L’AFG présente son scénario 2030

Publié le 07/12/2016

8 min

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Le gaz peut contribuer efficacement à la transition énergétique : c’est cette conviction que l’Association française du gaz a voulu traduire en concevant pour la première fois un scénario de demande gazière, illustration du potentiel de l’industrie gazière en France, en cohérence avec les grandes orientations de la loi sur la transition énergétique pour une croissante verte et avec la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).

Par Laura Icart

« Le gaz peut facilement se substituer à des énergies davantage émettrices de carbone, il participe aux économies d’énergie en permettant de hauts rendements à l’utilisation et il contribue au développement des énergies renouvelables en assurant le back-up des énergies renouvelables électriques intermittentes et en devenant lui-même renouvelable » a déclaré à Gaz d’aujourd’hui Georges Bouchard, délégué général de l’AFG, résumant de fait les trois principaux messages portés dans ce scénario.

L’AFG établit une demande globale autour de 620 TWh. La progression la plus importante est attendue dans la production électrique au gaz naturel de réseau, bien que celle-ci soit sujette à l’évolution du prix du carbone. Le secteur de la mobilité terrestre et maritime, qui fait la part belle au GNL, est également mis en avant dans ce scénario.

Une énergie de substitution pour un monde moins carboné

L’amélioration de la qualité de l’air est devenue un enjeu de santé publique. Le gaz, moins émetteur de CO2 que d’autres énergies, permet de lutter contre la pollution atmosphérique et offre des opportunités intéressantes de substitution au fuel dans les secteurs résidentiel et tertiaire. Mais c’est principalement dans le secteur industriel que ce bénéfice devrait être le plus visible selon l’association puisqu’elle prévoit une hausse de 0,15 % par an, due principalement à une consommation énergétique totale stable et par un effet de substitution du gaz par rapport au charbon ou au fuel. En 2030, la mobilité terrestre1 représenterait plus de 25 TWh. Si la majorité de la demande sera portée par le secteur du transport routier de marchandises et à moyen terme par le secteur du transport de voyageurs et par les flottes des collectivités avec une demande en GNC avoisinant les 9 TWh, c’est le GNL qui devrait connaître une marge de progression des plus significative dans la carburation des poids lourds en passant de moins de 1 TWh aujourd’hui à près de 9,5 TWh en 2030, une progression favorisée notamment par le déploiement de nouvelles infrastructures et par une volonté politique de sortie du diesel. Pour les véhicules légers, le GNC offre une alternative intéressante avec une progression significative, de même que le GPL carburant qui représenterait au cumul en 2030 près de 10 TWh.  L’AFG préconise l’utilisation du GNL comme carburant marin et fluvial. Selon elle, les besoins en GNL carburant apparaissent dès 2020 pour les ports maritimes et dès 2025 pour les ports intérieurs.

L’association voit dans le GNL « le plus propre des carburants marins ou fluviaux existants. Il permet d’éliminer la quasi-totalité des oxydes de soufre (SOx) et des particules fines, de réduire de 85 à 90 % les oxydes d’azote (NOx) et de réduire jusqu’à – 25 % les émissions de CO2 ». Le GNL pourrait occuper, à l’horizon 2030, entre 20 et 70 % du marché actuel des soutes en France et représentait un volume de 10,5 TWh en 2030 en lien avec la conversion du trafic mondial. Elle table également sur une croissance rapide du GNL porté pour le secteur industriel avec des besoins évalués autour de 14 TWh. L’AFG relève qu’une dynamique intéressante est attendue dans la production d’électricité à partir de propane qui pourrait atteindre près de 33 TWh en 2030 dans les zones insulaires avec un taux de pénétration avoisinant les 15 %.

