Groningue : ce champs gazier qui fait trembler la terre

Un ancien moulin à vent à Groningue, soumis aux dommages causés par l’extraction de gaz naturel dans le champs gazier.

Publié le 16/11/2021

4 min

Publié le 16/11/2021

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Un séisme de magnitude 3,2 s’est produit mardi 16 novembre dans le nord des Pays-Bas. Il est parmi les plus forts jamais enregistrés dans la région qui connaît fréquemment des tremblements de terre en raison de l’exploitation du gisement gaz naturel de Groningue, le plus grand d’Europe occidentale, a annoncé l’Institut royal météorologique néerlandais (KNMI).

Par la rédaction, avec AFP

 

Le séisme a été ressenti à 01h46 dans le village de Garrelsweer, aux alentours et jusque dans la ville de Groningue, où se trouve le gisement de gaz naturel du même nom, dont la fermeture est prévue à la fin de l’année prochaine et qui privera les Pays-Bas, deuxième producteur européen de gaz naturel, de revenus financiers importants. En 2011, les revenus du gaz avaient participé à hauteur de 8 % aux revenus de l’État. En 2013, le gouvernement néerlandais avait tiré quelque 13 milliards d’euros de ses ressources gazières, affichant alors une production proche des 54 milliards de mètres cubes de gaz (mmc). En 2019, le gouvernement a annoncé la fin de l’extraction du champs gazier qui ne représentait qu’une production de 3,9 mmc d’ici à la fin septembre 2022, après avoir atteint un pic de production de 88 mmc en 1976.

La terre tremble depuis longtemps

Le gisement de gaz naturel de Groningue, le plus grand d’Europe occidentale, a été découvert en 1959. En 1963, les premières extractions ont débuté. Le 26 décembre 1986, le premier tremblement de terre a été mesuré. Depuis, ils n’ont jamais cessé. Les spécialistes évaluent à plus de mille le nombre de secousses recensées dans cette zone depuis plus de 30 ans. Même si elles sont généralement d’une assez faible magnitude sur l’échelle de Richter (inférieure à 1), elles causent de nombreux dégâts sur les habitations environnantes et sont fortement ressenties par les habitants de la région. Une gronde locale et une situation que beaucoup d’experts géologues ont jugé depuis de nombreuses années « extrêmement préoccupante » ont conduit en 2013 les autorités néerlandaises à reconnaître le lien entre les forages et le risque sismique et à prendre des mesures, quitte à devoir fermer le robinet de sa poule aux œufs d’or.

Dans le top 4 des séismes les plus intenses 

L’Institut des dommages miniers de Groningue a indiqué à l’AFP avoir reçu 212 signalements de dégâts, 160 dans la zone touchée peu avant 16h. Huit d’entre eux faisaient état de dégâts « potentiellement sérieux« . Habituellement, environ 80 signalements sont enregistrés quotidiennement. Les autorités locales ont commencé à inspecter les éventuels dommages pouvant affecter les digues, écluses et autres barrages, et les résidents ont été invités à « être attentifs à toute irrégularité« , a rapporté l’agence de presse ANP. Le séisme enregistré fait partie du « top 4 des séismes les plus intenses enregistrés dans la région du gisement de gaz de Groningue« , a fait savoir le KNMI. Il est « le plus intense » dans la région depuis mai 2019 (3,4) à Westerwijdwerd (à l’ouest de Garrelsweer) ». Garrelsweer avait déjà connu en 2011 un séisme majeur, d’une magnitude de 3,2. Le séisme d’une magnitude 3,6 enregistré en 2012 à Huizinge est le plus fort jamais enregistré dans la région.  De faible magnitude mais proches de la surface, ces séismes dus aux poches de vide formées lors de l’extraction de gaz ont déjà provoqué de nombreux dégâts. L’organisme d’État de surveillance des mines (SodM) a déclaré que le nombre de séismes ressentis dans la région, supérieur aux prévisions, était « troublant« . Le SodM estime que de tels séismes pourraient être encore être ressentis durant des « décennies« .

Clap de fin l’année prochaine

Le gouvernement a décidé en 2020 d’anticiper à l’été 2022 la fin de l’extraction de gaz à Groningue, initialement prévue pour 2030. Au début du mois, dans un contexte européen de pénurie et de flambée des prix du gaz, le ministre des Affaires économiques Stef Blok a averti qu’une augmentation du niveau d’extraction pourrait être « nécessaire » au moment où le gisement devrait fermer. Blok a accusé le retard pris lors de la pandémie dans la mise en place d’une nouvelle installation d’azote, devant jouer un rôle important dans la limitation de l’extraction de gaz à Groningue. Le gouvernement a en outre présenté mardi au Parlement les grandes lignes d’un plan de renforcement des habitations sur plusieurs années. Selon les estimations, environ la moitié des 27 000 habitations faisant partie du plan devront faire l’objet de travaux de consolidation.

(c) Eemshaven, Gronginen, Pays-Bas