« Le gaz ? La meilleure option face à des énergies renouvelables parfois incertaines »

Diederik Peereboom

Publié le 15/07/2017

7 min

Publié le 15/07/2017

Temps de lecture : 7 min 7 min

Gaz d’aujourd‘hui a demandé à Diederik Peereboom, directeur au sein de l’agence internationale de communication Burson Marsteller et président de l’EMEA Energy Practice, spécialiste des questions de politiques énergétiques en Europe, de dresser un panorama de la situation gazière en Europe et des défis qui attendent l’UE ces prochains mois.

Le gaz couvre environ un quart des besoins énergétiques de l’Union européenne. La consommation actuelle de gaz de l’UE est d’environ 400 milliards de mètres cubes par an et devrait rester relativement stable au cours des prochaines années. Quels sont les grands défis pour le secteur gazier en Europe ?

Diederik Peereboom : L’Union européenne souhaite évoluer vers un système énergétique reposant sur des sources d’énergie renouvelables et à faible teneur en carbone. Cette transition permettrait notamment de réduire notre dépendance vis-à-vis de fournisseurs externes tels que la Russie. Le gaz a l’avantage d’être plus vendeur que le charbon. Il a réussi à se positionner comme la meilleure option face à des solutions d’énergies renouvelables dont les performances sont parfois incertaines et variables. L’industrie du gaz fait face à trois principaux problèmes. Tout d’abord, le gaz est une énergie fossile qui rejette du dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Ensuite, la majeure partie du gaz consommé dans l’UE vient de plus en plus d’approvisionnements extérieurs. En effet, l’amenuisement des ressources locales en gaz couplé à une demande stable résultent en une demande croissante pour un approvisionnement à l’étranger. Beaucoup d’hommes politiques cherchent à éviter cette situation de dépendance qui se révèle problématique pour toute l’industrie du gaz européen. Enfin, le secteur du gaz fait face à un challenge quant à la question de l’emploi et plus particulièrement chez les jeunes. Pour beaucoup d’entre eux, il est plus attrayant de travailler dans un secteur nouveau, tel que celui des énergies renouvelables, plutôt que pour celui du gaz qui est déjà bien établi.

« Le secteur du gaz fait face à un challenge quant à la question de l’emploi et plus particulièrement chez les jeunes. »

Les négociateurs du Conseil et du Parlement européen sont parvenus le 26 avril à un accord sur le nouveau règlement concernant la sécurité d’approvisionnement en gaz, qui vise à prévenir les crises d’approvisionnement. Quels sont les grands points de cet accord ? Quelles sont les principales améliorations à attendre de cette nouvelle réglementation ?

L’accord se divise en trois points principaux. Premièrement, l’introduction d’un principe de solidarité : en cas de crise grave et en dernier ressort, les États membres voisins aideront à garantir la fourniture de gaz aux ménages et aux services sociaux essentiels (services de sécurité, soins de santé par exemple). Cela veut dire que si l’Italie fait face à une crise d’approvisionnement en gaz, la France sera sollicitée pour lui venir en aide. Deuxièmement, une coopération régionale renforcée : des groupes de pays se réuniront afin d’établir ensemble une évaluation plus précise des risques de crise gazière. Ils élaboreront également ensemble une série de mesures qui viseront à la fois à éviter ce type de situation mais aussi à anticiper sur le mode de réaction dans un contexte de crise.
Troisièmement, plus de transparence : les contrats de long terme pris par les entreprises de gaz naturel et pertinents pour la sécurité d’approvisionnement (28 % de la consommation annuelle de gaz dans l’État membre) devront automatiquement être notifiés à la Commission européenne et aux autres États membres dès leur conclusion.

« Considérant la dépendance croissante de l’UE en gaz importé, il est essentiel de pouvoir effectivement le transporter là où se trouve la demande. » 

La Commission concentre beaucoup de ses actions dans les interconnexions gazières. Pourquoi justement faut-il renforcer ces interconnexions et quelles sont les avantages à être sélectionné dans la liste de projets d’intérêts communs (PIC) ?

Les interconnexions sont importantes pour la sécurité d’approvisionnement dans l’UE. Considérant la dépendance croissante de l’UE en gaz importé, il est essentiel de pouvoir effectivement le transporter là où se trouve la demande. Les interconnexions font parties de la liste des PIC. Quand un projet fait partie de cette liste, il bénéficie d’obtentions de permis et d’évaluations environnementales beaucoup plus rapidement. Cela veut aussi dire que le concepteur du projet n’a besoin de se référer qu’à un seul point de contact pour toutes les démarches administratives et diverses procédures. Enfin, les projets inscrits sur la liste des PIC ont la possibilité de recevoir une aide financière au titre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) sous la forme de subventions ou d’instruments financiers novateurs.

La directive prévoit des points de recharge pour les véhicules électriques. Le gaz a aussi un rôle à jouer dans le secteur de la mobilité propre et dans la lutte contre la pollution de l’air. Qu’en pensez-vous ?

Le gaz peut jouer un rôle pour le secteur des transports et de la mobilité propre. Il en joue d’ores et déjà un avec le gaz de pétrole liquéfié et les véhicules au gaz naturel comprimé. Par ailleurs, la France et le Royaume-Uni ont annoncé leur intention de mettre un terme aux ventes de voitures à essence et diesel. Ce type de décision pourrait permettre au gaz de se positionner et de répondre à la demande de carburant pour le secteur des transports. Cependant, il ne faut pas perdre de vue que l’UE est très orientée vers l’énergie électrique. À cet égard, dans le futur, les centrales nucléaires pourraient jouer un rôle décisif pour les véhicules électriques dont le nombre ne cesse d’augmenter.

Que peut-on répondre aux acteurs gaziers qui disent que l’objectif de réduction du CO2 devrait prévaloir sur tous les autres ?

L’accord de Paris a confirmé que la question du changement climatique est un des plus grands défis auquel nous faisons face aujourd’hui. La réaction qui a suivi l’annonce du retrait du gouvernement américain prouve que les principales puissances mondiales continuent de soutenir cet accord et ses objectifs. La question n’est plus de savoir si nous devons réduire l’émission des gaz à effet de serre mais comment. À ce titre, l’industrie, les gouvernements et les citoyens doivent trouver ensemble une solution viable et qui permettra au secteur de continuer à fonctionner tout en assurant un approvisionnement en énergie abordable pour tous. En tant que principal fournisseur d’énergie, l’industrie du gaz a un rôle crucial à jouer dans l’avenir.