Une énergie qui concourt à l’efficacité énergétique

L’efficacité énergétique est un des piliers de l’Union de l’énergie. En France, la réglementation incitative mise en place ces dernières années, combinée à des appareils plus performants, ont contribué à une amélioration de la performance énergétique dans tous les secteurs. Dans son scénario, l’AFG prévoit une baisse de la demande gazière dans le secteur résidentiel (1,1 % par an) et tertiaire (0,7 % par an), baisse qui devrait se poursuivre jusqu’en 2030. Cette baisse s’explique par le cumul de l’effet « négatif » des économies d’énergie et par l’effet positif des substitutions. Il est vrai que les politiques incitatives en faveur de la rénovation énergétique et de nouvelles constructions hautement performantes ont un impact direct sur la baisse de la consommation énergétique totale et de fait sur la consommation gazière. L’AFG préconise l’usage du gaz naturel dans les secteurs résidentiel et tertiaire via des technologies de pointe telles que les chaudières à condensation gaz ou les pompes à chaleur gaz, de véritables atouts selon l’association pour contribuer à l’efficacité énergétique. 500 000 chaudières à gaz sont vendues chaque année en France. Si 60 % d’entre elles sont des chaudières à condensation, elles ne représentent actuellement que 20 % du parc installé, très loin derrière les Pays-Bas où les chaudières à condensation représentent plus de 80 % du parc de chaudières à gaz. « L’usage de chaudières à condensation ou de pompes à chaleur doit être suffisamment répandu pour avoir un effet visible et significatif sur la consommation énergétique en France », souligne Georges Bouchard.

L’association gazière pense que la production d’électricité centralisée constituera un fort relais de croissance pour la demande gazière, surtout à partir de 2022, pour atteindre près de 90 TWh en 2030, même si elle relève que la production d’électricité centralisée au gaz pourrait pâtir de la mise en place d’une taxe carbone unilatérale en France alors qu’elle permet de sécuriser le système électrique. Longtemps délaissées, les centrales à cycle combiné gaz (CGCG) sont pourtant cette année très sollicitées avec une production record de 9 513 GWh atteint le 6 décembre dernier. Cette sollicitation devrait, selon les professionnels du gaz, s’accroître dans les années à venir.

L’AFG mise également sur une hausse de la demande gazière dans le secteur de la cogénération. Si l’association table sur une stabilisation de la consommation entre aujourd’hui et 2023 autour de 30 TWh, elle fixe une perspective à l’horizon 2030 proche de 75 TWh. Une croissance de plus de 50 % qui s’explique avant tout par la valorisation potentielle liée aux excellents rendements énergétiques permis par la cogénération.

Une contribution au développement des énergies renouvelables

Les estimations énoncées dans le scénario AFG s’inscrivent dans la lignée de l’objectif affiché dans la loi sur la transition énergétique pour une croissante verte, à savoir la progression de la part du gaz renouvelable pour atteindre 10 % du gaz consommé en 2030. L’industrie gazière a maintes fois évoqué ces dernières années le potentiel du gaz naturel en termes de renouvelable et pour sa capacité à complémenter des énergies propres. L’association tient à mettre en avant le rôle du gaz dans le développement des énergies renouvelables électriques qui, en assurant la production complémentaire nécessaire pour pallier leur intermittence a prouvé, et l’actualité récente ne peut que le confirmer, l’importance de disposer de centrales à gaz sur notre territoire.

Dans son scénario, l’AFG met en évidence le fait que le gaz devient lui-même renouvelable. En effet, la part que va prendre la composante renouvelable du gaz sous forme de biogaz ou de gaz de synthèse ces prochaines années est croissante. Le biométhane, véritable gaz renouvelable, va jouer un rôle essentiel, notamment au travers de sa production décentralisée qui contribue au développement des territoires et de l’économie circulaire. La feuille de route biométhane 2030 de l’Ademe prévoit l’injection de 30 TWh de biométhane dans les réseaux de gaz, représentant la consommation énergétique moyenne équivalente à 250 0000 clients ou de 130 000 bus ou camions roulant au bioGNV. L’AFG relève que l’utilisation du biométhane comme carburant est une excellente valorisation, émise par la PPE, qui prévoit que 20 % du GNV utilisé en France 2023 sera du bioGNV. Le power to gas apparaît essentiellement dans les scénarios ambitieux en termes de développement des énergies renouvelables à partir de 2030, lorsque ces dernières deviendront structurantes dans le fonctionnement des systèmes électriques. À plus long terme, la gazéification de la biomasse sèche (bois, paille), la méthanisation de la biomasse issue de la production industrielle de micro-algues et la production d’hydrogène ou de méthane de synthèse à partir d’électricité excédentaire d’origine renouvelable permettront d’obtenir des quantités additionnelles de gaz vert, stockables et utilisables via les réseaux de gaz et sont autant d’éléments sur lesquels l’industrie gazière travaille déjà.

1 La mobilité terrestre comprend le gaz naturel comprimé (GNC) et le gaz naturel liquéfié (GNL).