Présidentielle : Coénove milite pour la complémentarité des énergies dans le bâtiment

Publié le 26/02/2022

6 min

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Temps de lecture : 6 min 6 min

Décarboner le mix et le rendre davantage résilient, accélérer la décarbonation des bâtiments et stimuler le tissu industriel français source d’innovations sont parmi les grands axes des propositions faites aux candidats à l’élection présidentielle par l’association Coénove, représentante des professionnels de la filière gaz dans le bâtiment.

Par la rédaction de Gaz d’aujourd’hui

 

« Réduire la politique énergétique de la France au seul enjeu du mix électrique va nous conduire inévitablement dans une impasse » souligne d’emblée Bernard Aulagne, président de Coénove qui regrette également que le gouvernement s’obstine à ne pas considérer le potentiel de décarbonation du biométhane dans le secteur des bâtiments et notamment dans la réglementation environnementale dit « RE2020 ». Une décision « incompréhensible » pour le président de Coénove. L’association a d’ailleurs déposé un recours auprès du Conseil d’État.

Le rôle clé des gaz renouvelables

Cette électrification massive des usages dans le bâtiment qui représente 40 % des consommations d’énergie en France et près de 20 % des émissions directes de gaz à effet de serre soulève de nombreuses questions sur « la gestion des pointes de consommation hivernales, la sécurité d’approvisionnement, le coût de nouveaux EPR ou encore l’intermittence des EnR électriques et les besoins de flexibilité ». Coénove fait une série de propositions pour inscrire durablement les gaz renouvelables dans le bâtiment alors qu’ils sont, selon elle, un vecteur clé de ce secteur pour atteindre la neutralité carbone en 2050, associés à davantage d’efficacité énergétique.

100 TWh de gaz renouvelables pour le bâtiment en 2050

« La sécurité d’approvisionnement énergétique du pays passe par un mix énergétique pluriel diversifié et sûr » souligne Coénove qui rappelle que, ces dernières années, ce sont la combinaison de six vecteurs énergétiques qui ont permis de faire face à la pointe hivernale, soit environ 330 GW (gaz, électricité, réseaux de chaleur, bois, fioul et propane), même si le gaz (40 %) et l’électricité (30 %) restent les principales sources mobilisées. Coénove rappelle que l’écosystème gazier, par sa flexibilité et sa capacité aujourd’hui à se verdir via un gisement sécurisé à horizon 2050 de 420 TWh (dont 135 TWh par an issus de la méthanisation), constitue un gage de souveraineté particulièrement pertinent, dans un contexte géopolitique où notre dépendance énergétique nous rend davantage tributaire des autres pays. Sans surprise, si l’association demande davantage de pluralité énergétique dans les choix des pouvoirs publics, elle insiste sur la nécessité de soutenir massivement l’essor des filières de gaz renouvelables (biométhane, biopropane, méthane de synthèse et hydrogène) qui apportent aussi de nombreuses externalités positives sur les territoires en termes d’attractivité, d’emploi et permettent une évolution des pratiques agricoles, notamment une réduction des engrais chimiques. Sur les 420 TWh de gisement estimé correspondant aux différentes filières de gaz renouvelables (méthanisation, pyrogazéification, gazéification hydrothermale, power-to-méthane, hydrogène), Coénove estime que 100 TWh pourront être affectés au secteur du bâtiment, permettant l’utilisation d’une énergie produite localement mais surtout de « contribuer à la sécurité d’approvisionnement en limitant les pointes de puissance électrique en hiver ». Une disponibilité qui sera conditionnée selon l’association à une reconnaissance du rôle des gaz renouvelables dans la réglementation, pour le neuf comme pour la rénovation, et des objectifs plus ambitieux de production pour le biométhane, dès la prochaine programmation pluriannuelle de l’énergie. 

Concilier décarbonation et pouvoir d’achat

La rénovation énergétique des bâtiments est le principal levier sur lequel s’appuie le gouvernement pour décarboner le secteur du bâtiment. Or aujourd’hui, malgré les rythmes de rénovation très ambitieux affichés dans les différents scénarios (SNBC, RTE, Ademe), de l’ordre de 800 000 logements par an rénovés au niveau bâtiment basse consommation (BBC), ces chiffres sont très loin d’être atteints. En 2021 selon Effy, 41 000 logements collectifs ont engagé des rénovations pour atteindre un niveau BBC et cela constitue une année « record » selon l’entreprise. Autres chiffres éloquents, ceux fournis par l’observatoire BBC qui stipulent que depuis le début de l’instauration du label BBC en 2009, un peu moins de 300 000 logements, en très grande majorité collectifs, ont été rénovés en BBC. Il y a bien des efforts importants déployés ces dernières années, notamment avec la mise en place de « Ma prime rénov’ » et plus récemment le regroupement de toutes les aides avec France renov’, qui a permis d’augmenter le nombre de rénovations aidées. Si le président de Coénove reconnaît la nécessité d’accompagner davantage la rénovation, il tempère toutefois le succès affiché de ma « Ma prime rénov’ »: « L’écrasante majorité des dossiers Ma prime rénov’ finance des gestes de rénovation, seul 0,1 % finance des rénovations globales. » L’association Coénove insiste beaucoup sur ce point : c’est bien l’efficacité énergétique qui doit primer en tenant compte également du pouvoir d’achat lorsque l’on sait que l’énergie constitue désormais le deuxième poste de dépense des Français derrière le loyer. Pour cela, elle propose à court terme d’accélérer le rythme de rénovation globale tout comme le remplacement des vieilles chaudières gaz qui constituent encore aujourd’hui 60 % du parc par des chaudières à très haute performances énergétiques « compatibles avec le biométhane et le bioproane ». Coénove recommande également de ne pas faire de la PAC électrique l’alpha et l’oméga du bâtiment en misant également sur les PAC hybrides qui, comme aime à le répéter l’association, allient « le meilleur des deux mondes » et permettent « une baisse des émissions de GES de plus de 70 % tout en limitant la pointe électrique hivernale ». À moyen terme, accroître les dispositifs d’accompagnement financier de la rénovation et mettre en place des dispositifs facilitant la consommation du biométhane sera indispensable pour atteindre la neutralité carbone en 2050.

Maintenir un tissu industriel innovant sur le territoire

Stimuler l’innovation industrielle française, « c’est un gage de souveraineté énergétique et d’emplois locaux » insiste Coénove qui rappelle que la France fait partie des pays les plus innovants dans le domaine de la chaudière murale gaz et dans le secteur du génie climatique en général. Pour maintenir cette capacité d’innovation de la filière gazière, source d’emplois de réindustrialisation et d’un savoir-faire made in France, l’association estime qu’il faut soutenir le développement des gaz renouvelables et reconnaître leur place dans les réglementations environnementales et celles des équipements de chauffage. 

Crédit : Shutterstock.