La chaleur renouvelable, « pilier de la transition énergétique » selon la filière

Publié le 09/12/2021

6 min

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Le 7 et 8 décembre s’est tenue la 3e édition de la Semaine de la chaleur renouvelable, l’occasion pour les acteurs de la filière d’appeler les pouvoir publics à rehausser le niveau d’ambition de la chaleur renouvelable dans le mix énergétique français et la remettre par là même au cœur du débat public alors que l’énergie sera, à n’en pas douter, une thématique phare des élections présidentielles.

Par la rédaction, avec AFP

 

Quatre priorités et huit propositions ont été définies et formulées par les acteurs de la filière de la chaleur renouvelable et de récupération (EnR&R). Une filière encore trop « méconnue » selon ses représentants et qui a bien du mal à trouver sa place dans une sphère publique et médiatique concentrée sur l’électricité et le nucléaire. Pourtant, « verdir notre production de chaleur est un levier essentiel pour atteindre les objectifs de neutralité carbone » soulignait la ministre de la Transition écologique dans une vidéo diffusée le 7 décembre. Les différents usages de la chaleur (chauffage des bâtiments, eau chaude sanitaire, procédés industriels) constituent 46 % de la consommation finale d’énergie en France et dépend pour près de 60 % des énergies fossiles importées. Pour le président du Syndicat des énergies renouvelables, Jean-Louis Bal, la décarbonation de la chaleur est aussi « une question de souveraineté » qui, dans un contexte haussier des prix de l’énergie, permettrait de mieux maîtriser la facture énergétique des Français. « Il faut que la chaleur renouvelable retrouve sa juste place dans le débat sur l’énergie », appelle Nicolas Garnier, de l’association de collectivités Amorce, qui met en garde contre une trop grande focalisation sur le « tout électrique », en particulier en ce début de campagne présidentielle.

23 % fourni par des énergies renouvelables et de récupération en 2020

En 2015, la loi de transition énergétique pour la croissance verte a fixé pour objectif de porter la part de la chaleur renouvelable (bois-énergie, géothermie, solaire thermique, biogaz, valorisation énergétique des déchets, chaleur perdue) à 38 % de nos consommations de chaleur à l’horizon 2030. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) prévoit qu’en 2023 en France métropolitaine la production de chaleur renouvelable atteigne 196 TWh, quand elle se situait en 2020 autour de 152 TWh, soit une hausse de près de 28 % et dans une fourchette comprise entre 219 TWh et 247 TWh en 2028. L’année dernière, sur les 669 TWh de chaleur consommée en France, seule 22,8 % était d’origine renouvelable. Le gaz (40 %), le pétrole et le charbon (19 %) et l’électricité (18 %) dominent encore largement le mix français de chaleur.

Une production de chaleur renouvelable dominée par le bois

Avec une forêt représentant presque 17 millions d’hectares, soit quasiment un tiers de notre territoire national, la production de chaleur renouvelable est majoritairement issue du bois (65 %). En 2020, la chaleur issue d’appareils de chauffage au bois domestique (75,7 TWh) et de chaufferies bois-énergie (24 TWh) représente au cumulé quasi 100 TWh, soit 14,9 % de l’ensemble de la consommation finale de chaleur en France métropolitaine. Les installations de valorisation énergétique des déchets (12,7 TWh) et les installations de de géothermie (7,3 TWh) complètent le podium. Un potentiel « encore sous-exploité » selon les acteurs, Le plan « déchet bois », issu du Comité stratégique filière bois, évalue d’ailleurs le gisement supplémentaire de déchets de bois mobilisable grâce à un meilleur tri et au détournement de la mise en stockage « à 1,3 million de tonnes à l’horizon 2025, dont 70 % pourraient être valorisées énergétiquement ». Autre composante du mix, la chaleur produite à parti de gaz renouvelable. Elle représente environ 4,5 TWh en 2020, issue des 1 085 installations en service sur notre territoire. Cette production a couvert l’année dernière 0,7 % de la consommation finale de chaleur. En France métropolitaine, 1, 2 TWh de chaleur renouvelable sont produits en 2020 à partir de capteurs solaires thermiques, ce qui représente 0,2 % de la consommation finale de chaleur. À noter que ce pourcentage double si on ajoute les Drom.

Faire entrer la chaleur renouvelable dans le quotidien des Français

Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, le rythme de développement « doit être significativement accéléré, de manière à ce que les énergies renouvelables couvrent 50 % de la consommation de chaleur dès 2030 » soulignent les acteurs de la filière dans leur communiqué qui fixent quatre grandes priorités : donner à la chaleur renouvelable une place centrale dans la neutralité carbone, décliner à une échelle territoriale les plans chaleur renouvelable, renforcer les mécanismes de soutien et s’assurer que cette transition est à un coût acceptable pour les Français, notamment les plus modestes. Car si la France a progressé ces dernières années grâce à l’instauration par l’État d’un « fonds chaleur », qui a notamment permis un développement des réseaux de chaleur et de froid, ce rythme de + 7-8 %, « ne suffit pas pour atteindre l’objectif de 38 % d’énergies renouvelables dans la chaleur en 2030 » et ce alors que la demande générale croît, souligne Jean-Louis Bal. À un objectif ambitieux de 50 % de chaleur renouvelable en 2030, les acteurs de la filière demandent également la fixation d’objectif de consommation de chaleur renouvelable dans les bâtiments existants. Il souhaite également « systématiser » un plan territorial de chaleur renouvelable dans toutes les collectivités territoriales de plus de 20 000 habitants dans le cadre des documents de planification existants. La France dispose déjà de trois outils, à « optimiser », selon les professionnels : le fonds chaleur (accroître ses moyens), Maprimerénov’ pour le bâti existant (à pérenniser au-delà de chaque loi de finances) et le fonds de décarbonation de l’industrie. « Il faut s’attaquer à la chaleur car elle est encore très carbonée, c’est là qu’est le CO2 ! Et c’est là que le ratio aide publique/efficacité est le meilleur », plaide Pascal Roger, de la Fédération des services énergie environnement (Fedene). « Ce n’est pas de l’inflation budgétaire, mais un investissement », dit-il. « Les aides du fonds chaleur ont représenté 2 milliards d’euros depuis 10 ans, or cela génère tous les ans 1,5 milliard d’euros d’économies d’importation » d’énergies fossiles. Et l’énergie verte, locale, « stabilise les factures » du consommateur, ajoute-t-il. Enfin, la filière prône un « fonds social » pour accompagner les plus précaires dans cette transition.