi propriétaires et la durée des autorisations est plafonnée à 75 ans par la loi.

Un secteur en manque d’investissements

Or, selon un rapport parlementaire, le secteur en France souffre d’un manque d’investissements lié au régime de concession à l’origine des contentieux avec Bruxelles. Faute de visibilité sur l’avenir des concessions, les exploitants ne peuvent réaliser des investissements non prévus dans leurs cahiers des charges, ni ceux nécessaires au bon fonctionnement et au renouvellement des ouvrages, soulignaient les députés Marie-Noëlle Battistel (PS) et Philippe Bolo (Modem), auteurs de ce rapport publié au printemps. « Le pays est enlisé depuis plus de 20 ans dans un différend avec la Commission européenne » qui a ouvert deux procédures à l’encontre de la France, l’une datant de 2015, l’autre de 2019, rappellent les rapporteurs. Ces procédures portent sur la position dominante d’EDF et l’absence de remise en concurrence des concessions échues. La France refuse cette ouverture à la concurrence, mais cette situation empêche tout investissement substantiel dans le parc hydroélectrique. « Cet accord ouvre la voie au cadre juridique sécurisé pour relancer les investissements hydroélectriques, hors du champ concurrentiel et garantir un dispositif robuste pour l’ensemble des opérateurs historiques français que sont la Shem, la CNR et EDF » estime la CFE Énergies.

De la concession à l’autorisation

Le schéma retenu se décline en trois volets, dont le passage d’un régime de concession à un régime d’autorisation « dans des modalités qui doivent encore être précisées« , indique Matignon. Le deuxième volet porte sur la possibilité de maintenir les exploitants en place, « indispensable pour garantir la continuité de l’exploitation des ouvrages au regard des enjeux de sécurité« , de gestion de l’eau, de maintien des compétences et des emplois locaux et de retour de valeur sur les territoires, ajoutent les services du chef du gouvernement. Enfin, l’accord de principe prévoit la mise à disposition par EDF de 6 gigawatts de capacités hydroélectriques « virtuelles » à des tiers et « au bénéfice final des consommateurs« . Elles seront mises en vente sous le contrôle de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) et via des enchères concurrentielles. Concrètement, ces produits concernent la livraison d’un profil de production hydroélectrique (barrages fil de l’eau, éclusés, lacs…) mais n’ouvrent aucun droit sur la gestion opérationnelle des ouvrages, qui reste aux mains de l’exploitant.

« La prochaine étape sera législative, avec le dépôt d’une proposition de loi portée par les députés » a indiqué sur LinkedIn le ministre de l’Industrie et de l’énergie Marc Ferracci. Une étape qui devra s’intégrer dans un calendrier parlementaire incertain.

Vous aimerez aussi