Le gaz peut-il contribuer à dépolluer l’air ?

Publié le 10/03/2018

8 min

Publié le 10/03/2018

Temps de lecture : 8 min 8 min

Il est vrai qu’on ne penserait pas au premier abord au gaz dans la lutte contre la pollution de l’air. Et pourtant c’est une énergie qui offre une palette de possibilités : dans la mobilité, dans le résidentiel et le tertiaire, dans la production électrique… Une énergie qui pourrait demain en surprendre plus d’un.

Par L.I.

Principal vecteur des polluants atmosphériques dans nos villes, le secteur des transports et le trafic routier charrient quotidiennement les particules fines les plus nocives qui soit pour notre santé. À Paris, par exemple, 60 % des dioxydes d’azote (NO2) sont générées par le trafic routier.

Le gaz naturel véhicule (GNV), dont la filière particulièrement dynamique en France pourrait être une alternative sérieuse face à l’essence et au diesel infiniment plus polluants, s’est structuré à la vitesse grand V ces dernières années et prévoit 250 stations d’avitaillement d’ici 2020.

Pourquoi peut-on miser sur le GNV ?

Tout d’abord, et c’est suffisamment nouveau pour être souligné, le GNV est désormais adoubé par les pouvoir publics qui se sont convaincus qu’il était un carburant particulièrement adapté pour les poids lourds, les flottes utilitaires et les transports collectifs. Un autre atout de ce carburant alternatif est lié à la mise en place du dispositif Crit’Air, dont Nicolas Hulot a annoncé vendredi 13 avril qu’on avait franchi le cap symbolique des 10 millions de vignettes distribuées dans notre pays. Les véhicules GNV comme les véhicules GPL d’ailleurs arborent la vignette 1 qui leur donne droit à des modalités de stationnement favorables et la possibilité de circuler en tout temps. Autre élément en faveur de la mobilité gaz, la mise en place des zones de circulation restreintes qui bientôt interdiront l’accès aux centres-villes aux véhicules les plus polluants, comme c’est déjà le cas à Paris et à Grenoble. Il n’est d’ailleurs pas rare dans ces deux villes de croiser des camions Carrefour, Monoprix ou Casino roulant au GNV. Une dynamique qui devrait encore s’amplifier, notamment avec les deux mesures présentées par la France dans son plan d’actions pour la qualité de son air, à savoir un dispositif de sur-amortissement pour l’achat ou la location de poids lourds de plus de 3,5 tonnes roulant au GNV ou au bioGNV (dispositif qui a été adopté dans la loi de finances 2018 et qui sera prolongé), ainsi que le gel de la fiscalité du GNV afin de préserver la compétitivité de cette énergie face au diesel. Enfin, de plus en plus de communes annoncent la conversion de leurs bus du diesel au biogaz. La dernière en date, Angers Loire Métropole, envisage même de convertir la moitié de sa flotte.

Souvent ignorés face à la pollution automobile, les dommages causés par les émissions dans le secteur du transport maritime sont pourtant impressionnants. Les experts estiment qu’un seul navire pollue autant qu’un million de voitures. Ici aussi, le gaz semble promis à un bel avenir qui devrait lui permettre de faire voguer de nombreux navires sur les mers et les fleuves de la planète.

Le GNL carburant peut-il changer la donne ?

Le transport maritime représente plus de 90 % des marchandises acheminées dans le monde et entre 3 et 5 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial. La faute à des teneurs en soufre très fortes dans les carburant, 3 500 fois plus élevées par exemple que le diesel des voitures et qui, une fois brûlé, rejette le très toxique dioxyde de soufre (SO2). Pourtant, c’était le seul secteur jusqu’à présent à n’avoir ni objectif, ni plan pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre et à ne pas être contraint par l’accord de Paris. Devant l’urgence de la situation – et non sans mal -, l’Organisation maritime internationale (OMI) a annoncé, le 13 avril, la signature d’un accord visant à réduire « d’au moins 50 % » les émissions de CO2 du transport maritime d’ici 2050 par rapport au niveau de 2008, elle qui s’était déjà engagée à faire passer le plafond international de la teneur en soufre du fuel lourd de 3,5 % à 0,5 % en 2020. Cette dernière décision avait d’ailleurs poussé les armateurs à s’adapter et à utiliser d’autres types de carburants comme le GNL. Depuis, la CMA CGM, leader en matière de transport maritime, a annoncé durant la COP23 son choix d’utiliser du gaz naturel liquéfié (GNL) pour les moteurs de ses neuf porte-conteneurs qui seront livrés en 2020. Brittany Ferries a annoncé la construction de L’Honfleur, un navire propulsé au GNL qui devrait prendre la mer en 2019. En France, où la filière démarre à peine, une plateforme a été créée l’année dernière, pour structurer l’offre et convaincre les ports comme les armateurs que le GNL carburant est une solution capable de répondre aux nouvelles exigences environnementales mais aussi une chance pour l’industrie et l’attractivité des ports français.

