À l’assaut de la Manche

Publié le 22/06/2017

4 min

Publié le 22/06/2017

Temps de lecture : 4 min 4 min

La Brittany Ferries a annoncé à Honfleur le 20 juin la construction d’un nouveau ferry. Baptisé Le Honfleur, il sera propulsé au gaz naturel liquéfié (GNL). Lorsqu’il prendra la mer en juin 2019, il pourra se targuer d’être l’un des navires les plus respectueux de l’environnement et le premier ferry au GNL opérant sur la Manche. Retour sur les aspirations et la vision de long terme de la compagnie maritime bretonne.

Par Laura Icart

Si la Brittany Ferries a depuis longtemps affirmé ses ambitions en matière de GNL, l’engouement pour ce nouveau carburant, qui présente l’intérêt de ne dégager ni particule ni soufre et beaucoup moins de CO2 et d’oxyde d’azote (NOx) que les autres carburants, est un pas de plus pour « verdir » nos océans. Gaz d’aujourd’hui a demandé à Frédéric Pouget, directeur du pôle armement et opérations maritimes et portuaires chez Brittany Ferries, de revenir sur les spécificités techniques du futur Honfleur et de nous expliquer pourquoi la compagnie bretonne mise beaucoup sur le GNL, illustrant sa volonté de s’inscrire dans la transition énergétique.

 

Le Honfleur va naviguer au GNL. Parlez-nous de la genèse de ce projet…

Chez Brittany Ferries, nous avons engagé une réflexion autour du GNL depuis 2009. Nous assurons une veille technologique et économique constante (hybridation des navires, piles à combustible, solaire). Le Honfleur est la concrétisation des travaux menés depuis plusieurs années sur le GNL au sein de notre compagnie. Nous

réfléchissons en permanence à l’amélioration de notre modèle énergétique avec entre autres l’optimisation de la puissance installée ou encore la réduction de la consommation énergétique de nos bateaux. Nous avons l’ambition d’aller au-delà des réglementations ! Le Honfleur aura une empreinte carbone très faible. Un projet comme ce ferry, c’est presque quatre ans de travail pour trouver une solution techniquement viable et économiquement intéressante sur un navire transmanche. Les principales difficultés rencontrées ont été le prix du combustible mais surtout sa logistique. Les prix de logistique sont importants ! Approvisionner un navire par barge est un modèle économique avec des surcoûts conséquents qui le rend peu compétitif par rapport au gasoil. Il a donc fallu innover en cherchant, avec nos partenaires, des solutions d’approvisionnement optimales, aussi bien techniquement qu’économiquement. Nous avons sollicité un certain nombre de fournisseurs de gaz en Europe et envisagé plusieurs dimensions : celle du prix, de la fréquence d’approvisionnement et de l’approvisionnement lui-même.

Quelles sont les caractéristiques techniques du navire ?

Avec presque 185 mètres de longueur et 31 mètres de largeur, Le Honfleur pourra accueillir jusqu’à 1 680 passagers. Il utilisera quatre groupes électrogènes « dualfuel » et déploiera une puissance comprise entre 28 et 29 MW. Il sera le plus grand navire de ce type exploité en Manche et affecté à sa ligne la plus fréquentée, celle de Caen/Ouistreham – Portsmouth (près de 1 million de passagers, 300 000 voitures et plus de 100 000 camions par an).

Plus concrètement, comment se passeront les opérations de chargement du navire ?

C’est une deuxième source d’innovation. Les ferries ont cette particularité de ne pas avoir un stockage important car l’espace doit être au maximum optimisé pour la vente. Avec notre partenaire Total, nous avons organisé une solution d’approvisionnement GNL par ISO-conteneurs suivant un schéma assez simple. Des conteneurs seront acheminés par camion du terminal de Dunkerque au port de Caen/Ouistreham, puis à bord afin d’alimenter un réservoir fixe de stockage, situé à l’arrière du bateau. La durée de chargement lors de l’escale sera de 15 minutes.

Vous avez évoqué votre partenariat avec Total, qu’en est-il justement ?

Nous avons signé un partenariat avec Total en janvier 2017 dans le cadre d’un appel d’offre spécifique. Au-delà du prix, c’est le modèle proposé par Total qui nous a séduits : la fiabilité de la chaîne de transport et la capacité à nous convaincre que si demain nous construisons d’autres navires, ils seront en mesure de continuer à développer le GNL sur un modèle maritime.

L’avenir se conjugue-t-il au GNL pour la Brittany Ferries ?

Notre ambition est que chaque renouvellement de flotte se fasse en motorisation GNL. Avec Le Honfleur, nous avons créé notre propre modèle d’alimentation, mais ce que l’on souhaite c’est qu’il y ait une vraie ambition européenne qui se concrétise avec des infrastructures dans les ports et les ports périphériques afin d’être en mesure de faire du GNL un carburant de référence sans les problèmes de logistique qui lui incombent.