L’artère du Santerre bientôt ouverte

Publié le 25/10/2016

6 min

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Le projet « artère du Santerre » visant à renforcer les capacités de transport de gaz naturel entre la Picardie et le nord de la France par le doublement partiel de la canalisation existante dans la région des Hauts-de-France entre dans sa dernière ligne droite. Sa mise en service est prévue courant novembre.

Par Laura Icart

C’est en avril 2013 que GRTgaz a présenté pour la première fois le tracé de sa nouvelle canalisation baptisée « artère du Santerre ». Après une phase d’études et une enquête publique, c’est en juin 2015 que l’entreprise obtient le précieux sésame du ministère de l’Écologie, du développement durable et de l’énergie de construire et d’exploiter l’artère du Santerre. Les travaux de construction du gazoduc ont débuté le 1er mars et doivent s’achever dans quelques jours.

Un projet dans les tablettes depuis 2011

Le gazoduc artère du Santerre relie les communes de Chilly (Somme) à Ressons-sur-Matz (Oise). Selon Daniel Dufour, directeur du projet chez GRTgaz, il permettra de « sécuriser l’alimentation en gaz dans les Hauts-de-France, notamment en période hivernale quand le réseau est fortement sollicité », dans une région où la quantité de gaz nécessaire au moment des pics de froid n’a fait que croître ces dernières années.

La canalisation, d’une longueur de 33 km, est composée de tubes en acier soudés bout à bout d’environ 900 mm de diamètre. L’artère du Santerre transportera du gaz via une forte pression (entre 67 et 80 bars). À l’entrée des villes, un prestataire se chargera de distribuer ce gaz dans les foyers et les industries, mais avec une pression redescendue à 4 bars. La canalisation sera équipée de dispositifs d’interruption de transit appelés « postes de sectionnement » et postes de « demi-coupure » : un poste de sectionnement à Grivillers, un poste de demi-coupure à Ressons-sur-Matz et à Chilly. Ces postes permettent d’effectuer la maintenance et d’assurer la sécurité de l’ouvrage en interrompant la circulation du gaz si nécessaire puis en décomprimant un tronçon de  canalisation.

Des nécropoles gauloises, une occupation romaine et des munitions

Le démarrage des travaux sur les postes d’extrémités (Chilly et Ressons-sur-Matz) a eu lieu en juillet 2015 – un calendrier de travaux adapté en partie avec les fouilles archéologiques menées par l’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) qui a déterminé trois zones de fouilles sur le tracé du gazoduc. Réalisées pendant le dernier trimestre 2015, les fouilles ont mis à jour une nécropole gauloise et de nombreux vestiges préhistoriques à Dancourt-Popincourt et à La Chavatte où 12 sépultures et 14 tombes ont été découvertes. À Bus-la-Mésière, ce sont des vestiges de bâtiments, les enduits peints d’une villa gallo-romaine qui ont été repérés, attestant de la présence romaine dans ce village. Quelques mois auparavant, en mars, plus de 1,5 tonne d’obus datant de la Première Guerre mondiale avaient été découverts à Chilly. Parmi ces munitions, on dénombrait 61 bombes de tranchées (ou « crapouillots ») de 16 tonnes, une de 18 tonnes, 13 de 40 tonnes, 17 obus et 43 grenades françaises, allemandes et britanniques.

Une entente avec les agriculteurs locaux en février 2016

Le 23 février, après plusieurs mois concertation, les représentants de GRTgaz ont signé une convention locale d’application spécifique avec les chambres d’agriculture de la Somme et de l’Oise. Outre la réparation financière des préjudices occasionnés lors du chantier de pose, elle traite des conditions de remise en état des sols occupés durant le chantier. Avant les travaux, chaque agriculteur dont au moins l’une des parcelles est concernée par le chantier a signé une convention avec GRTgaz. « Les indemnités prennent en compte le type de récoltes effectuées sur la parcelle, la surface de terre mise en indisponibilité le temps des travaux ou encore l’accès au champ durant cette période. Si l’artère traverse le champ, l’exploitant sera davantage indemnisé que si c’est sur un bord de parcelle », précise Daniel Dufour.

Le démarrage des travaux de construction en mars 2016

es premiers travaux d’enfouissement de cette nouvelle canalisation ont débuté en mars. En quelques mois, ce sont quelque 1 800 tubes de 17 mètres qui ont été disposés pour parcourir les 33 km nécessaires à la traversée de 20 communes du sud-est de la Somme et quelques communes de l’Oise. Si le chantier n’a pas représenté de difficultés techniques particulières, le franchissement de routes départementales très fréquentées ou encore la traversée de l’Avre a tout de même nécessité des forages selon une technique particulière et relativement coûteuse – environ 2 millions d’euros sur un coût total estimé à près de 50 millions d’euros.

À la reconquête de la biodiversité depuis février 2015

Dans la conduite de ses projets, GRTgaz ambitionne de limiter l’impact de ses activités sur l’environnement. Différentes mesures ont été mises en place durant ce chantier, en partenariat avec les institutions et les associations locales : de l’éco-pâturage pour l’entretien des espaces verts, l’installation de ruches à proximité de la station d’interconnexion de Cuvilly et également des plantations d’arbres têtards dans le parc naturel régional de l’Avesnois. La véritable nouveauté de ce chantier réside dans le fait d’avoir regroupé toutes les mesures compensatrices sur un seul site, choisi par le centre permanent d’initiatives pour l’environnement (CPIE) vallée de Somme pour son intérêt environnemental : le marais de Villers-lès-Roye, une zone humide située sur la commune de Villers-lès-Roye à quelques kilomètres d

Uu chantier. « La forêt avait presque entièrement envahi le marais, entraînant avec elle la disparition de toute une faune et une flore spécifiques » explique Coralie Morel, chargée de mission biodiversité au CPIE. « Grâce à ce partenariat, nous avons entamé des travaux de restauration notamment par l’intermédiaire de chantiers natures. C’est un site où nous avons observé plus de 190 espèces animales et végétales » souligne-t-elle. La signature d’une convention entre le CPIE, la commune et GRTgaz il y a presque deux ans a permis de mener de nombreuses actions sur le site. Le CPIE en charge de la restauration et de la gestion écologique du marais a déjà réalisé plusieurs inventaires floristiques et faunistique qui ont d’ailleurs donné lieu début 2016 à la rédaction d’un plan de gestion quinquennal et à des chantiers nature pendant la saison estivale. GRTgaz s’est engagé à assurer le financement du site sur les vingt prochaines années. À l’été 2018, le marais deviendra un lieu accessible à tous.