Si la mobilité gaz, qu’elle soit terrestre ou maritime, est sans doute le secteur le plus susceptible d’avoir un impact sur la pollution de l’air, la conversion au gaz naturel d’un bâtiment, d’une usine, ou tout simplement du chauffage individuel d’un foyer, a également des effets à plus ou moins long terme sur l’air que nous respirons.

Des études qui parlent pour le gaz

Depuis quelques années, l’Union internationale du gaz (UIG) produit tous les six mois une série d’études de cas qui décryptent l’impact sanitaire de la pollution de l’air dans quatre villes qui font l’objet d’une attention particulière de l’OMS. La dernière, publiée le 26 mars, traite de Shanghai, Pékin et Urumtchi en Chine, et de Santiago au Chili. Le moins que l’on puisse dire est que les avantages découlant d’un passage généralisé du charbon au gaz naturel dans la production d’énergie résidentielle et industrielle dans un pays qui enregistrait en 2015 près de 4 000 décès par jour à cause des particules fines, sont très significatifs. En 2014, Pékin enregistrait des concentrations de particules proche de 85,9 μg/m3 (près de neuf fois la limite de l’OMS). Un smog quasi permanent flottait au dessus de la capitale chinoise, forçant le gouvernement chinois à mettre en place une politique agressive de substitution du charbon au gaz. Depuis, les concentrations de particules ont chuté à 58 μg/m3. 2016 a été une année charnière pour la ville puisque 4 450 chaudières au charbon ont été fermées et 900 000 ménages sont passés du charbon au gaz depuis 2013. Alors qu’elle était l’une des villes les plus polluées, Shanghai fut la première ville de Chine à entreprendre un programme de rénovation de ses chaudières au charbon en 2012. Des travaux ont été entrepris pour acheminer et distribuer le gaz naturel. En 2016, l’utilisation du gaz naturel a entraîné une réduction de tous les principaux polluants atmosphériques : la concentration de PM 2,5 s’est améliorée de 15,1 % par rapport à 2015 et de 27,4 % par rapport à 2013. Les concentrations de PM 10 ont chuté de 14,5 % par rapport à 2015. Même constat pour les villes d’Urumtchi et de Santiago qui, en adoptant des solutions gaz, ont amélioré sensiblement la qualité de leur air.

Point de vigilance : le méthane

Ce redoutable  gaz à effet de serre ( CH4) est aussi le principal composant du gaz naturel. Des fuites de méthane sont  constatées lors de l’extraction ou du transport du gaz naturel. «De nombreuses études ont montré l’importance de réduire rapidement les émissions de méthane si nous voulons répondre à la demande croissante en énergie et atteindre de multiples objectifs environnementaux», déclarait en 2017, Mark Radka, le directeur de l’énergie et du climat à l’Onu. Depuis l’industrie gazière  a pris des engagements  comme  réduire ses émissions de méthane,  améliorer  l’exactitude des données sur les émissions de méthane ou encore faire preuve de plus de transparence. L’industrie gazière a clairement un  rôle  à jouer dans la transition vers un avenir à faible teneur en carbone sera influencé et les mesure qu’elle prendra sur les émissions de méthane seront déterminantes pour l’avenir. 

Pour répondre aux enjeux dictés par la pollution de l’air, la seule énergie gaz n’est sans doute pas suffisante mais elle offre cependant aujourd’hui une diversité de solutions dans le secteur des transports, de la production énergétique ou encore dans nos foyers, qui lui permettre d’être force de propositions et d’innovations.

POUR LA PRODUCTION ELECTRIQUE :
Le gaz naturel rejette 234 g de CO2 pour produire 1 kilowattheure (kWh) d’énergie en brûlant ;
le fuel rejette 300 g de CO2 ;
le charbon rejette 384 g de CO2.