GNV : La nouvelle manne européenne

Publié le 05/12/2016

5 min

Publié le 05/12/2016

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Pour l’Europe, le développement du gaz naturel pour véhicules (GNV) est un moyen pertinent de réduire sa très grande dépendance au pétrole, d’améliorer sa sécurité d’approvisionnement en diversifiant son mix énergétique et de réduire les effets du transport sur l’environnement. En publiant en 2014 la directive « AFI », elle a encouragé ses États membres à se doter d’une véritable stratégie et à affirmer leurs ambitions. Quelles sont-elles aujourd’hui ? Et quels sont ces pays qui portent une nouvelle dynamique ?

Par Laura Icart

Le 18 novembre était la date butoir au sein des pays membre de l’Union européenne pour la remise de leur cadre d’action pour le développement des carburants alternatifs (Canca). Celui-ci doit fixer des objectifs en matière de nombre de points d’avitaillement GNV aux échéances 2020 (zones urbaines) et 2025 (corridors du réseau transeuropéen de transport dit « RTE-T »). Si chaque pays est libre de proposer sa stratégie, certains critères sont cependant obligatoires pour dessiner les ambitions européennes : évaluation des perspectives, objectifs chiffrés, mesures requises pour y parvenir et désignation des zones urbaines ou denses qui devront être équipées. À l’heure actuelle, peu de pays ont déjà rendu leurs copies mais selon les premières tendances les dynamiques et les ambitions semblent disparates d’un pays à l’autre.

La filière GNV : moteur des ambitions françaises

Le ministère de l’Environnement, de l’énergie et de la mer a publié le 23 novembre dernier son projet de réponse à la directive « AFI », qui a fait l’objet d’une consultation publique jusqu’au 14 décembre. Ce projet « a minima », selon Vincent Rousseau, directeur de projet mobilité chez GRTgaz, «  ne reflète pas les ambitions des acteurs de la filière GNV, qui ont engagé ces dernières années une dynamique de développement sur le terrain très importante ». Dans un secteur très porteur comme celui du transport lourd et à fort potentiel, la réponse du gouvernement a de quoi décevoir les acteurs de la filière. La France comptait, fin 2016, une cinquantaine de stations publiques ; les chiffres annoncés à l’horizon 2020 évoquent un total de 80 stations GNC, de 115 à l’horizon 2025, auxquelles s‘ajoutent les 25 stations GNL supplémentaires à l’horizon 2025. Les 140 stations affichées au compteur par l’État français ne semblent pas refléter l’ambition et le volontarisme affichés par la filière GNV et portés en mars dernier par l’AFGNV qui annonçait un réseau de 250 stations à l’horizon 2020. Un nouveau maillage pour permettre notamment de répondre à l’augmentation du parc véhicules qui devrait, toujours l’association, atteindre le nombre de 30 000 en 2020. Dans une réponse à la proposition du gouvernement, l’AFGNV renouvelle ses ambitions qu’elle qualifie de « réalistes et tenables » et affirme que seules ses ambitions seront en mesure de répondre aux objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)1.

Entre dynamique forte…

À l’instar de la France, dans la course au GNV l’Espagne fait également figure de premier de la classe. Au-delà des perspectives annoncées dans le cadre du Canca, à savoir atteindre une cinquantaine de stations publiques et une flotte de 5 000 véhicules à l’horizon 2020, le pays multiplie les projets. Gaz Natural Fenosa fournira du bioGNV à la flotte municipale de Pampelune, Madrid a validé fin décembre l’acquisition de 170 bus GNV et la Renfe (réseau ferroviaire national) s’apprête à lancer un projet pilote pour le développement de locomotives alimentées au GNL pour le transport de passagers. La Belgique et la République tchèque sont aussi devenues des moteurs en Europe. Pour la première, les objectifs de son Canca sont très ambitieux, puisque les Belges prévoient à l’horizon 2020 une flotte de 50 000 véhicules et un réseau de stations avoisinant les 350 points de vente. Plus axé sur le segment des véhicules légers, le pays est en train de développer le secteur des transports lourds. La République tchèque quant à elle a quasi triplé en moins de trois ans son nombre de stations, en passant de 50 à plus de 140. La filière est fortement soutenue par le gouvernement qui a annoncé un réseau de 200 stations à l’horizon 2020, objectif qui devrait selon les prévisions de l’association gazière tchèque être atteint dès 2018. Si La Roumanie et l’Irlande peuvent faire figure de Petit Poucet, les deux États ont clairement affiché leur volonté de développer le GNV. L’Irlande, qui ne possède actuellement aucune infrastructure sur son territoire, prévoit d’ici 2020 un réseau de 19 stations-service publiques et une flotte de 4 000 véhicules. La Roumanie a annoncé mi-décembre le déploiement, d’ici quatre ans, de 9 stations, projet financé en partie avec des aides européennes.

… et dynamique plus mesurée

Une dynamique plus mesurée est constatée dans de nombreux États européens. Dans les pays où le GNV est déjà bien ancré comme l’Ukraine, l’Italie, l’Allemagne ou encore la Suède, les tendances annoncées favorisent plutôt une consolidation des acquis. La Pologne, la Grèce ou le Royaume-Uni semblent avoir, pour le moment, des ambitions plus modestes. 

1 Le volet mobilité prévoit 3 % de poids lourds GNV à l’horizon 2023 (soit environ 24 000 poids lourds), dont 20 % fonctionnant au bioGNV.